Les abandons d’animaux sont plus nombreux l’été, et les propriétaires peu scrupuleux laissent parfois leurs animaux dans des conditions très dangereuses. Voici ce que risquent les maîtres qui abandonnent leur animal.
L’été est l’une des périodes de l’année où le nombre d’animaux abandonnés est le plus élevé. Si certaines formes d’abandon sont légales, celles qui mettent en danger l’animal abandonné sont punies par la loi. Les propriétaires peu scrupuleux s’exposent à de lourdes sanctions. Maître Caroline Lanty, avocate de la fondation 30 Millions d’Amis, explique : “Le code pénal punit l'abandon d'un animal d'une peine de 3 ans de prison et 45 000 euros d'amende. Le législateur a prévu également ce qu'on appelle une circonstance aggravante, qui porte les peines à 4 ans et 60 000 euros d'amende lorsque l'abandon a été fait dans des circonstances qui pouvaient conduire à la mort imminente de l'animal”.
Des circonstances aggravantes
Voici quelques circonstances aggravantes : l’attache courte en plein soleil l'été, sans accès à de l'eau et à de la nourriture, laisser un animal enfermé dans un appartement qu'on a quitté durablement... “C’est quelque chose que l’on voit assez fréquemment dans les affaires qu'on plaide au quotidien, aussi incroyable que ça puisse paraître. On a des gens qui quittent leur logement parce qu’ils ne peuvent plus payer le loyer ou parce qu’ils ont trouvé un nouveau partenaire, et ferment la porte en laissant l'animal enfermé au sein du domicile. Les voisins donnent l’alerte, souvent interpellés par l'odeur, ou par les cris quand on arrive à intervenir avant que l'animal soit décédé”, explique Maître Caroline Lanty.
Des peines "complémentaires"
La justice peut également prononcer ce qu'on appelle la peine d'interdiction définitive de détenir un animal, obtenue régulièrement devant les juridictions “quand les faits ont gravement porté atteinte aux animaux.” Pour éviter que l'infraction ne se reproduise, l’association la demande systématiquement, explique Maître Lanty : “Elle est souvent également requise par le procureur de la République à l'audience et elle est fréquemment prononcée.” À l'audience, “on demande évidemment à ce que l'animal ne soit jamais restitué à son propriétaire et donc que nous en soyons propriétaire définitivement pour pouvoir le faire adopter." S'il y avait d'autres animaux qui étaient détenus, "mais dont on n'avait pas vu à l'époque qu'ils subissaient les mauvais traitements," l'association demande aussi à ce que ces animaux soient confisqués. Une peine complémentaire permet au juge d'interdire tout exercice d'activité professionnelle en lien avec des animaux. “Ça peut être éleveur, pet sitter, auxiliaire vétérinaire, responsable de centre équestre. Il peut y avoir une interdiction d'exercer une activité, qu'elle soit professionnelle, rémunérée, bénévole ou associative en lien avec des animaux.”
Différentes formes d'abandon
L’abandon s’applique, évidemment, à l'animal qu'on abandonne sur une voie publique mais cela s’applique aussi à la négligence, qui est considérée comme une forme d’abandon. Laisser un animal en pleine chaleur, sans le nourrir suffisamment, sans lui laisser une gamelle d'eau à disposition est par exemple apparenté à un abandon : “On va voir des animaux qui ont pris un coup de chaleur et qui, sans intervention d'une association ou des forces de police, étaient exposés à un risque de mort imminente”, regrette maître Lanty.
L‘avocate détaille : “Ce que la loi punit, c'est l’abandon par délaissement. C'est le fait de ne pas s'occuper de son animal au point que celui-ci soit placé dans des conditions dangereuses pour sa santé ou au point que celui-ci présente les stigmates d'un délaissement, donc un amaigrissement extrême ou un défaut de soin lorsqu'il présente des plaies, des maladies ou des infections. C'est le délaissement durable.” Le propriétaire d'un animal peut donc vivre à son domicile et être présent avec son animal, mais le délaisser à tel point que cela soit constitutif d'une infraction d'abandon, “en plus de l'abandon qu'on entend dans le langage commun”, qui consiste à mettre son animal en dehors de son domicile et tourner les talons.
Des abandons plus nombreux en été
Elle dénonce : “On a quand même des animaux qui sont laissés dans des logements où on va retrouver malheureusement un animal mort, qui aura préalablement cogné des murs, essayé de gratter le sol pour tenter d'avoir accès à de l'eau ou à de la nourriture. Ils ont donc agonisé pendant 15 jours, 3 semaines, un mois. Il faut l'entendre.” Il ne s’agit pas de cas isolés, regrette l’avocate. Les associations de protection animale estiment autour de 100 000 le nombre d’abandons par an, avec “des pics à certains moments”, notamment à partir du mois de juin. “Les associations voient effectivement des afflux massifs avec l'argument des vacances, mais aujourd'hui les associations sont confrontées à l'argument du pouvoir d'achat, du coût de la vie.”
Des abandons légaux
Toutes les formes d’abandon ne sont pas punies. Les personnes qui viennent abandonner leur animal dans une association de protection animale comme la SPA n’enfreignent pas la loi, indique Caroline Lanty : “Ce n'est pas constitutif d'un délit, même si ce comportement est délétère à l'égard de l'animal, la personne a fait la démarche de le déposer dans une association de protection animale qui va l'accueillir avant d'essayer de le faire adopter." Ces abandons ne sont pas punis par la loi, "sous réserve évidemment qu'ils se fassent dans une association de protection animale et pas à l’attache du portail de l’association.”
Les animaux concernés
La loi s’applique à tous les animaux domestiques : chats, chiens, chevaux, lapins, poules... Tous sont sous la responsabilité de leur propriétaire. “Il sont indistinctement visés par le texte de l'abandon. Des poursuites et des condamnations peuvent s'exercer contre l'ancien propriétaire d'un hamster, d’un lapin, d'un chien, d'un chat, d'un cheval, d'un âne ou d'une poule. Pour tous les animaux domestiques, le texte est le même, la prévention est la même et les juges condamnent à peu près de la même façon.”
Prévenir les abandons
L’avocate poursuit : “Les refuges constatent que des personnes qui sont vraiment dans de grandes difficultés, il y en a finalement peu. On a beaucoup d'abandons irresponsables de personnes qui ne se rendaient pas compte qu'il fallait sortir l'animal, qui ne se rendaient pas compte que ça réclamait du temps et de l'attention, qui ne se rendaient pas compte de ce que les croquettes allaient coûter. On se dit qu'il y a peut-être un défaut de réflexion à l'origine de l'acquisition.” Là aussi, la loi tente de prévenir ces abandons. Le législateur impose un délai de réflexion de 7 jours avant d'acquérir un animal de compagnie : "Dans ce délai de réflexion de 7 jours, on va vous remettre au début un document qui va lister sur plusieurs pages toutes les obligations qu'impose la détention d'un animal : combien de temps l'animal peut vivre, quel est le coût de nourriture, quel est le coût vétérinaire... Si votre décision est mûrement réfléchie, vous pourrez venir récupérer l'animal”, explique Maître Lanty.
Signaler un abandon
Un numéro unique, le 36 77, vous permet de signaler les cas de maltraitance et d’abandon. “Nous conseillons aux gens de prendre des photographies autant qu'ils le peuvent, des vidéos pour caractériser la situation d'un animal en détresse. C'est un animal qu'on va voir continuellement, attaché à une chaîne trop courte, un animal qui n'a même pas accès à une gamelle d'eau ou à une gamelle de nourriture. On prend des photos pour caractériser un état de maigreur, l'état général de l'animal, le lieu de vie. Il faut documenter toute dégradation physique. Dans des immeubles collectifs, si on entend des coups ou l'animal pleurer, il faut essayer de prendre des vidéos sonores et bien noter quel type d'animal ça concerne, dans quel lieu, à quel étage, quel appartement, depuis combien de temps l'animal est-il là, est-ce qu'il est continuellement enfermé...”"
Récolter le plus d'informations possible
Voici les questions qui vous seront posées, au bout du fil : "Est-ce qu'il a un abri pour se protéger contre la chaleur ? Est-ce qu'il a un abri pour se protéger contre les intempéries ? Est-ce qu'il a un accès à des gamelles avec de la nourriture saine ? Est-ce qu'il a de l'eau propre ? Est-ce qu'il a un problème aux yeux ? Est-ce qu'il se gratte ? Est-ce qu'il a un problème de peau ?" Tous les éléments qui permettront aux enquêteurs d'avoir un dossier solide pour que la personne soit poursuivie et condamnée sont les bienvenus, insiste Maître Caroline Lanty.