Cold case du chasseur décapité : comment les enquêteurs ont relancé l’affaire

Va-t-on connaître le nom du ou des auteurs d’un meurtre commis il y a plus de 25 ans ? Ce jeudi 30 juin, la veuve de l’homme retrouvé décapité dans l'Allier, en 1995, a été mise en examen pour meurtre. Un rebondissement majeur qu’il faut attribuer à la mobilisation d’une cellule d’enquêteurs créée il y a 2 ans. On vous explique comment ils ont travaillé.

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Est-ce l’épilogue d’un cold case vieux de 27 ans ? Reste que l’affaire du meurtre de Christophe Doire, retrouvé décapité dans un fossé à Busset, près de Vichy, le jour de Noël 1995, vient d'être relancée. La veuve de la victime, âgée de 55 ans, a été placée en garde à vue mardi 28 juin, mise en examen et placée détention provisoire. Un rebondissement majeur car elle n’avait pas été inquiétée jusqu’alors. La réouverture du dossier en 2020 a mis au jour de nouveaux éléments, tout comme l’exhumation du corps de la victime réalisée en avril dernier. 

Une enquête qui connaît différents volets

Le procureur de la République de Cusset a tenu jeudi 30 juin une conférence de presse. Il a fait le récit des nombreux sursauts de l’enquête de cette mystérieuse affaire. Tout commence en 1995. Eric Neveu raconte : « Une enquête approfondie de recherche dans l’intérêt des familles a d'abord été diligentée. Le 25 décembre 1995, à 9 heures, la gendarmerie de Vichy est avisée de la découverte d’un cadavre dans un fossé sur la commune de Busset. Les techniciens d’investigation criminelle procédaient aux constatations, prélèvements et placements sous scellés d’usage. En dépit de longues investigations initiées, le ou les auteurs des faits n’étaient pas identifiés et une ordonnance de non-lieu était rendue le 23 mars 2000. Le 21 mai 2002, suite à des accusations portées par ses sœurs à l’encontre de monsieur Dominique M., une information judiciaire sur charges nouvelles était ouverte. Aucune preuve ou élément déterminant ne permettaient de mettre en cause Dominique M.. Les investigations techniques et scientifiques, les auditions et multiples moyens déployés ne permettaient pas d’identifier l’auteur du meurtre de Christophe Doire et une nouvelle ordonnance de non-lieu était rendue le 6 février 2007 ».



Un nouveau rebondissement

L’affaire a ensuite été relancée. Eric Neveu poursuit : « Début janvier 2017, 10 ans après, le frère de la victime portait à la connaissance du procureur de la République de nouvelles informations, qui donnaient lieu à de nouvelles investigations en enquête préliminaire. Aucun élément nouveau n’était pour autant mis en évidence et l’enquête donnait lieu à un nouveau classement ».

Une cellule d'enquêteurs mobilisée

Mais le véritable tournant de l’enquête a lieu en 2020. Une cellule de 16 enquêteurs dédiés à cette nébuleuse affaire est à pied d’œuvre. Le procureur de la République détaille son fonctionnement : « A partir de mai 2020, après une nouvelle lecture du dossier par le parquet et une réunion de travail avec la section de recherches de Clermont-Ferrand et le service central de renseignement criminel, une nouvelle enquête préliminaire était diligentée, aux fins d’étude et analyse de l’ensemble du dossier et des scellés. Depuis cette date, et dans le plus grand secret, une équipe pluridisciplinaire composée d’enquêteurs, d’un coordinateur criminalistique, d’analystes comportementaux et d’analystes criminels ont procédé à une étude détaillée du dossier. La minutieuse analyse du dossier a permis d’élaborer une nouvelle stratégie de travail avec un lourd investissement sur la partie criminalistique, notamment avec un laboratoire spécialisé en analyses génétiques pour orienter les recherches et orienter les scellés. Toutes les hypothèses de travail ont été envisagées pour identifier les protagonistes de ce crime : l’épouse, la famille, le milieu des chasseurs, l’affaire crapuleuse, les liaisons amoureuses de la victime. Le 17 novembre 2021, de nouveaux éléments qui n’avaient jamais été actés en procédure et qui méritaient d’être approfondis, ont motivé la co-saisine de deux juges d’instruction au pôle criminel du tribunal judiciaire de Cusset, du chef de meurtre. Depuis ces huit derniers mois, neuf enquêteurs de la section de recherches de Clermont-Ferrand, deux enquêteurs du groupement de gendarmerie départemental de l’Allier, un enquêteur du service central du renseignement criminel, trois enquêteurs du département des sciences du comportement du pôle judiciaire de la gendarmerie nationale se sont investis à temps plein sur ce dossier ».

Le rôle présumé de la veuve

Eric Neveu a salué le travail des enquêteurs. Un investissement qui a enfin permis d’aboutir sur l’identification d’un suspect. Le procureur de la République de Cusset souligne : « Le 15 avril 2022, le corps de Christophe Doire a été exhumé aux fins de prélever son ADN et de procéder à des analyses comparatives avec des traces isolées sur des scellées pertinents, notamment les vêtements portés par la victime le jour de la découverte de son cadavre mais également les vêtements susceptibles d’avoir été portés le soir de sa disparition. Plusieurs personnes ont également été prélevées dans l’environnement intéressant l’enquête. Plusieurs dizaines de personnes ont également été auditionnées et de nombreuses investigations techniques ont été initiées. A l’aune de l’ensemble des investigations, de ses déclarations initiales, très souvent incohérentes et versatiles depuis décembre 1995, à l’aune des éléments probants trouvés à son domicile, et de son positionnement durant l’enquête, la veuve de Christophe Doire a été placée en garde à vue ce mardi 28 juin ». L’étau s’est alors resserré autour de la veuve de la victime : « Suite à son manque d’explications crédibles, voire son déni, notamment sur la situation de son couple, elle a été déférée en milieu d’après-midi devant les deux juges d’instruction saisis. Lors de son interrogatoire de première comparution, elle a continué à nier les évidences. A l’issue, elle a été présentée au juge des libertés et de la détention qui vient de la placer en détention provisoire. A ce stade de l’information judiciaire, des indices graves et concordants mettent en évidence sa participation dans le meurtre de Christophe Doire. Les circonstances précises du passage à l’acte nécessitent la poursuite des investigations sur commission rogatoire des juges d’instruction, dans la plus grande sérénité, notamment par respect des parties civiles. Les investigations doivent également se poursuivre pour identifier et interpeller d’autres protagonistes ».




Deux phases d'enquête

A l’issue de la conférence de presse, le procureur de la République a mis en évidence le rôle du facteur chance dans les investigations menées par les enquêteurs, associé à l’important travail des équipes. Le Colonel Serres de la brigade de recherches de Clermont-Ferrand a expliqué la démarche des enquêteurs : « Ce cold case, nous l’avons abordé en deux phases. Il y a eu une longue phase minutieuse de reprise de l’enquête initiale, où il a fallu étudier tous les PV, toutes les hypothèses, tous les scellés, qui ont été menés à la fois par la section de recherches de Clermont-Ferrand et le service central du renseignement criminel. Cela a permis d’apporter un regard neuf sur tout le travail qui avait été mené, de mettre en évidence des axes de travail à reprendre et de proposer au procureur une stratégie d’enquête. Dans une deuxième phase dynamique, nous avons mis en œuvre cette stratégie au sein d’une structure temporaire : une cellule d’enquête dédiée à ce fait criminel, avec des enquêteurs de la section de recherches du groupement de la gendarmerie de l’Allier et du service central du renseignement criminel. Après environ 6 à 8 mois de travail de cette cellule d’enquête, nous en sommes arrivés à cette hypothèse de travail et à l’opération judiciaire levée le 28 juin et qui s’est terminée aujourd’hui ».

D’autres investigations se poursuivent, afin notamment de déterminer d’éventuelles complicités. La veuve de Christophe Doire, aujourd’hui mise en examen du chef de meurtre, encourt une peine de 30 ans de réclusion criminelle.

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