Un mois après les inondations volontaires de la plaine du Bouchage, afin de protéger Lyon d'une crue du Rhône, agriculteurs et élus du Nord-Isère demandent des indemnisations à la Métropole lyonnaise. Et ce au titre d'une "solidarité aval-amont".
Un mois après les intempéries de décembre, les stigmates des inondations sont encore visibles dans le nord du département de l'Isère. Les parcelles de blé de Sébastien Bonnaviat, agriculteur de la plaine du Bouchage, sont encore gorgées d'eau.
À cause de toutes les pluies et inondations, les racines s'asphyxient. Les plantes ne se développent pas et mettent en danger toute son activité. "Celui-là, il n'est pas bien joli. À mon avis, il va mourir. Celui-là, il ne fera pas une super récolte. Et lui non plus n'est pas très en forme", énumère Sébastien devant quelques pieds de son champ. Il estime ses pertes à 1 000 euros.
Des cultures mises à mal
Mi-décembre, face aux importantes intempéries et aux risques de crues du Rhône, notamment à Lyon, la plaine du Bouchage a été volontairement inondée. Une manœuvre rendue possible depuis 165 ans et une loi prise sous Napoléon III. "Ça, c'est une parcelle parmi tant d'autres qui ont été touchées par les inondations. Il y a peut-être entre 10 et 20 hectares de blé, dans la plaine du Bouchage, qui ont été détruits par les inondations", estime l'agriculteur.
Ces risques d'inondation sont connus de tous et notamment des assurances, qui ne remboursent pas toujours les dégâts. Pour cause : une centaine de kilomètres de fossés, creusés dans cette plaine, est chargée de faire évacuer l'eau. Mais au fil des années, des intempéries et d'un budget insuffisant, ces tranchées ont souffert du manque d'entretien.
Elles sont désormais inefficaces, juge Sébastien : "C'est vrai que si l'on pouvait obtenir une indemnisation pour entretenir ces fossés et les cours d'eau, ce serait quand même la moindre des choses." Car, pour le moment, tous les investissements nécessaires au bon déroulé de l’inondation de la plaine du Bouchage sont à la charge des territoires impactés. Mais, depuis la dernière crue, les communes demandent un partage financier à la Métropole de Lyon au titre d’une solidarité aval-amont.
Un appel soutenu par le département de l'Isère
"On sert quand même de vase à expansion. On n'est pas les seuls d'ailleurs le long du Rhône. On aimerait bien que cela soit pris en considération", explique Christophe Perrier, adjoint à la mairie de Bouchage (Isère). "On n'est pas là pour demander de l'argent à proprement dit, c'est davantage pour trouver un accord avec eux. Quand on déclenche la cellule de crise en cas de crue, nous avons beaucoup de frais : ça demande du matériel, des moyens humains", poursuit-il.
L'appel de la commune a été soutenu par le département de l'Isère. "La solidarité de la plaine du Bouchage a un coût élevé pour les communes, le Syndicat intercommunal de défense contre les eaux du Haut-Rhône, les habitants, les agriculteurs, les entreprises… Pour préparer les inondations, les gérer et réparer les dommages provoqués. Si la solidarité amont-aval fonctionne, il est temps que la solidarité aval-amont se développe également. La Métropole de Lyon a une responsabilité, celle d’assurer sa protection. C’est pourquoi il est temps qu’elle participe à son financement", a appuyé Jean-Pierre Barbier, président (LR) du Conseil départemental, dans un communiqué en date du 19 décembre dernier.
Les habitants de la Plaine du Bouchage protègent la Métropole de Lyon des crues du Rhône. En soutien aux élus mobilisés sur ce sujet depuis de nombreuses années, j’appelle la Métropole à ouvrir les yeux et à participer aux frais de ceux qui assurent cette protection essentielle. pic.twitter.com/5CPHxqFWdB
— Jean-Pierre BARBIER (@JPBARBIERISERE) December 18, 2023
Mais alors que ces inondations sont de plus en plus fréquentes, la Métropole de Lyon se décharge de toute responsabilité : "La loi de 1858, sous Napoléon III, donne à l’Etat la responsabilité de la solidarité financière. Les investissements de protection contre les inondations, portés par les territoires en amont et par la Métropole de Lyon, sont aujourd’hui largement financés par l’État via le fonds Barnier", a-t-elle fait savoir dans un communiqué.
Ce fonds Barnier finance de 40 à 80 % tous les investissements en lien avec la protection des inondations. Mais, selon les collectivités de la plaine du Bouchage, ces subventions particulières sont jugées insuffisantes.