Iséroise emprisonnée au Sénégal : "On est dans le flou total", un rassemblement organisé à Grenoble pour demander la libération de Coline Fay

Un rassemblement s'est déroulé ce samedi à Grenoble pour demander la libération de Coline Fay, jeune Française de 26 ans emprisonnée au Sénégal depuis près de deux mois. Sa famille affirme n'avoir aucun lien avec les autorités françaises sur d'éventuelles négociations pour sa remise en liberté.

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Sa famille ne désarme pas après 57 jours de combat. Depuis le 17 novembre, l'Iséroise Coline Fay est emprisonnée au Sénégal après avoir participé à une manifestation en faveur d'Ousmane Sonko, principal opposant à l'actuel président Macky Sall.

La jeune femme de 26 ans est poursuivie pour "association de malfaiteurs en lien avec une entreprise terroriste", "complot contre l'autorité de l'Etat", "acte ou manœuvre de nature à compromettre la sécurité publique" et risque la prison à perpétuité. Un troisième rassemblement regroupant près de 150 personnes s'est tenu ce samedi 13 janvier à la mi-journée à Grenoble pour demander sa libération.

"On ne sait pas comment elle va"

"La peine qu'elle risque est totalement démesurée, injuste, inacceptable pour avoir participé à une manifestation pacifique. C'est contraire au droit de manifester, à la liberté d'opinion", dénonce Jean-Yves Fay, le père de Coline, habitant de Claix (Isère).

"Savoir qu'elle est enfermée, c'est dur. C'est pesant. Tous les jours, on pense au fait qu'elle est privée de liberté, que c'est injuste. On ne comprend pas", ajoute son frère, Antonin Fay, souhaitant que ces rassemblements alertent les autorités "pour qu'elles agissent en faveur de sa libération".

"Ce qui nous inquiète, c'est qu'on est dans le flou total, ajoute le père de Coline. On n'a aucun retour de (l'Etat français). Est-ce qu'ils font quelque chose ? La presse sénégalaise dit qu'il y a des négociations mais on n'est pas au courant. On sait seulement que le consulat va la voir de temps en temps et nous dit qu'elle va bien."

La famille de la jeune femme affirme ne plus être en lien direct avec elle depuis le 27 décembre. "On ne l'a plus au téléphone, ce qui nous rend très inquiets. On ne sait pas comment elle va, si elle tient le choc, si elle garde le moral", regrette Jean-Yves Fay.

Des prises de parole de ses proches se sont succédé au cours du rassemblement devant une large banderole "Free Coline" (libérez Coline), au son d'un orchestre dont elle a fait partie. Dans la foule, des amis de Coline Fay et des anonymes, tous étonnés des conditions de son arrestation.

"Je suis surprise qu'une ressortissante française, présente à un rassemblement pacifique dans un pays étranger, se retrouve en prison. La France communique très peu sur le sujet et laisse les parents dans une grande inquiétude. On est aussi là pour les soutenir", assure Isabelle Moffelin, une manifestante dont la fille est allée à l'école avec Coline Fay.

Nouveau chef d'accusation

Sa famille est d'autant plus inquiète que la jeune femme fait l'objet de nouvelles poursuites pour "tentative de sortie irrégulière de correspondance" après qu'elle aurait tenté de faire passer un courrier à son frère.

"Les droits de visite de Coline Fay viennent d'être suspendus, sans justification. Toutes les communications vers l'extérieur sont désormais coupées. Nous sommes, c'est un euphémisme, très inquiets", écrit son avocat - qui est aussi celui d'Ousmane Sonko, actuellement emprisonné - Juan Branco sur X (anciennement Twitter).

Selon ses avocats, Coline Fay est incarcérée à la maison d'arrêt pour femmes de Liberté 6 au Sénégal où elle a effectué une grève de la faim pendant 12 jours. Elle s'était engagée avec Extinction Rebellion lors de ses études en Espagne avant d'aller travailler au Sénégal en tant que kinésithérapeute dans un centre pour femmes enceintes.

Cela fera deux mois ce mercredi que l'Iséroise est derrière les barreaux. "Si on n'a pas de nouvelles, ça va être compliqué, on va s'interroger sur la suite à donner au mouvement. On envisage d'aller à Paris, à Dakar. On n'a rien établi mais on n'exclut rien non plus. On est déterminés, on ne peut pas la laisser là-bas sans faire tout ce qu'on peut à notre niveau", témoigne sa mère, Véronique Murat.

Le directeur d'Amnesty International Sénégal, Seydi Gassama, a lui aussi demandé que la Française soit "libérée et autorisée à rentrer dans son pays". "Participer à un rassemblement pacifique, même non déclaré, ne peut être puni d'une peine privative de liberté. Toutes les autres charges retenues contre elle doivent être abandonnées", estime-t-il sur X.

Contexte de "tension politique"

A Dakar, les autorités n'ont pas donné suite aux sollicitations de l'AFP sur les conditions de son arrestation et ce qui lui est reproché. Une lettre a été adressée le 14 décembre à l'ex-ministre des Affaires étrangères Catherine Colonna par deux députés, l'écologiste Aurélien Taché et l'Insoumise Sophia Chikirou, et l'avocat de la jeune femme.

Ces derniers affirment que son arrestation "s'inscrit dans un climat de tension politique au Sénégal" et "de dérives autoritaires exercée par le régime de Dakar, sous la présidence de Macky Sall, envers les voix dissidentes et les mouvements populaires, notamment ceux associés à l'opposition politique menée par Ousmane Sonko".

Déclaré coupable en juin de débauche de mineure et condamné à deux ans de prison ferme, M. Sonko a été écroué fin juillet sous d'autres chefs d'inculpation, dont appel à l'insurrection et association de malfaiteurs en lien avec une entreprise terroriste. Il dénonce dans toutes ces affaires un complot pour l'empêcher de participer à la présidentielle de février 2024, ce que le pouvoir dément.

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