Entre la Drôme et l'Ardèche, le Pouzin est un site de blocage choisi par les gilets jaunes en 2018. Un soir de décembre, la situation se dégrade, des casseurs arrivent en nombre. Les habitants assistent sans comprendre à des scènes de guérilla urbaine.
C’est une nuit que les habitants du Pouzin ne sont pas prêts d'oublier. Le samedi 1ᵉʳ décembre 2018, des heurts éclatent à 17h00. Lieu de rassemblement habituel des Gilets jaunes ardéchois et drômois, le Pouzin connaît une montée soudain de la violence. Malgré les cinq ans passés, le traumatisme est toujours présent.
Des scènes de guérilla urbaine
Depuis deux semaines, les gilets jaunes bloquent un rond-Point où circulent 20 000 voitures par jour. L'ambiance est plutôt bonne enfant. Mais le 1ᵉʳ décembre, la tension monte avec les gendarmes. Elle explose à 17h00. Des casseurs, alertés par les réseaux sociaux et armés de battes de base-ball, se rajoutent au rassemblement. Durant trois heures, le Pouzin vit des scènes de guérilla urbaine dans le quartier de la distillerie. Plusieurs personnes, dont des représentants des forces de l'ordre, sont blessées.
"Pourquoi ça s’est passé au Pouzin ? Parce que c’est entre la Drôme et l’Ardèche. Ici, c’est le croisement de tout. Montélimar et Valence venaient là et ça bloquait tout. L'entrée de l'autoroute n'est qu’à trois kilomètres. [...] On a même eu droit à un hélicoptère" explique Paulo.
"J’étais dehors, je regardais ce que les Gilets Jaunes faisaient et tout d’un coup, il y a eu cette montée de terreur, de peur. J'ai entendu des personnes au téléphone qui disaient : Viens, on casse du CRS, du flic". Je me suis réfugiée chez des amis qui habitaient à côté pour me protéger" se souvient Anne Lamouille.
"Moi, je l’ai très mal vécu. C'est vraiment dommage parce qu’on a une ville très agréable. On pensait que ça n’arrivait que dans des grandes villes, Paris, Marseille, mais jamais en Ardèche" rajoute Pic.
Patrick Haond est commerçant. Il a, lui aussi, été touché par les violences. Un pavé est venu se fracasser contre sa porte d’entrée. Des traces qui ne laissent indemne. "On a vu arriver des gens qu'on ne connaissait pas. C'était quelque chose d'inhumain. On en discute encore avec des collègues. Moi, ça m’a marqué, on n'était pas habitué. Je ne connaissais pas ce que c'était une émeute, sauf à la télé".
40 000 euros de dégâts dans la commune
Une chaussée défoncée, des panneaux à changer... Pour la mairie, les dégâts s’élèvent à 40 000 euros. Malgré tout, la facture est vite avalée pour cette commune dynamique. "C'était le chaos" se souvient le maire, Christophe Vignal. Le plus gros traumatisme, ce ne sont pas les destructions, c'est de voir des gens, des Pouzinois, se battre. [...] Certains gendarmes ont été confrontés à leurs voisins".
Au lendemain des émeutes, les stigmates de la violence sont vite réparés, comme pour effacer ce qui vient de se produire. "Dans son histoire, le Pouzin a souvent été détruit, a minima 4 fois : les guerres de religions, 1944 avec le bombardement des alliés La situation stratégique a souvent entraîné une destruction du Pouzin qui s’est toujours reconstruit. On est toujours dans le mouvement, parce que finalement notre carrefour fait qu’il a de la vie, de la dynamique industrielle, économique, associatif et c’est ce qui reprend le dessus" résume le maire,
Depuis, la mairie a intégré dans son Plan Communal de Sauvegarde, un nouveau risque, celui des "émeutes urbaines" pour mieux anticiper et faire face à de nouveaux débordements.