Avocat suspendu à Grenoble: bras de fer entre le ministre de la Justice et Me Ripert

Le garde des Sceaux lui-même rentre dans le débat qui entoure la suspension de Me Ripert dans le cadre d'une procédure disciplinaire. Jean-Jacques Urvoas a adressé un communiqué dans lequel il estime "inadmissibles" le comportement du défenseur.

Avocat "historique" de l'organisation armée d'extrême gauche "Action Directe", Me Bernard Ripert, 65 ans, a été suspendu d'exercice pendant quatre mois par la cour d'appel de Grenoble pour des manquements déontologiques. "Injures", "comportements déplacés", "atteinte à la dignité de la profession" figurent cette fois parmi les griefs.

Condamné déjà à trois reprises à des sanctions disciplinaires, Me Ripert avait notamment été suspendu pendant un an, en 2013, pour avoir qualifié une avocate de "roquet" et dit d'un président de cour d'assises qu'il avait "triché" et "menti".

Dans un appel "au secours" adressé à ses confrères (lire l'encadré), l'avocat estime que les mesures prises à son encontre sont "illégales" et il pense que "les magistrats de la Cour d'Appel s'apprêtent à le radier pour rien du tout, seulement pour assouvir leur haine et leur vindicte  personnelles ou celles de leurs collègues qui s'estiment agressés et offensés par mes défenses."

La riposte du ministre 

La riposte n'a pas tardé. Elle est venu du garde des Sceaux en personne. Dans un communiqué, Jean-Jacques Urvoas estime ces propos "inadmissibles" et affirme que "les magistrats doivent être respectés". Le ministre dit aussi apporter "son soutien à l'ensemble des magistrats et plus spécifiquement aux magistrats grenoblois particulièrement mis en cause".
"Au secours!"
"Je suis un avocat comme vous, mais à votre différence, je subis les persécutions de la justice depuis environ 5 ans du fait de ma combativité et pour avoir dit, à des magistrats qui nous méprisent, leur vérité et parfois leur médiocrité. Si mon discours vous paraît être celui d'un malade mental ou d'un paranoïaque renseignez-vous à mon sujet avant de vous désintéresser de mon propos."

C'est ainsi que commence le message adressé à nombre de confrères par Me Ripert, document dont France 3 Alpes n'a pas été destinataire mais qu'un journaliste a pu se procurer. La missive est longue et signée "Bernard Ripert - Avocat illégalement suspendu". 

Il revient en détails sur tous les griefs qui lui ont été reprochés, s'estimant "abreuvé d'accusations" et victime de "fallacieux prétextes". Me Ripert avoue être un avocat "un peu plus virulent" que les autres, et dit faire "l'objet de persécutions et de harcèlements incessants et illégaux qui s'apparentent à de la torture psychologique et qui constituent à l'évidence, par leur persistance, un traitement inhumain".

Et l'on comprend mieux la réaction du garde des Sceaux quand on découvre dans sa conclusion qu'il parle des "magistrats liberticides grenoblois". Il pense que le procureur général "a fait de sa radiation une affaire personnelle". Selon lui, elle devrait être "effective à la fin de l'année ou au début de l'année prochaine".

"Des radiations d'avocat pour fait d'audience, il n'y en a plus eu depuis la fin des guerres !!! Ce qui est maintenant en cause ce n'est plus Maître Ripert, ma radiation est acquise (...) Ce qui est en cause ce sont les droits de la défense, l'honneur de l'avocature, la solidarité et la confraternité des avocats."

Et de lancer à ses confrères: "Allez-vous laisser maltraiter l'un des vôtres par les magistrats parce qu'il ose plaider des vérités?". "La profession d'avocat serait-elle devenue une profession de lâches et de profiteurs, indifférents au mépris des droits des siens et des droits de la défense? (...) Comment accepter que les décrets de 1991 et 2005, portant organisation de notre profession et nos règlements intérieurs nous obligent à plaider avec "délicatesse et modération" quand la liberté, et même la vie de nos clients, sont en jeu. 30 ans de réclusion, perpétuité.... Est-ce de la délicatesse et de la modération?"

Et de conclure en reprenant une phrase bien connue: "Confrère, on ne mendie pas un juste droit, on se bat pour lui."
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