Vous étiez nombreux à vouloir échanger avec le landais Alain Vidalies après l'enregistrement de La Voix Est Libre, une émission à retrouver samedi 26 octobre à 11H30 sur France 3 Aquitaine. Une rencontre conviviale. Vos questions... et ses réponses.
Après une visite de nos locaux, nos "internautes-invités" ont assisté à l'enregistrement de l'émission depuis la salle de régie principale.
Voici quelques extraits de la discussion qu'ils ont eue avec notre invité hors caméra :
A quoi sert l’A65 ? Fallait-il construire une autoroute dans les Landes ?
Alain Vidalies : Il y a eu un long débat sur l’opportunité de cette autoroute qui a duré plus de vingt ans. C’était l’une des priorités de tous les partis politiques sauf le PC et les Verts.
Le constat, c’était qu’à l’époque, c’était l’aventure pour aller de Bordeaux à Pau, les deux plus grandes villes d’Aquitaine. Or, à Pau, il y avait le bassin de Lacq et la crainte que les industriels n’aillent plutôt vers Toulouse. L’A65 n’est pas une autoroute de confort pour aller à Bordeaux. C’est une autoroute pour les industriels.
Le débat a été tranché par les citoyens qui ont choisi lors des élections régionales.
Il y a aussi le problème de son financement. Si Alienor ne rentre pas dans ses frais, l’Etat devra reprendre à sa charge l’autoroute et cela ne coûtera-t-il pas très cher aux citoyens ?
Alain Vidalies : Aujourd’hui, il y a une concession. A supposer qu’Alienor dépose le bilan -c’est une filiale de Vinci et c’est une hypothèse hautement improbable- l’entreprise devra rembourser 300 millions d’Euros à l’Etat et perdrait plus de 600 millions d’euros. L’Etat héritera de l’infrastructure à moitié prix et maintiendra le péage.
Mais personne ne peut penser qu’Alienor fasse faillite...
Est-il vrai que notre pays à un comportement naïf sur l’emploi face à la stratégie de certains pays comme la Chine ou l’Allemagne ? A quand l’harmonisation fiscale, l’harmonisation du droit du travail ?
Alain Vidalies : Dans cette situation de crise et compte tenu de la montée de l’extrême droite, les prochaines élections européennes seront essentielles. On pourrait se retrouver en mai avec un Parlement Européen à majorité europhobe. Des élus qui se seraient présentés pourraient dire « nous, on ne veut pas de l’Europe ». Qui va voter aux élections européennes ? Ceux qui se déplacent pour un vote protestataire ou un vote contre l’Europe. Ces élections sont aussi importantes que la Présidentielle ou les législatives. Ne pourrait-on pas inviter les citoyens à réfléchir sur l’Europe, sur les 3 guerres (1870, 1914, 1939) qui ont abouti à sa construction. Il a fallu ces affrontements-là pour y arriver.
Alors ensuite, on peut se demander s’il l’on n’a pas construit l’Europe trop vite.
Prenons l’exemple du photovoltaïque . On s’est dit : « en France on n’a pas de pétrole mais on a du soleil. Fabriquons des panneaux ». Et l’Etat s’est dit qu’il aller acheter cette énergie à prix élevé pour lancer le marché. Mais 3 ans plus tard, l’Etat a tout arrêté et les chinois ont envahi le marché. Ça a été une catastrophe. L’Europe est intervenue mais elle est intervenue trop tard. Elle aurait du rétablir des barrières douanières non pas à la frontières de la France comme le propose le FN mais aux frontières de l’Union Européenne.
Dans l’Affaire Léonarda ou sur les Roms, on a eu l’impression d’un désaccord entre Manuel Valls et le gouvernement. N’y-a-t-il pas eu un manque de cohésion ?
Alain Vidalies : Dans l’affaire Léonarda, et croyez-moi j’étais au cœur du problème, il n’y a pas eu de manque de cohésion. Alors, j’entends les critiques autour du Président de la République qui n’aurait pas dû intervenir. Mais cinq jours plus tôt, la presse écrite réclamait son intervention.
Ce dossier a permis de relancer le débat sur le droit d’asile. L’an dernier, la France a enregistré 62 000 demandes d’asile. 85% ont été refusées. Pour obtenir le droit d’asile, il faut être persécuté dans son pays pour ses opinions ou ses idées politiques. Or, beaucoup de demandes émanent d’immigrés économiques qui peuvent faire appel si leur dossier est rejeté.
Pour Léonarda, la procédure a duré plus de quatre ans. Il faut réduire ce délai et éviter que des gens qui ne correspondent pas aux critères du droit d’asile ne s’installent en France.
Mais finalement vous tenez le même discours que Nicolas Sarkozy alors que le slogan de François Hollande c’était "le changement c’est maintenant". Où est le changement ?
Alain Vidalies : Lors des débats à l’Assemblée Nationale, la droite nous reproche d’avoir augmentereles impôts. Oui pour financer la sécurité sociale, nous avons imposé les placements financiers. Nous avons aussi financé 60 000 emplois supplémentaires dans l’Education nationale, l’IVG gratuite.
La droite dit « on a plus le budget, on privatise ». Mais, il n’y a pas un pays au monde qui ait un système de services publics aussi développé que le notre. Il faut le défendre et le financer.
Je suis d’une génération europhile, mon grand-père et mon père ont fait la guerre. Mais aujourdhui, l’Europe n’est-elle pas perçue uniquement comme un espace de contraintes sans vision à long terme ?
Alain Vidalies : C’est vrai qu’on a dénaturé l’Europe. On n’a jamais voulu la faire exister en tant que telle. Quelle Europe voulons-nous vraiment ? Il y a eu un raté mais l’Europe reste un combat à mener pour les jeunes
Les Etats-Unis ont frôlé la faillite. Ce scénario est-il envisageable en France ?
Alain Vidalies : Non, les Etats-Unis ont un régime présidentiel et une loi particulière qui prévoit ce cas de figure.
En France, nous avons un régime parlementaire. Et quand bien même le budget ne serait pas voté le 31 décembre, le Président de la République aurait la possibilité de le promulguer tel qu’il a été présenté à l’Assemblée. J’avoue que cette disposition américaine n’est pas le meilleur exemple du génie des Etats-Unis mais leur espionnage m’inquiète davantage. D’autant que j’envoie par SMS mes coins à champignons…
Quelle évolution avez-vous noté dans la politique au cours de votre carrière ?
Alain Vidalies : Nous avons notre spécificité que les gens de ma génération n’ont pas su maîtriser : le cumul des mandats et l’absentéisme. L’émergence des chaines d’info en continu a aussi changé la façon de pratiquer la politique. Nous sommes soumis à la pression de devoir répondre en direct. Cela ne favorise pas le débat. Et puis, admettons que, devant vous, je lâche une énormité sur l’un des membres du gouvernement. Alors tous les médias en parlent et je deviens célèbre. Aujourd’hui, les jeunes parlementaires sont tentés de se faire connaître par ces moyens.
Il y a eu des évolutions positives la décentralisation, la démocratisation, les réseaux sociaux aussi où les gens peuvent s’exprimer. Mais qui peut résumer sa pensée en 146 signes ?