Pour la première fois en plus de mille ans d'existence, c'est au printemps que la fameuse foire de la Saint Ours d'Aoste ouvre ses portes. Jusqu'à dimanche soir, plus d'un millier d'artisans et 150 à 200 000 visiteurs venus de tout l'arc alpin, et notamment de Savoie et de Haute-Savoie, sont attendus. Une édition 2022 placée sous le signe de la solidarité avec l'Ukraine et de la renaissance avec le fin du pass vaccinal en Italie, à partir de ce 1er avril .
Un sécateur sculpté dans une pièce de bois : c'est l'emblème choisi pour symboliser cette 1022ème édition de la grande fête des sculpteurs sur bois de la vallée d'Aoste. Un choix qui ne doit rien au hasard.
"C'est la première fois de sa longue histoire que la Saint Ours se déroulera au printemps. Grâce à ce sécateur, nous espérons qu'en naîtront de beaux fruits : pour tout le monde; à commencer par les Ukrainiens", explique Luigi Bertschy, le vice-président de la région Vallée d'Aoste chargé du développement économique.
Une foire millénaire sous le signe de la solidarité avec l'Ukraine
C'est que depuis peu, la petite vallée francophone italienne compte sur son territoire quelques 300 réfugiés ukrainiens. L'effort de solidarité fait par la plus petite région de la péninsule avec 120 000 habitants est significatif. A titre de comparaison, l'Italie a déjà accueilli 72 000 réfugiés en provenance d'Ukraine contre environ 30 000 pour l'instant en France.
"L'accueil est dans notre ADN", explique Luigi Bertschy qui supervise l'organisation de la foire millénaire pour le compte de la région autonome de la vallée d'Aoste. En marge de la foire, un mini-marché a d'ailleurs été organisé pour permettre aux 300 réfugiés ukrainiens de venir gratuitement trouver le nécessaire à leur installation. Vêtements, chaussures, couvertures, serviettes... Autant de dons récoltés par les volontaires de la paroisse de l'église Saint-Martin de Corléans d'Aoste, mais aussi du matériel de cuisine ou des sacs. "Nous sommes arrivés ici depuis Kiev en emportant seulement le strict nécessaire rassemblé à la hâte dans un sac en plastique", raconte une réfugiée au journal local "La Stampa"
Plus d'un millier d'artisans-exposants pour l'édition "du grand retour"
Le plastique, c'est justement tout ce que détestent les artisans de la Saint Ours. Aucun ou presque ne manque à l'appel cette année. 1065 exposants, c'est presqu'autant que lors de la dernière édition complète, en 2020 où 1169 étals avaient essaimés dans les rues d'Aoste.
"La Saint Ours est un évènement comme aucun autre ici", explique Donato Savin, l'un des "maestri", des maîtres sculpteurs qui seront présents dès ce samedi 2 avril devant son étal. "Il y a des gens que tu ne rencontres qu'à cette occasion. Et puis, c'est tellement bien de pouvoir échanger des idées avec d'autres personnes qui sont dans la même recherche que toi" !
Pourtant, la spécialité de Donato, c'est moins le bois que le marbre vert. Un marbre dont il se plaît à caresser les nervures, devant son atelier de montagne, sur les hauteurs d'Epinel, son village. Pour cette Saint Ours, il a crée de nouveaux personnages : des musiciens. "Pendant la pandémie, j'ai eu l'occasion de beaucoup réfléchir à de nouvelles idées. C'est l'avantage d'avoir le temps ! Une réflexion que j'ai toujours menée accompagné par de la musique".
Au cœur d'Aoste depuis ce vendredi 1er avril, le travail de 67 autres maîtres sculpteurs trône au beau milieu de la piazza Chanoux. Sous les toiles tendues de "l'Atelier des Métiers" : le meilleur de la production artisanale locale : meubles, sculpteurs, artisans du fer, du cuir et des peaux, de la céramique et du cuivre. Une vraie vitrine des savoir-faire locaux à découvrir...sans "Super Green Pass", l'équivalent en Italie du pass vaccinal.
La fin de deux longues années d'Etat d'urgence Covid
Car la nouveauté en ce 1er avril - et personne ne s'en plaindra en Italie, c'est la fin officielle de "l'Etat d'urgence", décrété il y a deux ans par le gouvernement italien. "Aujourd'hui, on tourne la page de l'urgence décrétée par le gouvernement Conte le 31 janvier 2020", titrait un quotidien italien ce vendredi matin.
Fini le "Super Green Pass" pour accéder aux édifices publics, aux commerces, aux banques ou pour réserver une chambre d'hôtel, aller au restaurant ou visiter les musées et les foires.
"Le masque FFP2 reste de mise en revanche dans les lieux clos ", précise toutefois Roberto Speranza, le ministre de la santé italien. "C'est qu'il ne suffit pas de mettre sur le bouton 'off' pour éteindre une pandémie".
C'est vrai, mais ce début de mise sur "off" de la pandémie rendra assurément la vie plus légère aux dizaines de milliers de visiteurs de cette 1022ème Saint Ours.