Grenoble : Christophe Ferrari visé par une enquête pour des soupçons d'utilisation irrégulière de sa voiture de service

Le parquet de Grenoble a ordonné l'ouverture d'une enquête préliminaire pour "détournement de bien par personne dépositaire ou chargée d'une mission de service public". Les investigations concernent des présomptions d'irrégularités commises par le président de la Métro, Christophe Ferrari.

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Voiture de service utilisée sur des périodes de congés, déjeuners personnels à la charge de la collectivité… Le dossier transmis à la justice par un ancien proche du président de Grenoble-Alpes Métropole regroupe une longue liste de documents. Relevés de télépéage, procès-verbaux, échanges de mails, tous pointant des possibles irrégularités commises par Christophe Ferrari (divers gauche).

A commencer par sa voiture de service avec chauffeur qu'il aurait utilisée à des fins personnelles, en dehors de ses fonctions de président de l'exécutif métropolitain. "J'ai retracé, jour par jour, les déplacements du président grâce aux relevés de télépéage que je confrontais à son agenda. C'est là que j'ai eu connaissance de trajets effectués pendant ses vacances alors qu'il n'avait rien à faire avec son véhicule de service", retrace Pascal Harder, l'ancien chef de cabinet de Christophe Ferrari.

Pendant plusieurs mois, il a regroupé des éléments démontrant les pratiques jugées abusives du président de la métropole grenobloise. Un dossier - dont les premiers éléments remontent à 2014 - qu'il a transmis à la justice le 16 septembre.

Le parquet de Grenoble a indiqué à France 3 Alpes, mercredi 5 octobre, avoir ouvert une enquête préliminaire pour "détournement de bien par personne dépositaire ou chargée d'une mission de service public", confirmant une information du journal Le Postillon.

Heures supplémentaires du chauffeur, frais de péage et amendes qui interrogent

Les investigations menées par le service de police judiciaire de Grenoble concernent, au premier chef, une utilisation présumée personnelle du véhicule de service de Christophe Ferrari. En attestent les relevés d'heures supplémentaires du chauffeur du président de la Métro. Parfois 42 heures, 59, et même jusqu'à 85 heures supplémentaires en un mois.

"Ces relevés interrogent, estime Pascal Harder. Il y avait régulièrement des horaires qui n'étaient pas explicables." Des horaires de nuit, notamment, qui dépassent "presque systématiquement" le seuil légal de 25 heures supplémentaires mensuelles. Par conséquent, le chauffeur perçoit une rémunération "sensiblement plus élevée" que tout autre agent de la métropole, selon l'ancien chef de cabinet.

Outre ces dépassements supposés en semaine, Christophe Ferrari aurait utilisé son véhicule de service à de nombreuses reprises lors de week-ends ou sur des périodes de congés. Sa voiture n'étant pas géolocalisée - contrairement aux autres voitures de service de la métropole -, le dossier s'appuie sur des relevés de télépéage et des factures de carburant.

Le total des frais de péage concernant les trajets personnels du président de la métropole s'élèverait à plus de 2 400 euros, selon les calculs de Pascal Harder. "Grâce à mon expertise, je peux distinguer les trajets personnels du président de ceux effectués dans le cadre de son mandat", affirme l'ex-chef de cabinet, anciennement en charge de l'agenda du président.

J'ai conscience que le mésusage des voitures de service est fréquent, mais ce n'est pas normal pour autant.

Pascal Harder, ancien chef de cabinet de Christophe Ferrari

à France 3 Alpes

Ces mêmes relevés mettent en évidence des trajets à Toulouse, en Dordogne ou à Montpellier, bien en dehors du périmètre métropolitain. Des amendes sont même parvenues au siège de la métropole pour des infractions commises en Italie avec le véhicule du président.

Une première, en date de septembre 2017, s'élève à 102 euros pour un "accès en zone piétonne". La seconde, une contravention de 450 euros remontant à janvier 2019, sanctionne une "non désignation du conducteur". Des amendes que Christophe Ferrari aurait réglées lui-même.

C'est également "alors que le président était en congés", en avril 2021, qu'il aurait eu un accident avec sa voiture de service. La facture s'élève à 2 577 euros, réglés par l'assurance de la Métro, avec 600 euros de franchise à la charge de la collectivité.

"J'ai conscience que le mésusage des voitures de service est fréquent, mais ce n'est pas normal pour autant", reconnaît Pascal Harder qui s'appuie sur d'autres éléments. L'ancien chef de cabinet a listé, depuis fin 2020, des notes de restaurant remboursées par la métropole à Christophe Ferrari alors que ces déjeuners et dîners seraient "sans lien avec les intérêts de la collectivité". La note totale s'élève à 2 284 euros.

Christophe Ferrari déjà entendu pour des soupçons d'irrégularités

Ce signalement à l'encontre de Christophe Ferrari n'est pas le premier en date. Yann Mongaburu, proche du maire écologiste de Grenoble Eric Piolle et grand rival de Christophe Ferrari pour la présidence de la métropole lors des dernières élections, avait déposé un signalement similaire en décembre 2021.

Celui-ci concernait l'année 2018, déjà pour une utilisation irrégulière de la voiture de service du président. Le parquet de Grenoble n'avait alors pas engagé de poursuites pénales faute d'éléments suffisants. "Il s’agissait d’un fait unique dénoncé sans justificatif dans un contexte de fortes tensions politiques", justifie le procureur de Grenoble, Eric Vaillant, qui avait alors entendu les deux intéressés.

Mais c'est alors que Pascal Harder préparait l'audition de Christophe Ferrari dans le cadre de cette enquête, en début d'année, qu'il a découvert les premiers éléments "troublants" sur l'utilisation de sa voiture de service. Des éléments qui agglomérera au fil du temps jusqu'à les transmettre lui-même au parquet quelques mois plus tard.

"Pourquoi cet argent, le salaire du chauffeur, l'entretien du véhicule, est-il investi à des fins personnelles ? Il aurait mérité d'être investi ailleurs", juge l'ancien chef de cabinet qui affirme n'avoir "aucune affiliation politique".

Le "détournement de bien par personne dépositaire ou chargée d'une mission de service public" est puni de dix ans d'emprisonnement et d'une amende d'un million d'euros. Selon nos informations, plusieurs élus du groupe d'Eric Piolle à la métropole (Une métropole d'avance) pourraient demander la démission du président dans les prochains jours. Contacté par France 3 Alpes, le cabinet de Christophe Ferrari a indiqué qu'un communiqué de presse serait transmis "prochainement".

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