La CGT a porté plainte contre X pour "homicide involontaire" après le décès d'une agente des routes lors d'un chantier en juillet dernier. Une action qui vise à questionner le dispositif de sécurité mis en œuvre le jour de l'accident et déterminer d'éventuelles responsabilités.
Le Département de l'Isère prend-il les dispositions nécessaires pour la sécurité de ses agents ? La CGT porte cette interrogation devant la justice après la mort d'une agente des routes le 6 juillet dernier. Victoire B., tout juste âgée de 30 ans, intervenait sur un chantier de fauchage dans la combe de Gières, sur la route entre Grenoble et Uriage, lorsqu'un automobiliste l'a violemment percutée.
Hospitalisée avec un pronostic vital engagé, elle est décédée des suites de ses blessures. L'automobiliste sera jugé en début d'année prochaine. Mais la CGT vient d'engager une autre procédure en déposant plainte contre X pour homicide involontaire par manquement à une obligation particulière de sécurité. Cette action vise à mettre en avant "le non respect de dispositions légales en matière de sécurité des agents des services du département".
"On s'interroge sur les conditions du chantier, c'est-à-dire route ouverte avec un alternat de circulation. C'est une route sinueuse où il y a beaucoup de virages, dangereuse, qualifiée de 'route de la mort' par les agents", expose Jean-Michel Montoya, secrétaire général adjoint de la CGT au Département de l'Isère, également agent des routes.
"On est dans le déni"
Le représentant syndical estime que la circulation aurait dû être coupée lors des opérations de fauchage sur cette route réputée pour être "extrêmement dangereuse". "On veut que le Département de l'Isère prenne conscience qu'on ne peut plus fonctionner de la sorte, qu'on ne peut pas se voiler la face", ajoute-t-il.
Egalement membre du CHSCT, Jean-Michel Montoya affirme avoir alerté à plusieurs reprises sur une "succession d'accidents graves". "On est dans le déni, on ne veut pas reconnaître, on va chercher d'autres mauvaises raisons pour expliquer ces accidents. Mais on ne se remet pas en cause", regrette-t-il.
Si on ne change pas de manière de fonctionner, on aura d'autres d'accidents. Et cela, nous ne l'acceptons pas.
Jean-Michel Montoya, secrétaire général adjoint de la CGT au Département de l'Isèreà France 3 Alpes
Les modalités de sécurité pour les agents des routes sont encadrées par un arrêté datant de 2016. Mais ledit texte ne peut être appliqué lorsque les conditions sont jugées trop dangereuses, nécessitant la prise d'un autre arrêté. "C'était le cas pour le chantier sur lequel travaillait Victoire. C'était un chantier long sur un tronçon qui est authentifié comme étant dangereux", soutient Me Hervé Gerbi, l'avocat des plaignants.
Les conditions auraient justifié, selon lui, le renforcement du dispositif de sécurité. Car l'alternat n'est possible que si le chantier n'excède pas 1 200 mètres de long - il s'étalait sur 2 km - et si la circulation ne dépasse pas 1 000 véhicules par heure - 1 400 sur ce tronçon. "On n'a probablement pas pris en considération l'évolution de la circulation sur cette partie de route, peut-être par confort, peut-être parce qu'on se dit que c'est compliqué de fermer un tronçon lorsqu'il s'agit de la sécurité des agents", questionne l'avocat.
Pour sa part, le Département de l'Isère annonce rester "à disposition de la justice" et affirme préconiser "des mesures de sécurité rigoureuses mises en œuvre au quotidien par (les) agents". Avec cette plainte, Me Gerbi espère déterminer les responsabilités "pour que les leçons soient tirées du décès tragique de cette jeune femme de 30 ans."
"Si on ne change pas de manière de fonctionner, on aura d'autres d'accidents, craint Jean-Michel Montoya. Et cela, nous ne l'acceptons pas." Le code pénal punit le manquement à l'obligation de sécurité de 5 ans d'emprisonnement et 75 000 euros d'amende.