Avec Enfance ? un solo très engagé, le jeune artiste chorégraphique grenoblois Hugo Rigny explore, par le mouvement, son passage à l’âge adulte.
Dans la pénombre de la salle Noire, une longue silhouette se livre à un corps à corps avec une table. L’objet semble d’abord encombrant puis peu à peu s’allège. Délesté de ce poids, l’homme s’en libère comme d’un fardeau. Enfin, c’est ce qu’on peut imaginer… L’interprétation, et c’est tout l’intérêt de l’intention d’Hugo Rigny, est libre. Lui, façonne son monde imaginaire avec le mouvement. Un mouvement qui symbolise les transformations de sa vie.
Petit Prince dans un corps devenu adulte, le danseur, grandi à Grenoble, nous plonge dans ses introspections et tourne la page d’une jeunesse passée à explorer les arts : la danse hip hop découverte à 8 ans et qu’il pratique jusqu’à l’adolescence, les arts plastiques, la philosophie, la poésie, enfin l’écriture. La danse contemporaine, Hugo Rigny va s’y plonger au gré de ses rencontres avec des chorégraphes comme Germana Civera ou Saief Remmide. Des influences qui l’amènent, à tout juste 22 ans, à se frayer son propre chemin d’artiste chorégraphique et à créer sa compagnie, Heart of Gold, à Montpellier, où il s’est installé.
Retour sur scène. Hugo dessine une diagonale. Devant lui, une boîte. Que contient-elle ? Les souvenirs de son enfance ? Ce point d’interrogation, on le retrouve donc dans le titre de ce premier solo Enfance ? , rite de passage à l’âge adulte où l’artiste cherche à catalyser la fougue de sa jeunesse et tente de se transformer par le jeu : « Jeu après jeu, l’enfant devient Je ».
Une fascination pour l'enfance
"Tout est parti d’un questionnement que j’avais vers mes 22 ans, à un moment où je devenais adulte. Je me rendais compte que la plupart des adultes qui m’entouraient avaient une fascination pour l’enfance. 'Je suis en adéquation avec l’enfant qui est en moi, je suis toujours un grand enfant…' ces phrases me perturbaient, elles m’empêchaient de devenir adulte. D’où cette question Enfance ? posée pour m’aider à devenir adulte. Au long de ces 40 minutes de spectacle, je me métamorphose dans ma gestuelle. C’est aussi ce que j’ai tendance à faire depuis que je suis petit, et le rapport à mon corps évolue chaque année. »
Pour ce seul en scène écrit juste avant la pandémie, Hugo Rigny s’est entouré de proches. Son père, Arno, a créé la musique, Héléna Castelli, amie complice des années lycée, la scénographie et les lumières. Si le covid a éloigné Hugo des plateaux, il a surtout changé son état d’esprit.
« Je n’ai pas envie de retourner comme avant, de simplement rentrer dans les théâtres. Avec le covid, je me suis rendu compte que ce qui est le plus important c’est de danser avec les gens, de se rassembler. C’est ce contact humain que j’ai envie de mettre en avant avec mes projets futurs. »
Une réflexion naturelle, pour un artiste qui a longtemps partagé son art de la danse urbaine sur le pavé et qui multiplie aujourd’hui les ateliers auprès du jeune public. Décidemment, Hugo Rigny n’a pas fini de réveiller l’enfant qui sommeille en lui… Pressé de retrouver le public, il a déjà écrit une deuxième pièce, pour trois danseurs cette fois, Dolmen.