A Souvigny, dans l'Allier, les travaux de restauration de l'église se poursuivent. Ils ont démarré en septembre 2023. Après la restauration de la toiture, de l'orgue et du clocher, c'est maintenant au tour de la chapelle neuve. Elle abrite le tombeau de Charles 1er de Bourbon et d’Agnès de Bourgogne, passablement abîmé par le temps.
La chapelle neuve de l’église de Souvigny (Allier) a droit à un coup de jeune bien mérité. Les morceaux d’albâtre retrouvent leur place initiale pour reformer le fourreau de l’épée, actuellement en plusieurs morceaux. Le tombeau est celui de Charles 1er de Bourbon et Agnès de Bourgogne, dans la chapelle neuve de l’église de Souvigny. Hubert Boursier, conservateur-restaurateur, explique : « On retrouve la structure d’un tombeau classique du XVème avec une partie de soubassement en calcaire marbrier de Belgique, les galeries en albâtre, une dalle avec un épitaphe et la sculpture de Charles de Bourbon. »
Ces gisants, sculptés au XVème siècle, ont été endommagés au moment de la révolution : « On a enlevé tous les éléments qui représentaient le Duc à savoir la fleur de lys, les mains et les nez ont été cassés, ces éléments-là ont disparu », analyse Hubert Boursier.
Un trésor abîmé
Ils ont fait les frais d’une mauvaise restauration au XIXème siècle, où des tiges de métal ont été introduites dans la pierre. Hubert Boursier décrit : « On a démonté l’épée de Charles de Bourbon qui était complètement explosée par les armatures métalliques introduites à l’intérieur d’un fragment d’origine. Ça a été solidarisé avec la sculpture au XIXème siècle lorsque les gisants ont été remis en place sur le tombeau. Par phénomène de corrosion, ces petits morceaux de métal ont réussi à fractionner le fragment de fourreau de l’épée ».
Son travail est de recoller ces morceaux : « On prend une résine tridimensionnelle à prise très lente. Plus elle va prendre lentement, plus elle est souple, moins elle est cassante. Elle va pouvoir pénétrer le plan de collage. Pour les petits collages, on utilise une colle acrylique."
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Retirer les éléments nuisibles
Du plâtre a été utilisé pour recoller certaines parties : « L’ensemble du tombeau est remonté au plâtre, ce qui n’aurait jamais été fait à l’origine. Ce montage est néfaste pour la conservation de l’œuvre. Des sulfates vont migrer dans les différentes pierres et vont créer des problèmes de desquamation ou de déplaquage. La remontée d’humidité entraîne des nitrates dans le sol et va dissoudre partiellement le plâtre, tout ça va migrer dans la pierre et provoquer des pulvérulences. Les mouleurs ont malheureusement laissé tout leur plâtre de fond de forme et les agents démoulants à la surface. Il a fallu retirer tous ces éléments nuisibles à la conservation de l’albâtre », raconte Hubert Boursier.
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Un édifice usé par le temps
La pierre s’effrite, l’ensemble peut s’écrouler. Le tombeau sera donc entièrement démonté pour permettre la restauration de la chapelle dont les voûtes menacent de s’effondrer. Laurent Poirier, directeur du patrimoine au Conseil départemental de l'Allier, indique : « Les travaux entrepris sur l’église prieurale de Souvigny sont très conséquents. La partie la plus problématique est la chapelle neuve de Bourbon avec des travaux structurels. Les travaux ont commencé par les gisants et le tombeau car il va falloir les retirer le temps que les travaux du bâtiment se fassent. La chapelle sera étayée car il y a un risque de chute de certaines ogives. L’édifice est vraiment en péril. Il y a un arrêté de péril depuis 2020 et l’édifice n’est plus accessible au public. »
"On a des voûtes qui menacent d’effondrement"
Selon lui, le travail s’annonce titanesque : « Il faudra que la chapelle soit entièrement étayée, mise sous parapluie à l’extérieur pour défaire la couverture qui est à bout de souffle et intervenir par-dessus les voûtes pour remédier au désordre structurel. On a des voûtes qui menacent d’effondrement, des ogives qui risquent de tomber. Des morceaux seront changés et tout l’appareillage des voûtes devra être repris par des injections de coulis de chaux, des remplacements de pierres… Il faut remailler toute la structure et lui donner de la cohérence. Avec le temps, le bâtiment a travaillé et on n’a plus de cohérence des voûtes. Ensuite, on pourra songer à la restauration des décors. On est en présence d’un joyau de l’art gothique flamboyant. C’est la seule chapelle funéraire en France dont les sépultures n’ont pas été dégradées à la révolution.»
Les travaux de restauration de la chapelle débuteront dans un an. C’est une troisième étape après la remise en état du clocher de l’orgue et de la toiture : 6 millions d’euros ont été pris en charge par l’Etat, la Région, le Département et les collectivités locales pour rénover cet ensemble prieural clunisien dont le classement au patrimoine mondial de l’UNESCO est en cours.
-Propos recueillis par Christian Darneuville pour France 3 Auvergne