La commune de Rive-de-Gier (Loire) a été particulièrement touchée par les crues et les inondations du 17 octobre. Les premières estimations font état de 2 millions d'euros de dégât. Problème, depuis les émeutes de juillet 2023, la franchise de la ville s'élève à 2,5 millions d'euros. La commune va-t-elle devoir payer toute seule ?
C'est une première étape que le maire communiste de Rive-de-Gier, Vincent Bony, attendait avec impatience. Lundi 4 novembre, un expert mandaté est venu constater les dégâts de la crue et les inondations du 17 octobre sur les bâtiments municipaux. L'assureur de la commune se basera sur son rapport pour accompagner, ou non, la ville dans sa reconstruction.
Alors que le petit groupe sillonne la médiathèque ravagée par les coulées de boue, l'édile a la mine déconfite. "Lors de notre premier contact avec l'assurance, on nous a expliqué que la franchise allait au-delà des dégâts, et qu'on ne serait remboursé de rien", nous explique-t-il, dépité, au milieu des débris.
Un nouveau contrat depuis janvier 2024 et réforme du code des assurances
Pour comprendre cette situation, il faut revenir plus d'un an en arrière. En juillet 2023, une vague d'émeutes urbaines enflamme l'hexagone suite à la mort de Nahel, tué par un policier à Nanterre. La commune de Rive-de-Gier n'est pas épargnée et plusieurs individus ont tenté de s'introduire dans la mairie et le commissariat municipal avant d'incendier les lieux.
Suite à ces événements "notre assurance a souhaité mettre fin à notre contrat au 31 décembre 2023. Nous avons pu obtenir un nouveau contrat auprès d'un autre assureur mais on a dû accepter une franchise de 2,5 millions d'euros pour les violences urbaines car cela a été bien difficile de trouver un nouveau contrat pour une commune comme nous", explique l'édile.
Problème, une réforme récente du code des assurances stipule dorénavant qu'en cas de catastrophe naturelle, la franchise valable est celle la plus haute du contrat. Auparavant, elle s'élevait à 10% des dégâts.
Si on applique les textes de manière « brute », cela nous priverait de toute possibilité de toucher des indemnités.
Vincent Bony
Une année d'investissement
Au milieu des débris de la médiathèque, nous retrouvons Vincent Bony. Ici, tout le fond de collection pour adulte, ainsi que les jeux de société sont détruits. De plus, il faudra reconstruire le bâtiment ailleurs, cela fait deux fois qu'il est inondé. Avant le rapport de l'expert, la ville estime qu'elle devra déjà débourser 2 millions d'euros pour reconstruire ce qui a été détruit.
"2 millions d'euros c’est pratiquement notre capacité d’investissement pour une année", s'alarme le maire. Sans indemnité, "la ville aura les moyens de reconstruire, mais de nombreux projets seront remis en question", poursuit-il. Une mauvaise nouvelle qui arrive déjà dans un contexte compliqué pour les collectivités locales, coincées entre une inflation galopante et une baisse des cotisations de l'état dans un contexte de politiques d'austérité.
Rive-de-Gier n’est ni responsable de la vague nationale des émeutes urbaines ni du bouleversement climatique et de l’inondation qui vient de venir.
Vincent Bony, maire de Rive-de-Gier
Bataille politique en venir
Pour l'élu communiste, le sentiment qu'une double peine s'abat sur sa commune. Il estime que cette réforme des assurances a produit "un cumul de difficultés qui n’a pas été anticipé" et qu'une solution publique doit être trouvée pour sa ville mais aussi pour toutes les collectivités qui vont être confrontées au même problème dans les années à venir.
Il a ainsi écrit au président de la République, au premier ministre ainsi qu'à tous les groupes parlementaires des deux chambres. Il espère également pouvoir échanger assez rapidement avec son assureur dans le but de trouver une solution rapide.
"Quand on est victime, on doit être reconnu comme tel. La ville de Rive-de-Gier est victime, elle doit être reconnue, entendue. Rive-de-Gier n’est ni responsable de la vague nationale des émeutes urbaines ni du bouleversement climatique et de l’inondation qui vient de venir", tempête-t-il. Plus que tout, il espère que sa ville ne sera pas frappée par une troisième calamité... financière cette fois-ci.
De courrier en coup de fil, Vincent Bony tente de mobiliser pour porter sa réclamation. Mais en attendant d'obtenir des réponses, il continue de gérer l'après catastrophe, et enchaîne les réunions. À chaque fois, impossible d'éviter le sujet. Dès l'après-midi, une réunion de travail autour de la découverture du Gier occupe son esprit. Chaque rendez-vous reste imprégné de la crainte d'une nouvelle inondation.