A l'occasion de la visite de la ministre Geneviève Fioraso au centre Météo France de Chamonix , focus sur les techniques d'évaluation des avalanches.
Derrière leurs ordinateurs, les prévisionnistes du centre météorologique de Chamonix,en Haute-Savoie, évaluent grâce à des relevés effectués sur le terrain les risques d'avalanches dans le département. Un phénomène complexe, difficile à prévoir, qui chaque année provoque la mort d'une trentaine de personnes en France et menace les habitants des vallées.
Un réseau de surveillance
Au téléphone, installé derrière quatre écrans d'ordinateur, Gilles Brunot, directeur du centre météo de Chamonix prend note des observations des correspondants de Météo France. Des pisteurs secouristes employés dans les stations de ski pour la plupart, qui, deux fois par jour, lui transmettent la hauteur de neige, la température et lui indiquent les coulées de neige survenues dans la journée.
La méthode empirique est complétée par les enregistrements des appareils automatiques installés en haute montagne mesurant 24h/24 la vitesse du vent, le taux d'humidité et la pluviométrie. Autant de paramètres qui sont ensuite "modélisés" par de puissants programmes informatiques simulant l'évolution de l'atmosphère, qui serviront aux six prévisionnistes du centre départemental à estimer sur une échelle de cinq le risque d'avalanches suivant les massifs, l'altitude et les versants de la montagne.
"Il ne s'agit pas d'une science exacte. Nous procédons à une évaluation globale qui peut sensiblement changer d'une pente à l'autre suivant notamment son inclinaison", souligne Gilles Brunot.
En juillet dernier une avalanche à 4.000 mètres d'altitude, sur la voie d'ascension du Mont-Blanc qui surplombe la petite station météo, avait ainsi emporté neuf alpinistes, provoquant l'accident le plus grave dans les Alpes françaises depuis les dix dernières années, malgré l'annonce "d'un risque" par Météo France.
"Nous avions prévenu d'un risque d'avalanche, mais l'été c'est très dur d'être précis car au dessus de 3.000 mètres d'altitude nous avons presque aucune mesure", reconnaît M. Brunot.
Des prévisions ö combien complexes
"Les conditions météo en altitude comme le vent, la température ou la pluie influent plus ou moins fortement", ajoute le directeur pour qui l'expérience et la connaissance du milieu des prévisionnistes est "primordiale" pour ajuster les modélisations informatiques qui restent théoriques.Les plaques à vent, ces amas de neige particulièrement instables et imprévisibles, transportés par les masses d'air constituent la moitié des avalanches, relève le centre d'études de la neige (CEN) de Météo France installé à Saint-Martin-d'Hères en Isère qui analyse la structure des cristaux de neige afin de comprendre ses propriétés mécaniques.
De l'avalanche de Val d'Isère en 1970 à l'avalanche de Montroc en 1999 : l'étude de la neige
"Nous avons une bonne connaissance empirique de la neige, mais nous savons encore peu de choses sur ses particularités physiques car de nombreux paramètres rentrent en compte et évoluent entre le moment où elle tombe au sol et disparaît au printemps", relève Yan Giezendanner, expert météo pour la haute montagne.L'étude de la neige est très récente, rappelle par ailleurs l'expert de Météo France. Les premières recherches ont débuté avec l'avalanche de Val d'Isère dans laquelle périrent, en février 1970, 39 pensionnaires d'un chalet du centre de vacances sportives de l'UCPA.
"L'enjeu des recherches est de taille" et concerne, au-delà des skieurs, les habitants installés au pied des montagnes. "Avec la pression immobilière de plus en plus de chalets sont exposés au risque", observe M. Giezendanner installé à Chamonix, une vallée qui compte pas moins de 350 couloirs d'avalanche.
En février 1999, l'avalanche de Montroc près de Chamonix, avait balayé vingt-trois chalets sur son passage et tué 12 personnes, se souvient-il. Le maire de l'époque avait alors été condamné à trois mois de prison avec sursis pour "homicides et blessures".