Une résidence senior d'Échirolles, en Isère, accueille jusqu'au 31 juillet l'exposition photos "En corps, en vie" représentant des personnes âgées. La série de clichés offre un nouveau regard sur le rapport au corps vieillissant.
Indéniable fatalité, nos corps vieillissent, sont les témoins de notre histoire. Des marques laissées par le temps que la société s’évertue à rendre invisibles. À la résidence senior Les Girandières, hors des cadres habituels, l’exposition de la photographe canadienne Ariane Clément brise les codes, redéfinit les normes de beauté.
Les corps de personnes âgées s'affichent en noir et blanc sur les murs de la résidence à Échirolles (Isère), près de Grenoble. Des visages marqués par le temps, un dos fluet, des cheveux blancs, un couple s'embrassant, des corps nus ou encore des mains dessinées par l'âge.
"Je ne vois pas des défauts. Je vois quelque chose que je trouve magnifique. Ce sont des mains qui ont travaillé, qui ont aidé, qui ont cultivé la terre, qui ont nourri des familles, qui ont fait la guerre, qui ont fait avancer le monde", décrit Yvonne, une résidente des Girandières.
"Une fatalité que l'on doit gérer"
"Ça me réconcilie avec mon corps et je finis par me trouver bien dans ma peau", sourit-elle. Si certaines voient ces photographies comme une résilience, d'autres garde en tête une autre réalité. Un corps âgé est un corps vulnérable.
"C'est une fatalité que l'on doit gérer, mais ce n'est pas toujours possible pour différentes raisons. (...) Nous n'avons pas tous le même capital santé, c'est indéniable, et cela crée des déséquilibres dans le grand âge. C'est une injustice de la vie", estime Jeannine Mollier, autre résidente des Girandières.
"Il y a une certaine vulnérabilité physique, psychologique et intellectuelle que l'on peut deviner en regardant attentivement les photos, par certains gestes, certaines attitudes, que des personnes plus jeunes n'auraient peut-être pas", ajoute-t-elle.
Briser un tabou
Vieillir est synonyme de petite mort pour beaucoup. Parler de ce tabou et l'exposer aux regards, un premier pas pour déconstruire les préjugés auprès des jeunes ou des moins jeunes. "Ça peut choquer parce que les personnes âgées se retrouvent comme face à un miroir où elles se voient vieillir. Cela peut faire mal", constate Caroline Simon, assistante sociale au centre communal d'action sociale d'Échirolles.
"Mais ce n’est pas parce qu’on vieillit qu’on va être malade, ce n'est pas parce qu'on vieillit qu'on ne va pas plaire, complète-t-elle. Ce sont toutes ces questions que la société actuelle, je trouve, ne soulève pas assez. C'est de la prévention pour rassurer les personnes âgées sur des complexes qui pourraient être créés à cause des autres."
En août, l’exposition sera déplacée à l'université Grenoble-Alpes. Car briser les tabous de l’âge doit aussi passer par le regard d'un public plus jeune.