Alors que la convention citoyenne sur la fin de vie a commencé ses travaux au mois de décembre, une conférence était organisée par le parti Renaissance, à Chamalières, samedi 14 janvier. Jean-Luc Roméro, président et fondateur de l’Association pour le droit de mourir dans la dignité, était présent.
La question des soins palliatifs, l’euthanasie, le suicide médicalement assisté, etc. Ces questions déchirent la France depuis de nombreuses années. Ces sujets sont abordés lors de la convention citoyenne organisée depuis le début du mois de décembre. Le président de la République, Emmanuel Macron, a voulu mettre en place cette convention composée de 150 citoyens tirés au sort afin de débattre du cadre actuel de l’accompagnement de la fin de vie. La convention doit se terminer au mois de mars et les conclusions seront alors transmises au Gouvernement.
Dans ce contexte, une conférence était organisée à Chamalières, samedi 14 janvier, par le parti Renaissance avec le professeur Jean-Louis Touraine, professeur émérite de médecine, et Jean-Luc Roméro, président et fondateur de l’Association pour le droit de mourir dans la dignité. Nous lui avons posé nos questions sur le débat en cours.
Question : décider de sa propre mort, est-ce toujours un tabou ?
Jean-Luc Roméro : Dire que ma mort m’appartient n’est pas un tabou pour les Français. Ça reste un tabou pour un certain nombre de politiques, de responsables religieux et de médecins. On est dans une société où on ne décide pas du début de sa vie, on ne décide pas de naître, on doit pouvoir avoir le choix de la fin de sa vie, le choix d’éteindre la lumière, le moment et la manière de mourir.
Question : qu’est-ce que le débat citoyen peut apporter à la compréhension des enjeux ?
Jean-Luc Roméro : Il n’y a pas d’expert sur cette question, il faut que les citoyens et les citoyennes puissent s’exprimer parce qu’il faut que l’on puisse aboutir à quelque chose. On vit au gré des affaires. Comme ici à Clermont-Ferrand, l’ancienne déléguée de l'ADMD a dû partir en Suisse pour mourir il y a quelques semaines. On voit qu’on ne peut pas mourir comme on le souhaite dans notre pays, où il faut avoir de l’argent pour aller à l’étranger ou avoir des relations. Il faut se poser la question de mourir dignement ici dans notre pays, dans notre région.
Il s’agit pas de faire un choix entre la vie et la mort. Il s’agit de faire un choix entre deux morts
Jean-Luc Roméro, président et fondateur de l’Association pour le droit de mourir dans la dignité
Question : est-ce qu’on peut envisager en France une aide à mourir ?
Jean-Luc Roméro : L’opinion aujourd’hui est prête. Les Français nous disent dans les sondages, non pas qu’ils sont pour l’euthanasie, mais ils veulent avoir le choix. On est dans le doute, on ne sait pas ce qu’on voudra à la fin. On a besoin d’avoir le choix, on a besoin d’avoir des soins palliatifs qui soient accessibles pour tous, ce n’est pas le cas aujourd’hui. Et de l’autre côté l’euthanasie parce que les soins palliatifs ne peuvent pas résoudre toutes les situations. On le voit parmi les politiques à l’Assemblée, il y a clairement une majorité en faveur (ndlr : d'une évolution législative). Maintenant, il faut que les politiques agissent et j’espère qu’après cette convention citoyenne, à l’automne prochain, il y aura un texte qui donnera cette ultime liberté.
Question : où se situe la juste mesure qui permettrait de concilier l’éthique et le respect de la vie ?
Jean-Luc Roméro : Il ne s’agit pas de faire un choix entre la vie et la mort. Il s’agit de faire un choix entre deux morts. 100 % d’entre nous allons mourir, ce n’est pas un scoop. Il faut permettre à chacun de choisir les conditions de sa mort. Il faut arrêter de faire une course vers la vie absolue le plus tard possible. Ceux qui le veulent, ils doivent être respectés, toute loi qui sera faite le respectera parce qu’elle posera des conditions. Si vous voulez mourir le plus tard possible, vous devez être respectés. Mais si vos souffrances sont insupportables, que vous voulez quitter ce monde, vous avez le droit d’être entendu.
Question : quelle est votre proposition ?
Jean-Luc Roméro : Il faut une loi qui place la volonté de la personne en fin de vie au centre des décisions, et pas celles et ceux qui sont autour du lit. Elle doit permettre d’un côté l’accès universel aux soins palliatifs pour mettre enfin les moyens, et de l’autre la légalisation de l’aide active à mourir, c’est-à-dire l’euthanasie et le suicide assisté.
Après avoir récupéré les conclusions de la convention citoyenne, le gouvernement préparera éventuellement un projet de loi et qui sera ensuite débattu au Parlement. A l'automne, les différents cultes ont exprimé leurs inquiétudes, défendant le respect "absolu" de la vie, et estimant qu'un passage à une "aide active à mourir".
Propos recueillis par Cyrille Genet