L'opposition contre le projet de construction d'un barrage hydroélectrique sur le Rhône, entre Saint-Romain-de-Jalionas en Isère et Loyette dans l'Ain, ne faiblit pas. Alors que les conclusions de la concertation publique qui s'est achevée 29 février sont attendues, le collectif Stop barrage Rhônergia a mené une nouvelle action ce dimanche.
Le projet de construction d'un barrage hydroélectrique à Saint-Romain-de-Jalionas (Isère) continue de faire face à une vive opposition, notament de la part du collectif Stop barrage Rhônergia. Lancé officiellement au mois de novembre 2023, le collectif qui regroupe 80 personnes, dont des habitants de la commune, dénonce l'impact environnemental et le coût du projet.
Nouvelle mobillisation
Ce dimanche 24 mars, avec l’Association des usagers des plans d'eau et rivières en AURA, le collectif citoyen a mené une nouvelle action de sensibilisation au bord du Rhône, à Hières-sur-Amby. Élus, habitants et militants ont pris part à la mobilisation et aux discussions dont l'objectif était de pointer du doigt les dommages que pourrait avoir le projet sur le fleuve.
Selon le collectif d’opposants, ce projet serait une catastrophe écologique. "Demain, on va avoir des rives qui seront artificialisées et avec cette artificialisation de toutes les rives du Rhône, tous les écosystèmes, que ce soit la faune et la flore, seront les premiers impactés. C'est important de rappeler également que nous sommes sur les derniers 25 kilomètres libres et naturels du Rhône sur les 540 qu'il parcourt en France. Donc ce sera un peu le coup de grâce", explique Clément Pradier, coordinateur du collectif Stop barrage Rhônergia.
"Des dégâts pour la faune et la flore"
Ce tronçon du Rhône, encore très sauvage, est un refuge pour les loutres, castors et de nombreuses espèces d’oiseaux. Mais leurs habitats naturels risqueraient de disparaître si les aménagements prévus par la Compagnie nationale du Rhône (CNR), porteuse du projet, se concrétisent.
"La construction de ce barrage va occasionner des dégâts qui seront irrémédiables pour tous ces habitats, tous ces endroits, ces arbres. On va élargir jusqu'à 240 mètres (...), on va construire une digue, une retenue d'eau de 22 kilomètres. Ce sera la fin de ce lieu", s'inquiète Joël Alloud, membre du comité de la Ligue pour la protection des oiseaux (LPO) de l'Ain.
Parmi les manifestants présents ce dimanche, le maire de Saint-Romain-de-Jalionas. Comme lui, de nombreux élus s'opposent à ce projet qui s'inscrit dans le cadre de la loi visant à prolonger la concession du Rhône jusqu’en 2041, avec l'objectif de participer à l’accélération des énergies renouvelables dans les territoires.
Estimé à 330 millions d’euros, ce projet serait, selon lui, très coûteux pour l'environnement. "C'est inadmissible de faire une production industrielle d'électricité qui est 'peanut' : ce n'est rien du tout. On est sur 37 mégawatts de puissance, ce sont 140 gigawatts. Par an, c'est l'équivalent d'une commune de 60 000 habitants, hors chauffage et hors eau sanitaire. Ce n'est rien", fait entendre Jérôme Grausi.
Les habitants et les associations sont assez unanimes sur le fait que c'est un projet qui n'est pas à faire.
Clément Pradier, coordinateur du collectif Stop Barrage Rhônergia
Entre décembre 2023 et février 2024, la CNR a lancé une concertation publique permettant de rencontrer les acteurs autour du projet. Sous la forme de réunions publiques, thématiques ou encore d'échanges dans les marchés du Nord-Isère et de l'Ain, ces rencontres ont permis la consultation du grand public, notamment des riverains et des associations opposés au projet.
Pour le collectif Stop barrage Rhônergia, cette concertation publique a révélé un manque d'informations autour de ce projet. "On a été bien engagés sur cette concertation, on était présents à toutes les réunions publiques qui se sont tenues et aux différents événements de rencontres du grand public. Globalement, on observe que le public était assez mal informé de ce projet de barrage et par contre, quand ils prenaient connaissance des éléments du dossier et des potentiels impacts qu'engendreraient la création de ce barrage, les habitants et les associations sont assez unanimes sur le fait que c'est un projet qui n'est pas à faire", constate Clément Pradier.
La décision de l'Etat attendue au mois de juin
Durant les trois mois d'échanges qu'a duré la concertation publique, pas moins de 1 000 personnes ont été entendues par les mandataires de la Commission nationale du débat public, qui ont d'ailleurs souligné le bon déroulement du débat public. Mais pour les opposants au projet, la CNR n'a pas suffisamment joué le jeu en laissant sans réponse les inquiétudes des participants.
A l'issue de la concertation, la compagnie nationale du Rhône a promis des études plus poussées pour apporter plus de réponses aux questions et aux inquiétudes des populations. Pour le collectif Stop barrage Rhônergia, "il n y a pas d'intérêts à dépenser des millions d'euros pour des études qui vont confirmer les inquiétudes que nous avons", réagit Clément Pradier.
Alors que les conclusions de cette concertation publique sont attendues des mandataires de la Commission nationale du débat public, c'est à l'Etat que reviendra la décision finale au mois de juin prochain. "On espère que l'Etat entendra raison en demandant l'abandon de ce projet parce qu'il n'est pas viable", appelle de tous ses vœux le coordinateur du collectif Stop Barrage Rhônergia.