Alzheimer :Un octogénaire condamné à 5 ans avec sursis pour le meurtre de sa femme

Hubert Ougier, 81 ans, a été condamné ce vendredi 3 novembre à 5 ans de prison avec sursis pour avoir étouffé, en 2015, sa femme atteinte de la maladie d'Alzheimer, au terme d'un délibéré de moins de deux heures des jurés des assises de l'Isère.

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 Ce verdict est conforme aux réquisitions du substitut général, Paul Rabesandratana, qui avait estimé que la maladie d'Alzheimer "ne donnait pas une autorisation de tuer". Il avait cependant retenu l'altération du discernement de l'accusé.

L'avocate de la défense, Me Solen Morvan, s'est dite "déçue" car elle espérait l'acquittement pour son client, âgé de 81 ans, pour lequel elle avait plaidé le "coup de folie" et demandé la bienveillance des jurés.

A l'inverse, Me Flore Abadie O'Loughlin, avocate du fils unique du couple qui s'était porté partie civile, a fait part de sa "satisfaction", le meurtre ayant été reconnu comme le souhaitait son client, mais elle a toutefois qualifié le verdict de "sévère".


L'avocat général, Paul  Rabesandratana, au cours d'un réquisitoire de plus d'une heure au second jour du procès, a à plusieurs reprises, affirmé qu'il n'était absolument pas question ici de "suicide altruiste" parce que "a priori, on se suicide soi-même". "Certains veulent peut-être défendre une cause, mais ce n'est pas la réalité de ce dossier", a insisté le magistrat.

L'avocat général a par ailleurs exclu l'abolition du discernement de l'accusé, et a retenu la seule altération au moment des faits.

Outre la peine de prison avec sursis, il a aussi requis un suivi socio-judiciaire pendant cinq ans, dont une injonction de soins, et une interdiction de port d'arme.

L'accusé, âgé de 81 ans, avait étouffé son épouse à l'aide d'un traversin, au matin du 29 octobre 2015, "épuisé" de cette vie au côté d'une compagne malade et dont l'état se dégradait. Il avait été retrouvé dans la baignoire de leur modeste logement, à Fontaine (Isère), des entailles aux poignets et à la gorge.

Plus tôt lors de cette seconde journée d'audience, le fils unique de l'accusé et de la victime, partie civile au procès, avait témoigné. "Je n'ai rien vu venir. Le jour des faits, ça a été un effondrement pour moi. C'est à ce moment-là que j'ai vraiment compris la détresse dans laquelle était mon père".

"J'avais peu d'accroche sur mes parents, je n'avais pas une parole qui porte trop pour eux". Malgré tout, ce fils les appelait régulièrement, se rendait environ deux fois par semaine à leur domicile, notamment le lundi pour passer du temps avec sa mère et pour permettre à son père d'aller marcher au sein d'un club de randonnée.

"Je pense que mon père est allé à la limite de ce qu'il pouvait faire. Il lui faisait tout, elle ne faisait rien".

 'Le visage de la maladie' 

Toutes les semaines, l'homme d'un naturel déjà anxieux emmenait sa femme pour la journée à l'Ehpad, un établissement pour personnes dépendantes. "Il me disait "Il faut être à l'Ehpad à 9h, je n'y arrive pas, ça me  perturbe. C'était son gros soucis de la semaine".

Le fils envisageait alors de placer sa mère à l'année, même s'il savait qu'il rencontrerait des réticences de la part de ses parents. "Sur les derniers mois, je ne savais pas que mon père faisait la toilette de ma mère. Je pense qu'il voulait rester avec sa femme et tant qu'il y arrivait, ça lui convenait", malgré les difficultés.

"C'était un couple heureux, uni. Ce qui a dégradé les choses, c'est la santé de ma mère. Elle avait vraiment le visage de la maladie".

Du côté de la partie civile, Me Flore Abadie O'Loughlin a souligné la volonté pour le fils du couple "que justice soit faite pour sa mère" tout en souhaitant "une sanction purement symbolique".

Pour la défense, Me Solen Morvan a parlé d'un "coup de folie". Elle a enjoint les jurés de faire preuve de  bienveillance à l'égard de son client âgé de 81 ans.

"C'est à la façon dont on traite un vieillard que l'on juge la qualité d'une société", a-t-elle conclu.

Face à la cour et aux jurés, avant qu'ils se retirent pour délibérer, l'octogénaire, tremblant et en larmes, a voulu le rappeler, une fois de plus : "J'étais malheureux de la disparition de ma femme et de ne pas être parti avec elle". Il voulait être enterré avec elle, lors de funérailles communes.

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