Les Suisses, dont la population vieillissante est confrontée à un coût de la vie en hausse, ont voté dimanche en faveur d'un 13ᵉ mois de retraite, un pas "historique" selon ses défenseurs. En revanche, ils ont rejeté le relèvement de l'âge du départ.
La proposition en faveur d'un 13ᵉ mois de retraite a recueilli 58,2% des voix dans le pays, selon des résultats provisoires, mais quasi définitifs, qui montrent également qu'elle a remporté une majorité des suffrages dans plus de la moitié des 26 cantons suisses, condition pour être adoptée.
En revanche, la proposition visant à relever progressivement l'âge de départ à la retraite de 65 à 66 ans semble vouée à l'échec.
Selon les sondages, une majorité d'électeurs étaient favorables à la première initiative, une proposition des syndicats intitulée "Mieux vivre sa retraite" qui prévoit le versement d'un 13ᵉ mois annuel de pension, à l'instar du 13ᵉ mois de salaire de nombreux actifs en Suisse.
Les pensions mensuelles de la Sécurité sociale suisse sont plafonnées à 2.450 francs suisses (2.570 euros) pour une personne seule et à 3.675 francs pour un couple marié, dans un pays régulièrement classé parmi les plus chers du monde.
En ville, le loyer d'un appartement de trois pièces s'élève à au moins 3.000 francs (3.150 euros). Un café coûte plus de cinq francs.
Cette initiative a un précédent en Europe : le Liechtenstein voisin, autre pays cher qui utilise le franc suisse, a mis en place un système similaire il y a plusieurs années.
"Crise du pouvoir d'achat"
"Il y a, comme partout, une crise de pouvoir d'achat en Suisse. Le niveau de vie des retraités s'érode", explique à l'AFP Pierre-Yves Maillard, président de la Fédération syndicale suisse (SGB) qui milite pour le "oui" et dit "espérer" sa victoire.
Jakob Hauri, un retraité cité par la campagne du "oui", est du même avis : "Le coût de la vie monte en flèche", et la caisse de retraite, "censée garantir le minimum vital, ne suit pas".
Les partis de gauche soutiennent l'initiative, mais elle est farouchement combattue par les partis de droite et centristes. Le gouvernement et le Parlement s'y opposent également.
Le gouvernement a affirmé que l'augmentation proposée coûterait plus de quatre milliards de francs suisses par an, avertissant qu'elle nécessiterait des augmentations d'impôts et pourrait menacer la stabilité financière du système de Sécurité sociale.Il a aussi estimé que le changement proposé, pour tous les retraités quelle que soit leur situation financière, n'apporterait qu'un bénéfice social limité.
"Si l'initiative est adoptée, de nombreux retraités recevront un 13ᵉ versement de Sécurité sociale même s'ils n'en ont pas vraiment besoin", avancent les autorités fédérales.
L'UDC, la droite radicale et premier parti du pays, prévient que cette initiative "irresponsable" permettra aux pique-assiette d'épuiser le système. Ce parti a fait campagne pour le non à l'aide de publicités, dont une montrant des billets de 100 francs aspirés dans une bouche d'égout.
Des arguments qui semblent avoir porté : dans le dernier sondage réalisé par gfs.bern pour la chaîne publique SSR, 53% des personnes interrogées ont déclaré soutenir l'initiative, tandis que 43% s'y sont opposés, alors qu'un mois plus tôt 61% des sondés y étaient favorables.
Pour être validée, l'initiative devra non seulement remporter le vote populaire, mais aussi une majorité dans au moins la moitié des 26 cantons de la Suisse.
Vote anticipé
Les électeurs se prononcent également sur une proposition de la branche jeunesse du Parti libéral visant à relever progressivement l'âge de la retraite de 65 à 66 ans au cours de la prochaine décennie, afin d'assurer la pérennité du financement du système de retraite.
Mais l'initiative semble avoir fait long feu : les derniers sondages indiquent que seulement 35 % des personnes interrogées sont favorables à une telle mesure, tandis que 63 % s'y opposent.
Ce vote intervient moins de deux ans après que les électeurs suisses ont décidé, de justesse, de relever l'âge de la retraite des femmes de 64 à 65 ans, comme pour les hommes.