Ancien cadre dirigeant d'une multinationale américaine, Éric Piolle, 41 ans, écologiste au physique de gendre idéal, a remporté, ce dimanche 30 mars, la mairie de Grenoble à la tête d'une coalition alliant EELV, le Parti de gauche et des collectifs citoyens.
Ses alliés décrivent Eric Piolle comme "un gros bosseur" adepte du travail collectif. "Il a le souci des personnes, des êtres humains. Il a une capacité d'écoute qui fait que tout le monde accepte sa décision", décrit Raymond Avrillier, militant historique de l'écologie grenobloise.
"Salarié le plus méritant"
Novice en politique, où il n'est entré qu'en 2009, Éric Piolle n'en est pas à sa première élection. Conseiller de la région Rhône-Alpes depuis 2010, président du groupe EELV jusqu'en 2013, il avait aussi été élu "salarié le plus méritant" par ses collègues de Hewlett-Packard (HP) à Grenoble, quelques semaines après son licenciement fin 2010. A l'époque, 600 personnes s'étaient réunies devant le site pour le soutenir. Il avait gagné la confiance des salariés après s'être opposé, en tant que cadre dirigeant, à un plan de délocalisation de 60 emplois vers la Roumanie. La direction de HP n'a rien voulu en dire. "Il était très populaire. Quand je suis allée expliquer à la CGT que je voulais emprunter le camion sono pour protester contre le licenciement d'un cadre, ils étaient un peu surpris", se souvient Myriam Martinet, déléguée syndicale centrale CGT chez HP.
Entré dans le groupe en 2001, Éric Piolle avait pris en 2007 la direction du pôle logistique services pour l'Europe, le Moyen-Orient et l'Afrique, gérant un budget "plus important que la ville de Grenoble", souligne-t-il. Ingénieur, diplômé de Grenoble INP, il avait auparavant travaillé cinq ans dans une usine de transformation de papier.
"Courant catho-humaniste"
Ce n'est donc qu'à 36 ans que ce fils de chercheurs au CNRS, qui fait tous ses déplacements à vélo, a sauté le pas de la politique en rejoignant EELV. "Un espace nouveau, plus ouvert qui venait bousculer la logique PS-UMP", explique-t-il.
Issu d'un "courant catho-humaniste", Éric Piolle a baigné très jeune dans un milieu militant. Il a fait son lycée à Pau "comme Hubert Dubedout", maire emblématique de Grenoble (1965-1983), fondateur des groupes d'action municipale (GAM). Comme Dubedout en son temps, il plaide pour "un renouveau des pratiques et du style politique" à l'opposé "des salariés de la politique".
Marié à 22 ans, père de quatre enfants, il a milité dans des associations de soutien scolaire, de défense des enfants de familles sans papiers mais aussi auprès de Pierre Larrouturou, militant de la semaine de quatre jours et cofondateur du collectif Roosevelt.
Le casting est bon"
Pendant la campagne, ses opposants l'ont souvent dépeint en version dauphinoise de Jean-Luc Mélenchon. Lui cite Pierre Mendès-France et Simone Veil dans ses meetings. "Toujours impliqué dans l'aumônerie" de ses enfants, il assure que "les gens de droite savent qu'ils peuvent travailler avec" lui.
"C'est un bon gestionnaire, quelqu'un de sincère", estime Myriam Martinet. A HP, même des employés de droite votent pour lui, indique-t-elle. "Le casting est bon. C'est quelqu'un de pas désagréable, qui a plein de qualités personnelles", reconnaît Eliane Giraud, vice-présidente (PS) du conseil régional Rhône-Alpes et soutien de Jérôme Safar. "Mais qu'est-ce qu'il y a derrière Éric Piolle? Quel leadership va-t-il imposer?", questionne-t-elle.
"Derrière la tête de gondole bien propre d'Eric Piolle, il y a un conglomérat qui réunit les plus extrémistes des écologistes et la gauche extrême", dénonce pour sa part Matthieu Chamussy, tête de liste UMP.