Café, cantine, dépôt de pain : comment ce restaurant multifonctions a sauvé un village du Cantal

Les 480 habitants de Ladinhac (Cantal) ont bien failli se retrouver sans commerce de proximité. Bar, boulangerie et restaurant ont fermé les uns après les autres, laissant le village sans commerce de proximité. C’était sans compter sur l’ouverture d’Un air de famille, restaurant, mais pas seulement.

Un restaurant, mais pas seulement. “Un air de famille”, à Ladinhac (Cantal), est un établissement pour le moins polyvalent. On peut y déjeuner, y acheter son pain, y retirer un colis ou simplement prendre un café, c’est vous qui voyez. Avec son conjoint, Marine L’Hostis a pris la gérance de l’établissement en 2023 : “C’est un projet qu'on voulait porter depuis de nombreuses années. On venait de la restauration depuis toujours. Moi, je suis fille des restaurateurs. Et puis il y a eu le COVID et ça n'a jamais été le bon moment. On a eu l'opportunité de le faire en début d'année dernière. On a visité plusieurs endroits et on a vraiment eu un coup de cœur sur la commune de Ladinhac, à la fois pour les locaux qui étaient proposés et les gens qu'on a rencontrés.” 

Un établissement multifonctions

Pour elle, la journée commence à 6h50 : “Je réceptionne le pain qui vient d'une boulangerie de La Feuillade, pas très loin de chez nous. J'installe tout ça et le café ouvre à partir de 07h30. Toute la matinée, c'est la partie café-bar qui est ouverte. À partir de midi, on commence le service pour des clients.” Marine sert aussi d'autres clients, bien particuliers : “On assure aussi le service de la cantine scolaire. Les enfants viennent manger tous les midis au restaurant. En semaine, on ferme l’après-midi. Pour le week-end, vendredi et samedi soir, on ouvre, on fait des repas et le bar est également ouvert. Quand il fait beau, la terrasse est ouverte tout l'après-midi.” Et les clients de Marine sont au rendez-vous : “Ça marche bien, on est très content de nos 9 premiers mois sur Ladinhac. On a atteint les objectifs qu'on s'était fixés, c'est une bonne chose. Ça marche bien aussi parce que les gens jouent le jeu, ils sont impliqués dans ce projet-là et nous font fonctionner, que ce soient les particuliers ou les associations. Elles viennent faire leur repas au sein du restaurant, leurs assemblées générales, leurs réunions... On a la cantine tous les midis, ça fait un revenu fixe.” 

Si c'était à refaire, on ferait exactement la même chose.

Marine L'Hostis, gérante "Un Air de famille"

La capacité de l’établissement est importante. “En groupe, on peut recevoir jusqu'à 80 voire 90 personnes en période hivernale. L'été, on a une grosse terrasse en plus qui permet de recevoir également du monde. En restauration classique, une cinquantaine de personnes, c'est déjà très bien. Pour les midis de la semaine, c'est un menu ouvrier à 15,50€ entrée, plat, dessert et sur les week-ends on fait un menu à 24,50€ avec un choix entre 2 entrées, 2 plats, 2 desserts. Ça change tous les week-ends. En règle générale, mon conjoint est à la cuisine et moi côté salle. Après, on a tous les 2 la capacité de faire l'un ou l'autre", raconte Marine. La restauratrice de 36 ans ne regrette pas ce changement de vie, d’autant que la mairie a tout fait pour faciliter l’arrivée du couple : “Pour nous, il y avait 2 arguments essentiels dans notre arrivée sur Ladinhac, c'était qu'il y avait un logement de prévu. Le 2e critère, c'était qu'il y ait une école au sein du village parce qu'on a 2 enfants et que c'était important pour nous qu'ils soient dans le village. Si c'était à refaire, on ferait exactement la même chose. Ça nous plait cette nouvelle vie et c'est sans regret, vraiment.” 

Des projets plein la tête

Une décision confirmée également par le sentiment d’être utile. Elle ressent, chaque jour, la reconnaissance des clients : "C'était une demande de la population. Il y en avait vraiment besoin au sein de la commune. Je le ressens, les gens viennent, ils sont contents. L'été, on a les jeunes qui viennent boire un verre et on était seul bar du coin à être ouvert le soir. C'était vraiment un besoin, une nécessité pour la commune. Je pense que c'est toujours important d'avoir un commerce sur un village.” Si les journées sont déjà bien remplies, le couple ne compte pas s’arrêter là : “Il y a toujours plein de choses à faire, il y a plein de projets envisageables.” 

Retrouver la convivialité

L’ouverture du restaurant est un projet porté par la municipalité depuis 2018, sous la supervision du maire Clément Rouet (DVG) : "Notre commune de Ladinhac ne disposait plus de commerce. L'idée, c'était de faire en sorte que les gens puissent se retrouver, échanger autour d'un café, d'un verre ou d'un repas. Ce projet était soutenu par l'ensemble des collectivités, l'État et l'Europe, pour que la réhabilitation du bâtiment permette d'ouvrir un café-restaurant multi-services. Historiquement, ça avait été depuis l'après-guerre un établissement de restauration. Il avait fermé il y a une dizaine d'années et était devenu la cantine de l'école. Mais il n'y avait plus ce lieu de convivialité. Le dernier bar a été fermé du fait de l'âge de la propriétaire, qui avait tenu son bar jusqu'à plus de 90 ans. La commune s'était retrouvée orpheline de lieux de convivialité.” 

Répondre aux besoins des habitants

Après des consultations avec les habitants, les travaux ont pu débuter : “ Lors du dernier Congrès des maires, avant la pandémie de COVID 19, j'ai rencontré l'association 1 000 cafés. Ils ont été là notamment pour les démarches de recrutement et maintenant, ils sont là pour l'accompagnement des gérants en début d'activité. En 2020, la pandémie nous a donné du temps pour finaliser tout le montage financier. Le début des travaux, c'est octobre 2021 pour une ouverture qui a eu lieu en juin 2023. Ensemble, avec les habitants qu'on avait consultés lors d'une enquête publique, on a créé ce projet auquel on a intégré leurs besoins. Les besoins principaux c'était le fait qu'il y ait un dépôt de pain et un dépôt de colis.” 

De nouveaux services

Le maire compte bien offrir un maximum de services à ses habitants : “L'idée serait d'étoffer avec un petit rayon épicerie et produits locaux. C'est la volonté des gérants, en accord avec notre commune. L'idée n'est pas de remplacer une supérette, mais de se concentrer sur les circuits courts.” Les services proposés sont pourtant déjà nombreux, indique Clément Ruet : “Il y a, sur la partie café, un élément lié à la convivialité vraiment important : il y a des jeux de société qui sont disponibles en accès libre. C'est un élément qui est apprécié à la fois des enfants mais aussi des adultes qui prennent plaisir à se retrouver en buvant un café. Il y a aussi des soirées à thème, autour soit d'une raclette, soit des jeux de société...” 

La fréquentation au rendez-vous

La recette fonctionne et les clients sont au rendez-vous, pour le plus grand bonheur de l’édile : “La fréquentation est au rendez-vous. La période estivale est une période très propice puisqu'on a aussi beaucoup de résidences secondaires sur notre commune, plus de 25%. Mais en hors-saison, la fréquentation est aussi au rendez-vous, notamment grâce aux soirées, aux repas assurés par les associations pour leurs assemblées générales, les repas de famille également pour les anniversaires, des choses comme ça. Il y a parfois des privatisations de l'établissement pour des manifestations privées, alors il faut penser à réserver à l’avance. Les gens qui fréquentent le commerce gardent ou retrouvent une certaine convivialité, voire même une joie de vivre. Le café permet aussi de parler des problèmes de chacun au quotidien. C'est un lieu où on se retrouve. Récemment, on parlait de l'importance du monde agricole au sein de notre commune. Très clairement, le café a permis d'échanger, de débattre sur le mouvement. C'est important parce que ça permet de confronter des avis. L'idée c'était d'en faire un lieu citoyen, où les gens puissent s'exprimer complètement.” 

Un village plus attractif

Mais les clients ne sont pas les seuls ravis : “Ceux qui ont été très contents, ce sont les enfants qui ont retrouvé le bâtiment qui était leur cantine. Pendant les travaux, ils mangeaient à la salle des fêtes et ils ont retrouvé cet établissement où ils disent avec grand plaisir qu'ils mangent au restaurant”, se félicite Clément Ruet. Le café a augmenté l’attractivité de son territoire : “Ça attire un petit peu de notoriété sur notre commune que j'appelais avant La belle endormie, alors qu'en fait, on avait une vraie vivacité avec le tissu associatif. Donc oui, ça nous amène du monde.” Il espère que l’engouement de l’année dite de la “découverte”, où les clients affluent, se prolongera dans le temps. 

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