Du sursis requis contre Damien Saboundjian, policier de Grenoble (Isère)

Pour le parquet, le policier a agi "par panique", non en "état de légitime défense": cinq ans de prison avec sursis ont été requis vendredi contre Damien Saboundjian, le policier grenoblois jugé en appel pour avoir tué un fugitif d'une balle dans le dos.

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En première instance, à Bobigny, Damien Saboundjian, gardien de la paix de 37 ans avait été acquitté au bénéfice du doute. Mais le parquet général a fait appel, ce qui lui vaut d'être rejugé cette semaine devant la cour d'assises de Paris pour des "violences ayant entraîné la mort sans intention de la donner".

Il encourt 20 ans de réclusion pour avoir tué en avril 2012 Amine Bentounsi, 28 ans, lors d'une course-poursuite dans les rues de Noisy-le-Sec (Seine-Saint-Denis). Le braqueur était recherché pour s'être fait la belle à la faveur d'une permission deux ans plus tôt.

Damien Saboundjian a toujours affirmé qu'il avait tiré parce que le détenu en cavale l'avait mis en joue. Et pour expliquer que la balle se soit logée dans le dos du fugitif, il avait supposé que ce dernier s'était retourné au moment de l'impact.


"agi par panique et non en riposte"

"Damien Saboundjian affirme qu'il a effectué un tir de riposte de face. Mais l'expertise balistique ne permet pas de le déterminer et cette version n'est corroborée par aucun témoin, à part les déclarations, que l'on sait fluctuantes, de son collègue", a déclaré l'avocat général, Rémi Crosson du Cormier.

L'accusé lui-même, lors de ses premières auditions en garde à vue, "n'a jamais évoqué la rotation de la victime avant d'apprendre qu'Amine Bentounsi avait été touché d'une balle dans le dos".

Le policier a donc "agi par panique et non en riposte", a conclu le magistrat, qui a également requis cinq ans de privation de port d'arme (le maximum légal) à son encontre.


"flicophobie" primaire soutenue par des charlatans sans scrupule"

"L'avocat général dit: "On le sait, il a agi en panique", mais non, on ne sait rien", s'est insurgé Me Daniel Merchat, appelant à ne pas ajouter "une injustice à un drame".

"Ma robe est lourde à cause de la dichotomie simpliste" entre les "bons et les méchants, le bien et le mal, le vrai et le faux, des âmes en peine et des coeurs secs", a lancé l'avocat de la défense. "Ma robe est lourde de la "flicophobie" primaire soutenue par des charlatans sans scrupule", a-t-il poursuivi.

Une allusion à "l'affaire Théo", qui s'est inscrite en arrière-plan de cette semaine d'audience: le viol présumé de ce jeune homme avec une matraque lors d'une interpellation, début février en Seine-Saint-Denis, a relancé le débat sur le comportement de la police en banlieue.

"Amine Bentounsi n'était pas un ange mais ne méritait pas d'être abattu comme un chien"

Dans la matinée, Michel Konitz, qui représente la famille d'Amine Bentounsi, avait lui aussi fait allusion au contexte d'un procès qui s'est tenu quelques jours après la promulgation d'une loi assouplissant les conditions de la légitime défense.

"Dans cette salle, il y a deux clans, ceux qui voudraient la présomption de légitime défense, c'est-à-dire le droit de tuer. Vous voulez, ça? Et il y a ceux qui veulent condamner cet homme car il y a trop de violences policières. Mais ce n'est pas ça, la justice!" a tonné le défenseur, estimant que seule "la vérité" pouvait permettre de réconcilier ces deux visions et restaurer le "vivre ensemble."

A ses côtés, Me Louise Tort avait souligné qu'"Amine Bentounsi n'était pas un ange mais ne méritait pas d'être abattu comme un chien".

"M. Bentounsi était un délinquant certes, un récidiviste certes, mais il n'encourait pas la peine de mort, évidemment pas dans cette juridiction, mais pas non plus dans une rue de Noisy-le-Sec", lui a répondu comme en écho l'avocat général.

Le verdict est attendu en fin de journée.
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