Les aveux de P. Ciprelli, qui a reconnu avoir acheté de l'EPO, mais pour son usage personnel, laissent de côté J. Longo.
Patrice Ciprelli est pourtant le mari et l'entraîneur de la championne cycliste grenobloise. Depuis ses aveux, l'opinion publique se divise : il y a ceux pour qui Jeannie n'a sûrement jamais fait rimer son amour du bio avec EPO, et il y a les sceptiques, persuadés de tenir enfin l'explication d'une carrière un peu trop exceptionnelle.
Qui croire ?
"La question centrale est de savoir à qui cette EPO était destinée", interrogeait mercredi 8 février le président de la Fédération française de cyclisme (FFC), David Lappartient, en n'excluant pas l'hypothèse que Patrice Ciprelli aurait acheté l'EPO pour sa femme.
"Aucun élément dans le dossier ne permet d'affirmer que cet EPO aurait été utilisé par l'épouse de M. Ciprelli", a répondu le procureur de la République de Grenoble, Jean-Yves Coquillat.
Dans ses aveux proférés lors de sa deuxième journée de garde à vue, l'entraîneur de Jeannie Longo a endossé l'entière responsabilité de la faute, a souligné son avocat, Me Pierre Albert. C'est pour sa consommation personnelle qu'il a procédé à la transaction, en cachette de son épouse, a-t-il affirmé. Si cet aveu ne convainc pas les sceptiques, libre à eux de croire le contraire.
Qu'en pensent les spécialistes ?
La défense de Patrice Ciprelli, qui assure avoir pris de l'EPO comme "reconstituant musculaire", est jugée "peu crédible" par le conseiller scientifique de l'Agence française de lutte contre le dopage (AFLD), Michel Rieu.
"L'EPO n'a aucun effet de cicatrisation documenté. Et il y a des produits beaucoup plus évidents quand on veut reconstituer des muscles, à commencer par les anabolisants", précise-t-il.
Quelle est désormais la marche à suivre ?
Patrice Ciprelli, mis en examen, a été libéré et placé sous contrôle judiciaire. L'affaire va maintenant suivre son cours pénalement. La FFC devrait se porter partie civile, comme elle a l'habitude de le faire dans les affaires de dopage. Elle aura alors accès au dossier mais ne pourra pas forcément en utiliser les pièces pour agir sur le plan disciplinaire contre l'un de ses licenciés. Sauf s'il réitérait ses aveux devant la commission compétente de la fédération.
La FFC pourrait aussi remonter sur les faits datant de 2007 (première transaction d'achat d'EPO). S'ils sont prescrits pénalement, ils ne le sont pas dans le cadre interne de la fédération (six mois après leur révélation). Une sanction -mais à quelle date ?- semble donc inévitable à l'encontre de Patrice Ciprelli.
Jeannie Longo risque-t-elle quelque chose ?
En conférence de presse, le procureur de Grenoble n'a pas mis en cause la plus grande championne de l'histoire de cyclisme. Dès lors, elle n'encourt pas de sanction, ni pénale ni sportive, du fait de son mari et entraîneur.
Au-delà, l'affaire ne peut qu'assombrir toutefois la fin de carrière de la Grenobloise (53 ans). Sa participation aux JO de Londres est brusquement devenue hypothétique, tant les obstacles s'accumulent désormais sur sa route.
Sans même évoquer le niveau sportif à conserver malgré autant de contrariétés, voire de traumatismes, elle devrait se retrouver -si elle décidait de poursuivre sa carrière internationale- privée de l'homme qui l'a guidée depuis ses débuts (1979).
Cette hyper-sensible, qui n'hésitait pas à avouer ses faiblesses dans un livre ("Je suis suicidaire, je dis toujours que je n'ai pas eu assez de courage"), faisait part voici deux ans de ses interrogations récurrentes à la sortie de l'hiver : "Vais-je reprendre l'entraînement ou vais-je me laisser aller et tout perdre car, à mon âge, c'est très rapide ? C'est stressant. C'est une petite mort... comme quelqu'un qui part à la retraite du jour au lendemain."