Le fartage, c'est une course dans la course invisible, mais cruciale, qui met aux prises les techniciens des différentes équipes, tapis dans leurs camions et chargés d'affiner les skis des biathlètes.
"Si on se plante, Martin Fourcade ne sera pas dans les 20 premiers même s'il est très en forme" : Le fart, c'est un revêtement appliqué sous les skis qui permet d'améliorer la glisse et l'adhérence sur la neige. Autant dire que la moindre erreur dans la formule magique concoctée par les hommes de l'ombre des Bleus peut coûter très cher, même à un champion de la trempe de Fourcade.
Une formule magique tenue secrète
"C'est une compétition dans la compétition, explique ainsi Grégoire Deschamps, le responsable de la cellule technique au sein de l'équipe de France de biathlon. On sait qu'avec des skis meilleurs que les autres, on apporte beaucoup et on peut faire perdre aussi beaucoup. Chaque nation met des moyens et il faut se mettre au moins au même niveau que les grosses nations. La base de fart est identique, mais chaque nation a ses petits trucs au niveau de l'expérience et la façon de travailler, qui sont secrets."Ils sont six chez les biathlètes à mener ce combat essentiel à l'arrière-plan, à l'abri des regards indiscrets. Un "gros travail où rien n'est écrit d'avance", selon leur patron Grégoire Deschamps, et qui débute véritablement la veille de la course.
Un choix de fart en fonction de la météo
"24 heures avant le départ, on a le météorologue au téléphone, on connaît les conditions que l'on va avoir et après on réfléchit, selon notre expérience, sur le fart que l'on va choisir. On essaye les fartes le lendemain, on fait un classement et on met les meilleurs", indique le technicien, qui dispose, avec son équipe, de 400 références différentes divisées en trois grandes familles: un fart solide, un fart sous forme de poudre et un fart liquide.Le but est "d'apporter différentes paraffines, différentes surfaces et différentes réactions chimiques pour avoir une semelle la plus glissante possible par rapport à la neige que l'on rencontre." Dans l'optique des JO de Pyeongchang, l'équipe technique des Bleus a joué la carte de l'innovation en engageant une collaboration avec des physiciens de l'École polytechnique et de l'École normale supérieure (ENS) afin de confectionner un fart encore plus performant.
Choix des skis
Le choix des skis est également primordial. Chaque biathlète possède entre 20 et 30 paires, suivant la qualité et la température de la neige et réglées en fonction de leurs qualités physiques. Il s'agit ensuite de définir la paire idéale pour l'épreuve à venir. Cette décision est prise "à 90% par le technicien", révèle Grégoire Deschamps. "Très souvent, Martin (Fourcade, ndlr) ne connaît pas la paire de skis qu'il va utiliser au départ", ajoute-t-il. D'où la nécessité d'un lien de confiance fort entre le sportif et l'encadrement.Cette saison, le staff de l'équipe de France est passé dans une autre dimension en terme de confort et de qualité de travail avec la livraison d'un nouveau camion, le plus vaste du circuit (45 m²), avec 4 postes de fartage et pouvant contenir jusqu'à 400 paires de skis, pour un coût de 220.000 euros.
"Il nous apporte un plus au niveau sanitaire avec un système de ventilation, affirme Grégoire Deschamps. Car il y a du fluorure de carbone et de la poussière dans les produits de fartage. On peut farter sereinement. On a la télé, on peut regarder la course. C'est important, surtout lors d'un relais où on farte pendant la course. C'est un gros plus au niveau confort." Ça farte pour les Bleus.