Lieu de culte désacralisé, la chapelle Sainte-Marie d'Annonay, en Ardèche, abrite désormais un centre chorégraphique

Lieu de culte désacralisé, la chapelle Sainte-Marie d'Annonay, en Ardèche, abrite depuis 2018 un centre chorégraphique confié à la compagnie de danse "La Baraka"... Un épilogue heureux pour cet édifice du XVIIe siècle qui, depuis la Révolution, a connu bien des affectations. D'école de jeunes filles à prison, de lieu d'asile à dépôt communal, ce patrimoine était presque à l'abandon lorsque sa restauration a été décidée.

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Lorsque l'on pousse la porte de l'ancienne chapelle Saint-Marie, dans le centre ancien d'Annonay, l'image est saisissante. Sous les dorures baroques du XVIIe siècle, le plafond richement décoré, il n'y a plus de bancs d'église : sur le vaste sol blanc, les pas des danseurs glissent en silence... Entre ces murs jadis sacrés, le seul miracle qui s'accomplit est celui de la création artistique.

Depuis 2018, "La Chapelle" est un centre chorégraphique. L'espace, entièrement restauré et équipé, a été confiée à la Compagnie "La Baraka". Nawal Aït Benalla, en est la codirectrice artistique - avec son compagnon annonéen Abou Lagraa -, et elle se souvient du jour où ils ont franchi le porche à la recherche de locaux où établir leur activité. Pour eux, ça a été comme une évidence : "On s'est regardé et on s'est dit "c'est ici !". Ce n'est pas une question de religion, il y a quelque chose de particulier dans l'art baroque, dans ces arabesques, dans cette hauteur sous plafond. Il y a une âme, un esprit, dans ces lieux, qui nous ont tout de suite conquis."

"C'est un lieu très inspirant"

Depuis leur installation, "La Chapelle" accueille aussi chaque mois une nouvelle compagnie en résidence, et ce cadre est un atout précieux pour attirer les artistes. Amalia Salle, jeune chorégraphe de la compagnie parisienne Bahia, est de retour quelques années après avoir préparé ici sa première création, qui a été un succès. "Les conditions de répétition sont idéales : la beauté du lieu, son calme, la lumière naturelle qu'on trouve rarement dans les studios de danse... Je suis contente de revenir ici, car cette salle m'a porté chance, la première fois. Elle est très inspirante, c'est comme faire une retraite".

La chapelle Saint-Marie n'a plus accueilli de messe de très longue date. Ses origines remontent à l'année 1630, début de la construction du couvent qui l'abritait. Pendant plusieurs siècles, les religieuses ont dispensé une éducation aux jeunes filles, mais à la Révolution, le couvent est saisi et devient un Bien national. Sa chapelle va dès lors traverser tous les soubresauts de l'Histoire, un peu à l'abandon, un peu salle à tout faire.

Un patrimoine bousculé par l'Histoire

Sous l'Empire, des soldats austro-hongrois y ont été emprisonnés en plein hiver, et pour se réchauffer, ils n'ont pas hésité à transformer en bois de chauffage les planchers de la chapelle et des boiseries datant de Louis XIV. L'heure n'était pas à la conservation. Pas plus qu'en 1914 : en pleine Guerre mondiale, 800 réfugiés de la Meuse trouvent refuge dans ces murs.

Entre-temps, des sœurs Ursulines s'étaient vues confier une nouvelle mission éducative : en 1802, le maire d'Annonay les installe au couvent en échange d'un enseignement destiné aux jeunes filles pauvres de la ville. Mais ce siècle de stabilité va s'interrompre en 1905, avec la loi de séparation des Églises et de l'État : les religieuses doivent quitter les lieux et la chapelle est désacralisée.

L'idée d'un patrimoine à sauvegarder ne voit le jour que dans les années 1950, avec l'inscription du plafond et du portail d'entrée à l’inventaire supplémentaire des monuments historique... Il n'empêche que la chapelle sert successivement de local de gymnastique, de musée, de salle de réunion, ou de dépôt à la commune... Jusqu'en 1981 où c'est l'ensemble de l'édifice qui est classé et protégé, avec des restaurations partielles (plafond et boiseries) et l'installation d'un retable. 

Il faudra toutefois attendre plus de 30 ans avant qu'un projet patrimonial et artistique complet ressuscite la chapelle en un centre chorégraphique qui sert également de lieu d'exposition tous les étés. Pour Antoinette Scherer, Maire d'Annonay de 2017 à 2020, cette réalisation est une immense fierté. L'ancienne élue se souvient de son émotion au soir de son inauguration : "J'étais exaltée de présenter un joyau pareil qui mettait en valeur notre patrimoine avec une vraie ambition culturelle".

Ouverte sur son quartier, la Chapelle a aussi donné un nouvel élan au centre historique d'Annonay. Dans ce secteur ancien, paupérisé et longtemps dégradé, la restauration de l'édifice a joué un rôle de déclencheur... "Voyant que la commune investissait ici, les propriétaires d'immeubles ont fait les démarches pour obtenir des aides et rénover à leur tour leur patrimoine", explique Antoinette Scherer. Des programmes publics ont permis d'améliorer la voirie, de rafraîchir les devantures des commerces, de créer des espaces publics plus accueillants, et autour de la chapelle, les rues ont retrouvé des couleurs.

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