Chaque année, en France, près de 50 000 femmes sont atteintes d’un cancer du sein. Pour 25% d’entre elles, l’ablation du sein est obligatoire. Les patientes se tournent de plus en plus vers des méthodes de reconstruction plus naturelles et sans prothèse. Comme le lipomodelage.
Près de 30 000 procédures de lipomodelage sont actuellement réalisées chaque année en France. Dans 2 ans, on devrait en compter 200 000.
Une technique qui n’est pas nouvelle à proprement parler, mais qui, depuis le 1er janvier 2014, est totalement prise en charge par la Sécurité Sociale dans le cadre du cancer du sein.
Une auto-greffe
Une technique basée sur le prélèvement de la graisse sur les zones où elle est en excès, comme pour une liposuccion.Il s’agit d’aspirer de la graisse, puis de la filtrer ou de la centrifuger afin de pouvoir la réinjecter. Ce procédé est utilisé pour reconstruire intégralement le sein, à condition que la patiente ait suffisamment de graisse et une peau de très bonne qualité, ou pour améliorer l’aspect d’une reconstruction.
Une auto-greffe qui permet de réaliser du « sur mesure » et favorise la symétrie des seins.
Résultats stables
Elle donne des résultats stables dans le temps et évite les réinterventions à distance pour changer d'implant. Le lipomodelage engendre donc peu de contraintes post-opératoires et peu de séquelles au niveau du site de prélèvement, hormis les douleurs qui peuvent être localisées à cet endroit.Cette intervention est généralement réalisée lors d'une courte hospitalisation, une nuit, mais également en ambulatoire.
Cette méthode est surveillée sur le plan cancérologique, mais les publications récentes ne montrent pas de risque accru de récidive de cancer.
Reportage : Evelyne Rimbert, Maurice Tiouka, Jean-Pierre Vindiollet. Intervenants : Odette TRONCHE (Opérée en septembre dernier), Docteur Christophe SCHERER (Chirurgien spécialiste du cancer du sein à Pôle Santé République), Pierre DE VILLETTE (Directeur du Pôle Santé République).
Les différentes techniques de reconstruction mammaire
Le docteur Chantal EMERING, chirurgien plasticien au CHU de Clermont-Ferrand et au Centre Jean Perrin, est venue sur notre plateau pour nous parler des différentes techniques de reconstruction mammaire.Docteur EMERING, vous pratiquez vous aussi cette technique du lipomodelage au CHU de Clermont-Ferrand et au Centre Jean Perrin, est-ce que vous êtes aussi emballée par cette technique que le sont vos confrères du Pôle Santé République ?
« Oui, tout à fait, car c’est une technique où on n’utilise pas de corps étrangers. On crée très peu de cicatrices supplémentaires pour les patientes et on a très peu de rejets puisqu’on utilise la propre graisse des patientes. Comme, par contre, il s’agit d’une greffe et qu’elle doit être revascularisée par le tissu dans lequel on l’a injectée, la bonne réussite dépend beaucoup des suites d’une radiothérapie, par exemple, et du fait qu’une patiente soit fumeuse ou pas, parce que les fumeuses ont souvent plus de risques d’avoir des nécroses.
Quelle est la différence entre reconstruction immédiate et reconstruction secondaire ?
La reconstruction immédiate est une reconstruction qui se fait en même temps que le sein est enlevé. Ce qui permet aux patientes de ne pas passer par l’étape très traumatisante où elles sont mutilées et doivent s’habiller avec des camouflages ou avec des prothèses. La reconstruction secondaire est une reconstruction qui se fait à distance de l’ablation du sein.
Il est important de préciser que la reconstruction mammaire, quelle qu’elle soit, ne doit pas retarder le traitement du cancer du sein qui doit rester primordial ?
Tout à fait, parce que, forcément, c’est toujours le traitement d’une maladie grave qui est le cancer du sein. La reconstruction mammaire ne doit pas créer des conditions qui vont retarder la radiothérapie ou la chimiothérapie.
Aujourd’hui, quelles sont les différentes techniques de reconstruction mammaire ?
Les reconstructions mammaires deviennent de plus en plus fréquentes par lipomodelage qui devient d’ailleurs maintenant une technique très utilisée pour reconstruire l’ensemble du sein. Sinon, il y a les prothèses mammaires. Elles ont fait l’objet d’évolutions importantes ces dernières années. Déjà, elles sont plus sécurisées, notamment depuis le scandale des prothèses PIP et on a actuellement un très grand choix de formes de prothèses pour mieux symétriser les seins. Les prothèses nécessitent, par contre, des réinterventions régulières parce que la prothèse n’a pas une durée de vie éternelle et donc, souvent, on complète également la reconstruction des prothèses par du lipomodelage pour améliorer l’aspect esthétique du décolleté ou de certaines zones du sein.
Il existe une technique du « grand dorsal », qu’est-ce que c’est ? Et pourquoi est-elle très souvent utilisée ?
Il s’agit d’une technique qui aide à apporter beaucoup de matière et notamment elle permet de reconstruire des seins d’un assez gros volume, d’apporter de la peau et surtout d’apporter un tissu très bien vascularisé parce qu’on prend un muscle au niveau du dos. Ensuite, on le tunnélise pour reconstruire le sein et cette technique permet d’utiliser soit une prothèse, soit de compléter avec du lipomodelage. C’est un des lambeaux qu’on a très longtemps utilisé, depuis les années 70, avec également le grand droit de l’abdomen qui est un autre lambeau. Là, on prend un muscle et de la peau au niveau du ventre. Par contre, cette technique créait souvent des éventrations. Actuellement, elle évolue, notamment vers le DIEP qui est un prélèvement de cette même graisse du ventre mais qu’on dissèque ensuite sur un seul pédicule vasculaire artério veineux qui est ensuite branché en microchirurgie au niveau du thorax.
Selon vous, quelle pourrait être la technique du futur ?
Et bien, je pense qu’on va rester, pour les patientes qui ont des petits seins, plus sur le lipomodelage parce qu’il est très peu délétère et ensuite peut-être sur le DIEP et d’autres lambeaux disséqués en microchirurgie pour les autres reconstructions ».
Pour plus d'informations, vous pouvez consulter le site officiel de la Société Française de Chirurgie Plastique Reconstructrice et Esthétique.