Il croyait être né sous X, l’Etat et le Conseil Départemental du Cantal condamnés à verser 20 000 euros : « C’est une misère »

Privé de retrouvailles avec sa mère biologique en raison d’une erreur administrative, un habitant du Cantal a attaqué l’Etat et le Département. Ils ont été condamnés à lui verser respectivement 15 000 et 5 000 euros lundi 4 avril.

C’est la déception qui prime pour Jean-Pierre Vidal, au lendemain de l’annonce du jugement : l’Etat et le Conseil Départemental du Cantal ont été condamnés à verser 15 000 et 5 000 euros en réparation du préjudice subi, lundi 4 avril. Il a été victime d’une erreur de formulaire au moment de son abandon, et croyait être né sous X. Une erreur qui l’a privé de rentrer en contact avec sa mère biologique, aujourd’hui décédée. Son avocat Me Verdier avait demandé une indemnisation de 400 000 euros alors, ce matin, la nouvelle a du mal à passer : « Je retiens 2 choses, je retiens que l’Etat a été condamné et le département aussi. Maintenant, je suis attristé de voir la somme qui m’a été attribuée. Je rappelle quand même que c’est une vie qui est gâchée. C’est une vie sans famille, des moments durs… Les 20 000 euros qui m’ont été attribués entre le département et l’Etat, c’est une misère, comme d’habitude. Les enfants de la DDASS, on n’a jamais été soutenus et on en a encore une preuve. »

 "A l’heure actuelle ça me fait mal"

Jean-Pierre Vidal explique être « attristé » par le jugement rendu par le tribunal judiciaire d’Aurillac : « Je n’en veux à personne, je me suis battu pendant 2 ans avec Maître Verdier sur ce dossier, malheureusement, à l’heure actuelle, je suis déçu. Quand j’ai appris la nouvelle hier soir à 20 heures, je reconnais que j’ai été très attristé. Ce n’est pas à la hauteur. J’ai connu les foyers, j’ai connu les maisons de rééducation, j’ai été déprimé très jeune, il a fallu m’hospitaliser pour me remettre d’aplomb. J’ai connu la rue, j’ai connu la misère et surtout, je n’ai pas eu de famille. Le mot « Je t’aime maman », je ne connais pas vous savez. A l’heure actuelle ça me fait mal. » Pour lui, sa souffrance n’a pas été reconnue : « On les a condamnés parce qu’on ne pouvait pas faire autrement mais ce qu’on m’a donné, c’est une misère. C’est ce que l’Etat m’avait proposé pour ne pas aller au tribunal. C’est violent. Quand j’ai vu ce jugement je n’y croyais pas. J’ai encore pris une claque aujourd’hui. » Il indique souhaiter faire appel, et espère « être entendu ».

Une quête de la vérité

Jean-Pierre Vidal est né le 4 septembre 1956, à Saint-Flour. Il raconte : « J’ai été placé par ma mère biologique à l’âge de 2 ans chez une nourrice à Saint-Flour. J’y suis resté à peu près jusqu’à l’âge de 8-9 ans. C’est à peu près à ce moment-là que j’ai découvert que ma nourrice n’était pas ma mère biologique. Vu que j’avais appris la vérité, mon comportement a énormément changé. J’étais devenu agressif, désagréable et je n’allais plus à l’école. La DDASS m’a enlevé de cette famille et m’a mis dans un pensionnat de Murat. Le choc a été terrible pour moi ».

"A partir de là, j’ai eu beaucoup de problèmes"

Jean-Pierre a connu un parcours difficile par la suite : « A partir de là, j’ai eu beaucoup de problèmes. J’ai connu plusieurs familles d’accueil, notamment une famille qui était violente envers moi. Je suis tombée dans une famille d’agriculteurs où les enfants placés étaient pris pour en faire des ouvriers pas chers. J’ai aussi dû être hospitalisé à 14 ans dans un établissement spécialisé à Montpellier car je déprimais beaucoup ». Le commerçant regrette d’être passé à côté d’une adoption lorsqu’il était adolescent : « Quand j’avais 14 ans, une médecin de Montpellier avait demandé à m’adopter. Je passais le week-end chez elle. Je me plaisais beaucoup chez elle et son mari. Mais l’adoption n’a pas été possible. Imaginez-vous si à 14 ans j’avais pu être adopté par une famille qui avait les moyens de m’adopter et qui voulait me donner un peu d’amour ».  

Jean-Pierre a toujours eu l’idée en tête de retrouver ses origines mais il s’est heurté à un mur : « J’ai commencé à vouloir chercher l’identité de ma mère quand j’avais 14 ans. A chaque fois on me disait que j’étais né sous X et qu’on ne pouvait me dévoiler mes origines. En 1985, j’écris au département en disant que je voulais connaître mes origines. Je me suis rendu à la DDASS du Cantal. Une éducatrice m’a dit que ce n’était pas la peine de revenir, que le dossier était protégé et que je ne connaîtrai jamais mes origines ».  

Le tournant de 2019

Mais tout bascule finalement en mars 2019 : « En 2019, je fais une nouvelle tentative, poussé par ma femme. Je téléphone à l’ASE (Aide sociale à l’enfance) pour prendre rendez-vous avec une éducatrice. On me dit que mon dossier a disparu du casier aux Archives départementales mais finalement, il est retrouvé et remis à l’ASE du Cantal. On me recontacte le lendemain en me disant qu’il y a eu un gros problème dans le dossier. On me convoque en me disant qu’on pouvait me dire qui était ma mère. J’avais alors les yeux qui brillent mais on m’annonce qu’elle est morte en 1996 d’un cancer. A partir de là, on ne me dit pas grand-chose ». Jean-Pierre apprend qu’il aurait pu avoir accès aux documents sur ses origines quand il avait 18 ans. Il a donc engagé une procédure judicaire. 

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