La vache salers est une figure emblématique du Cantal. Avec sa robe acajou et ses cornes en forme de lyre, elle force l'admiration. Mais savez-vous qu’il en existe de couleur noire ? On vous dit tout sur cette vache exceptionnelle.

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Une robe frisée, un bassin large, une ligne dorsale rectiligne, mais surtout de longues cornes en forme de lyre. Pas de doute, il s’agit d’une vache salers. Cet animal emblematique du département du Cantal est le plus souvent rouge mais savez-vous qu’il existe aussi des salers noires ? Ces vaches ne représentent que 2 % du cheptel français de salers, qui se monte à 205 000 bêtes. Ces salers noires ne sont pas sans rappeler les taureaux espagnols ou portugais. Daniel Brugès est un auteur et illustrateur du Cantal. Il a écrit l’ouvrage « Vaches » aux éditions de Borée. Il connaît bien la race salers : « D’après les spécialistes, les deux couleurs, la robe acajou et la robe noire, remonteraient aux origines de la race, et même aux animaux préhistoriques. Pour beaucoup d’archéologues, les vaches peintes sur les parois de Lascaux représenteraient la race salers. Cela voudrait dire que les premières salers auraient été dans la vallée de la Dordogne et de la Vézère et que petit à petit, elles auraient gagné les montagnes de la haute Auvergne ».

Un retour en grâce au XIXe

L’auteur raconte que la race a bien failli disparaître : « Au fil des siècles, la races s’est affaiblie et a presque dégénéré. Il faudra attendre le XIXe siècle pour la voir réapparaître, avec des programmes de sélection et d’amélioration de la race. Un des grands rénovateur de la race est originaire de Salers : il s’appelait Ernest Tyssandier d’Escous. Cet éleveur voulait améliorer cette race et il a fait de nombreux croisements avec les plus beaux spécimens de la race, ce qui a permis d’avoir des ossatures plus conséquentes. Il y a aussi eu Louis Grognier qui s’est penché sur la salers. Tyssandier d’Escous a privilégié la robe acajou et il a occulté la noire. Suite à ses travaux, la race a été reconnue et est redevenue sur le devant de la scène, après avoir été pendant longtemps une petite race de montagne, utilisée pour le travail. Les amateurs de salers noire disent qu’elle est encore plus rustique que la rouge. On dit même que leurs sabots étaient si solides qu’il n’y avait pas besoin de les ferrer pour le travail ».

Une histoire de famille

Dans le Cantal, à Aurillac, un élevage perpétue la tradition de la salers noire. Il appartient à Philippe Matière, à la tête de l’entreprise du même nom, spécialisée dans la construction de ponts et de structures métalliques. L’entrepreneur explique d’où lui vient sa passion pour la salers noire : « Il y a 40 ans, mon père qui élevait des salers, s’est passionné pour cette vache noire car il pensait que c’était un gène rare. Pour essayer de mieux valoriser la salers, il pensait qu’il valait mieux proposer un produit rare que banalisé. Il a retrouvé tous les canons de la race, tels que décrits par Tyssandier d’Escous, au XIXe. Il s’était bien assuré que la couleur noire faisait partie des critères de la race. A l’époque, il y avait des Américains qui cherchaient des animaux salers noirs pour les croiser avec des brahmanes, afin d’obtenir une bête croisée de couleur noire, avec des muqueuses et des onglons noirs. Les muqueuses noires rendent les animaux moins sensibles à la fièvre aphteuse. Les Américains étaient prêts à payer cher ces bêtes. Mon père avait trouvé cela drôle. Il a commencé à acheter des salers dans un rayon de 30 km autour d’Aurillac. Il a fait se reproduire les bêtes, il a trié, amélioré les canons de son cheptel. Petit à petit, cela a constitué la moitié de son élevage et c’est rester ainsi ».

"Quand ça plaît, ça se vend bien"

Dans son élevage, il compte 150 salers noires. Philippe Matière apprécie tout particulièrement cette race : « J’ai trouvé le travail tout fait. Il y a une tradition qui fait que certains agriculteurs apprécient d’avoir des animaux noirs dans leur troupeau. Quand ils en veulent des beaux, ils savent qu’il y en a chez nous. Ils viennent autant pour le renom du troupeau que pour la qualité intrinsèque des animaux. Ca plaît. Quand ça plaît, ça se vend bien. On n’a aucun mal à écouler nos salers noires ». Philippe Matière poursuit : « Ce qui la rend exceptionnelle c’est que c’est une vache noire alors que les autres sont rouges ! Il y a 2 % du troupeau qui est noir et 98 % qui est rouge. C’est aussi bête que ça ». Philippe Matière passe d’une casquette d’entrepreneur à celle d’éleveur sans aucune difficulté : « Bien sûr que cela me plaît. Quand je serai vieux et que j’aurai pris ma retraite, je m’occuperai de mes vaches. Mon grand-père maternel avait une ferme. Il nous a quittés lorsqu’il avait 95 ans et il ne s’est jamais ennuyé un jour dans sa vie ».

Un éleveur fier

L’éleveur précise : « Le bêtes sont destinées soit à la reproduction, soit à l’engraissement et à la viande. On engraisse à la ferme. On ne vend pas de broutards, on vend des produits finis ». Philippe Matière est particulièrement fier de son taureau Hector, à la fameuse robe noire : « Hector a gagné le prix à Paris, deux fois en 2020 et en 2022, au Salon de l’agriculture. La première fois qu’il a gagné, il était 50 cm plus long et 20 cm plus haut que les voisins. Il était impossible qu’il ne gagne pas ! ». L’entrepreneur a confié à Marcel Vidalinc, l’élevage de ses bêtes à Aurillac et à Malbos. Le responsable d’exploitation de la SCEA de la Cère s’enorgueillit d’élever des salers noires : « Il y a quelques exploitations qui en ont une, deux ou trois. Nous sommes les seuls à en avoir autant. Je suis fier d’élever cette race-là. En concours, beaucoup de gens nous regardent. Il y a deux ans, au salon de l’agriculture, notre taureau avait eu un succès phénoménal ».

Une viande persillée

Marcel Vidalinc nourrit ses bêtes au foin et l’été à l’herbe. Il affirme que les bouchers préfèrent la salers noire car la viande est plus persillée. Il explique comment la sélection de la race s’opère : « Pour faire vivre la race, on fait des sélections. Pour ne pas travailler en consanguinité, on achète des veaux chez des éleveurs qui ont eu deux ou trois vaches comme cela. Si on a deux parents de salers noire, à 99 % leur descendance sera de la même couleur. On a un taureau qui est homozygote et il ne fait que du noir, même si on le croise avec une salers rouge ». Les vaches jeunes sont destinées à l’élevage tandis que les plus âgées sont vendues pour leur viande. Marcel Vidalinc se souvient : « Il y a plus de demandes en salers noires et à l’étranger. Il y a quelques années, on en a vendu en Irlande ».

Des légendes associées

L’Auvergne est une terre de croyances. On raconte que, dans un troupeau, les salers noires portent bonheur. Daniel Brugès rappelle : « Dans la sagesse populaire, un proverbe dit « Tous les cent ans, une vache noire revient à l’étable ». Il pouvait y avoir une salers noire au milieu du troupeau rouge. C’était le gène qui revenait ». L’auteur ajoute : « On disait qu’on offrait une salers noire aux jeunes mariés pour le symbole de la solidité dans le mariage ». Daniel Brugès rapporte une autre légende : « On raconte qu’une jeune bergère gardait ses deux vaches, une rouge et une noire. On peut supposer que c’était des salers. Il y a eu un terrible orage. La jeune bergère a voulu cueillir des fleurs de l’autre côté d’un ruisseau. Elle les a attrapées mais ses sabots ont glissé. Elle est tombée dans l’eau. C’est la salers noire qui l’a sauvée, tandis que la rouge continuait à brouter tranquillement. La bergère n’a jamais voulu se séparer de la salers noire qui lui avait sauvé la vie ». Qu’elle soit noire ou rouge, la race salers est avant tout rustique. Avec sa morphologie de montagnarde, elle s’adapte à tous les climats. C'est une vache dont on ne peut que tomber amoureux.

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