L'enquête sur la rixe mortelle d'Echirolles aura été complexe. Elle a permis d'identifier la plupart des agresseurs mais n'est pas parvenue à déterminer avec certitude qui a porté les coups de couteau mortels. La Justice accuse donc l'ensemble des protagonistes.
Les armes à l'origine des meurtres sauvages de Kevin et Sofiane, en 2012, n'ont jamais été retrouvées, et la plupart des accusés, sauf deux, ont refusé d'enfreindre la règle de leur quartier selon laquelle "on ne balance pas".
Pour contourner ces difficultés, la Justice a retenu le principe de la "co-action", estimant que chacun des accusés avait contribué à la mort des victimes en les affaiblissant par des coups. Ou simplement en empêchant Kevin et Sofiane de fuir ou de recevoir de l'aide.
Chacun des 12 agresseurs, appelés à comparaître à partir de ce lundi 2 novembre, est donc accusé d'avoir tué les deux victimes, quand bien même cela leur était matériellement impossible, les corps ayant été retrouvés à une soixantaine de mètres de distance.
Un procès risqué
"C'est un procès très dangereux pour la vérité. La matrice à erreur est prête", accuse Me Ronald Gallo, avocat de la défense. "Ceux qui ont porté des coups mortels, qui ont tué des innocents, doivent être condamnés sévèrement. Mais la Justice ne doit pas condamner des innocents pour satisfaire l'opinion publique", abonde Me Bernard Ripert, avocat de deux accusés.Beaucoup d'avocats doutent cependant que le procès permette de faire la lumière sur les responsabilités de chacun. "Ils sont tous en train de s'épier les uns les autres. Et celui qui parle le fait pour se protéger", résume Me Arnaud Lévy-Soussan. "Je suis assez pessimiste", abonde Me Joëlle Vernay.
Au contraire, Me Denis Dreyfus, dont le client a parlé, dit avoir "un peu espoir qu'il y ait un sursaut de conscience pour avancer sur le chemin de la vérité".
Reportage de Jean-Christophe Solari, Jean-Pierre Rivet, Cédric Lepoittevin & Lisa Bouchaud
"En six semaines, leur vrai visage va apparaître. Le temps permettra peut-être de délier les langues", veut aussi croire Me Hafida El Ali, avocate des familles de victimes.
La peine encourue par les accusés est de 30 ans de réclusion criminelle.