Dans l'ombre de Jeannie Longo, depuis le début de sa carrière : Patrice Ciprelli, son entraîneur et mari.
L'homme a été placé mercredi 8 février en garde à vue et soupçonné d'achat de produits interdits à une époque récente. "Si j'ai gagné, c'est avec lui, grâce à lui. Un triomphe à deux!", estime la plus grande championne de l'histoire du cyclisme.
Sur les photos de ces succès, on voit - mais au second plan - Patrice Ciprelli, la silhouette légèrement voûtée, le crâne précocement dégarni, un sourire esquissé.
La rencontre entre la championne et son futur mari date de la fin des années 1970. Tous deux sont sociétaires du club universitaire de ski de Grenoble (GUC). Jeannie n'est encore qu'un espoir du ski alors que Patrice pratique au plus haut niveau. Il lui sert de conseiller, d'entraîneur, et va poursuivre dans ce rôle lorsqu'elle se consacrera à temps plein au cyclisme dès 1979.
Perfectionniste, "très exigeant, très dur" selon les mots de sa femme qui le compare à un entraîneur de l'Est, Ciprelli façonne une sportive d'exception dont les plus grands succès ne sont pas remis en cause par les rebondissements de l'enquête en cours.
"Avec Patrice, on s'est entendu parce qu'on avait le souci de la perfection", résume son épouse. Le couple officialise sa relation auprès de l'état-civil une veille de Noël, le 24 décembre 1985. Quelques semaines après le premier des treize titres mondiaux de Super-Jeannie.
Trahison
Plus tard, au fil des aléas de la vie, la championne reviendra avec pudeur sur sa vie de couple dans son livre "Jeannie par Longo": "Je pensais que le contrat de mariage était un engagement à vie, je ne savais pas que c'était un contrat à durée déterminée."
Mais, au-delà des difficultés privées et des blessures, le duo a tenu. Il a fonctionné pour sa réussite sportive. En marge du système, bien que Patrice Ciprelli soit un cadre sportif fonctionnaire d'Etat. En opposition le plus souvent aux responsables en place, qui le voyaient comme un intrus, à côté des entraîneurs officiels, lors des grandes compétitions.
Durant toutes ces années, la championne soutint toujours son mari qu'elle rudoyait pourtant publiquement à l'occasion, dans le stress des arrivées de course.
C'est lui qui sut la convaincre de poursuivre sa carrière après le cap de la quarantaine (1998). C'est lui aussi qui la mena jusqu'à la quatrième place des JO de Pékin (2008, contre-la-montre) alors même qu'elle avait ressenti comme une trahison qu'il s'occupe de l'entraînement de sa rivale nationale Edwige Pitel.
Pour la première fois, Ciprelli, qui enfourche encore son vélo occasionnellement, est maintenant sur le devant de la scène. Nul ne l'a mis en cause publiquement, pour son comportement sportif ou extra-sportif, avant la révélation en septembre d'une sombre affaire d'achats de produits interdits (EPO) sur internet.
En réaction, il a clamé son innocence et obtenu en référé de ne plus être suspendu à titre conservatoire par la fédération française de cyclisme. Jusqu'à son interpellation, mercredi matin, à son domicile de Saint-Martin-le-Vinoux (Isère), qui pose un nouveau point d'interrogation sur cet homme de l'ombre âgé de 57 ans.