La Ville de Grenoble a décidé de vendre toutes les parts qu'elle détient dans le bailleur social Grenoble Habitat. Pour les oppositions, cette décision est simplement destinée à combler les trous dans le budget municipal. Les socialistes ont déposé un recours en justice pour faire annuler la vente.
La délibération avait été votée au cours d'un conseil municipal sous haute tension. La vente du bailleur social Grenoble Habitat, dont la Ville est actionnaire majoritaire, avait provoqué l'ire des oppositions parlant de "honte" ou encore de "déni de démocratie".
La délibération figurait à l'ordre du jour le 13 mars dans le cadre du vote du budget primitif 2023. "Notre conseil municipal ne saurait devenir la simple chambre d'enregistrement a posteriori de choix opérés sans contrôle par l'exécutif", avait déclaré la leader de l'opposition socialiste Cécile Cenatiempo, s'adressant au maire écologiste Eric Piolle.
Grenoble Habitat et ses 4 500 logements, hébergeant quelque 10 000 locataires, devraient être vendus pour 37 millions d'euros à une filiale de la Caisse des dépôts et consignations (CDC). Une décision budgétaire dénoncée par les élus socialistes qui ont déposé un recours auprès du tribunal administratif de Grenoble pour faire annuler la vente.
Une vente opaque
"On a, d'un côté, des mesures drastiques sur l'augmentation de la taxe foncière [de 25 %, NDLR] pour alimenter les recettes de fonctionnement et on vient combler les trous avec la vente de Grenoble Habitat qui représente la moitié des recettes d'investissements pour cette année de mandat", estime Hassen Bouzeghoub, conseiller municipal (apparenté PS) d'opposition.
La municipalité a fait valoir que les sommes ainsi levées, estimées à 44 millions d'euros, serviront pour moitié à "faire face à l'inflation, au coût de l'énergie, ou encore à la hausse du point d'indice des agents". Et l'autre moitié sera versée dans un plan d'investissement dédié aux transitions, au renforcement du service public et à la mise en place d'un "bouclier social et climatique". Au-delà des pistes d'investissements, les élus socialistes regrettent la méthode.
"Tout foutre en l'air pour une structure parisienne qui n'est pas du tout publique, contrairement à ce qu'on veut nous faire avaler dans les conseils municipaux, je trouve que c'est vraiment dramatique. Il y a une vraie perte de sens de l'action politique en matière de logement social", regrette Romain Gentil, conseiller municipal (apparenté PS) d'opposition.
Des choses sont possibles et il faut qu'on se remette collectivement autour de la table pour trouver une solution.
Cécile Cenatiempo, conseillère municipale (PS) d'oppositionà France 3 Alpes
Surtout, cette vente a été votée en toute opacité, les élus n'ayant pu accéder aux documents sans signer une clause de confidentialité. En cause, d'autres clauses censées rester secrètes. Trois élus municipaux, dont Cécile Cenatiempo, avaient fait valoir leur droit à l'information et ont pu consulter des documents relatifs aux délibérations sous le contrôle d'une agente de la Ville. Des documents qui ont confirmé leurs inquiétudes sur la pertinence de cette vente.
"Il y a une vision politique à revoir. Il y a des choix budgétaires à faire. Si on choisissait la recapitalisation, la perte ne serait pas de 37 millions d'euros comme on nous l'explique à la Ville de Grenoble. Des choses sont possibles et il faut qu'on se remette collectivement autour de la table pour trouver une solution", propose Cécile Cenatiempo, conseillère municipale (PS) d'opposition.
L'enjeu est d'éviter un trou de 37 millions dans le budget municipal. Un trou qui, selon les clauses secrètes, devra de toute façon être comblé si la Métropole de Grenoble et la Ville de la Tronche ne signent pas la vente. Or, toutes deux sont historiquement opposées à l'idée. La mairie de Grenoble, elle, n'a pas souhaité faire de commentaire.