En compagnie de Laurence Loison, cheffe d’édition au quotidien le Progrès, Olivier Michel reçoit en plateau 3 des 8 candidats en lice pour le siège de député de la 14e circonscription du Rhône. Dans ce territoire caractérisé par sa jeunesse et son taux de pauvreté élevé, les propositions politiques ne manquent pas.
La 14e circonscription regroupe la partie Sud-Est de la métropole. Saint- Priest, Saint-Fons, Feyzin, Corbas, Solaize, et enfin Vénissieux, la plus grand ville de la circonscription.
Plus de 146 000 habitants habitent ce territoire peuplée principalement de jeunes. L’âge médian est nettement en dessous de la moyenne nationale.
Ce secteur gagne en population chaque année.
En revanche, le taux de pauvreté est élevé. Il est de dix points au-dessus de la moyenne nationale, soit plus du quart de la circonscription.
7 habitants sur 10 travaillent hors de leur commune de résidence.
Les candidats en lice
-Yves Blein, député sortant, candidat pour Ensemble, majorité présidentielle, élu en 2012 sous l'étiquette socialiste. Pour lui le chômage est une question centrale sur ce territoire.
-Damien Monchau, candidat pour le Rassemblement National, policier de profession. Pour lui, il y a quelque chose de noble à vouloir représenter toutes les idées au sein d'un secteur même celui qui lui défavorable.
-Bruno Attal, candidat pour Reconquête, policier de profession, originaire de Paris. Il a travaillé à Vénissieux il y a 20 ans, il estime que cette circonscription s'est islamisée.
8 autres candidats se présentent également pour ce siège de député mais sont absents de ce débat.
- Idir Boumertit, le candidat de la Nouvelle Union Populaire Ecologique et sociale membre de la France Insoumise a décliné l'invitation à participer au débat. Il explique que sa "stratégie de campagne est centrée sur la rencontre, sur le terrain avec les électeurs ». Il estime que « les intentions de certains candidats sont anti-démocratiques en vérité, venus uniquement pour détériorer l'image de la politique et abaisser le niveau du débat public. Je ne veux pas contribuer à une telle entreprise ».
Un refus que déplore France 3 et le Progrès car il n'y a aucune volonté "d'abaisser le niveau du débat" dans l'organisation de celui-ci.
D'autant, comme le souligne Laurence Loison, que c'est sur cette circonscription que la France Insoumise avait investit en premier lieu Taha Bouhafs qui avait retiré sa candidature au profit d'Idir Boumertit. L'absence de ce dernier prive la gauche de toute parole.
-Yalcin AYVALI Divers Gauche
-Martin EGRON souverainiste
-Mokrane KESSI Divers centre
-Olivier MINOUX Lutte Ouvrière
-Farid OMEIR Union Des Musulmans de France
-Delphine PALLUY Ecologiste
-Camila SALMI Ecologiste
Éducation, sécurité, environnement : les enjeux du débat
- Contexte politique
Lors de la présidentielle, Jean-Luc Mélenchon réalise un excellent score dans cette circonscription. Il obtient 2 fois plus de voix qu'Emmanuel Macron, soit 20 000 contre 10 000.
En 2017, la gauche désunie n'avait pas atteint le second tour. Cette année, la gauche est unie, mais cette union s'est faite dans la douleur. Il n'y a certes pas de dissidence mais la maire communiste Michele Picard a exprimé la difficulté que cela a été pour elle de renoncer à sa candidature.
Selon les scrutins exprimés lors de la présidentielle, la gauche a un boulevard devant elle, mais elle devra se méfier de l'abstention car c'est un territoire où l'on vote moins qu'ailleurs.
Le député sortant Yves Blein élu depuis 10 ans, bénéficie de l'absence de candidat à droite. Un report de voix de la droite et du centre est probable sur l'étiquette Renaissance, pour la majorité présidentielle.
- L'affaire Taha Bouhafs
Taha Bouhafs est un journaliste militant, c'est notamment lui qui avait filmé Alexandre Benalla en train d'agir violemment contre des manifestants à Paris.
Il a été condamné pour injure publique en raison de l'origine.
Son parachutage a suscité de nombreuses polémiques et il a finalement renoncer à se présenter après avoir été accusé d'agression sexuelle au sein même de la France Insoumise.
- Double candidature à l'extrême droite
Pour Damien Monchau, "il n'y avait pas de candidature unique en 2017, il y avait d'autres candidatures, les LR... cette fois, les LR sont absents et je me retrouve avec un nouveau parti, Reconquête!, on remplace un opposant par un autre. Cela ne change rien pour moi."
Bruno Attal explique s'être présenté "car il fallait un policier à Vénissieux" pourtant l'autre candidat d'extrême droite est aussi policier. "Si je suis là, c'est pour représenter le parti Reconquête! mais aussi pour expliquer aux électeurs du RN qu'il n'y a qu'avec l'union des droites qu'on arrivera au pouvoir."
Voir le replay du débat de la 14e circonscription du Rhône
- La sécurité
Même la maire de Vénissieux le dit, dans certains quartiers, les habitants vivent dans la peur. Certains lieux sont gangrénés par un trafic de drogue, de moins en moins "discret". Des règlements de comptes mortels et les rodéos urbains ont accentué un climat déjà anxiogène.
Des renforts policiers ont été envoyés et pourtant aucune amélioration n'est notable.
"Aujourd'hui vous pouvez mettre autant de policiers que vous voulez, il n'y a plus de respect. La justice avec M. Dupond-Moretti, ne fait plus son travail." Bruno Attal, Reconquête !
"Si on veut régler le problème d'une manière pérenne, (mettre des policiers supplémentaires) ce n'est pas suffisant, si la justice ne suit pas par défaut de moyen." "Cela fait des décennies que le nombre de magistrats n'a pas changé. Actuellement, il y a 10 000 magistrats, ce n'est pas suffisant." Damien Monchau pour le RN.
"La tranquillité publique, c'est un faisceaux d'acteurs qui travaillent (...)une des difficultés aujourd'hui, c'est la sanction de la petite délinquance et le sentiment d'impunités qui est donné car certains sont arrêtés puis relâchés ainsi de suite." Yves Blein pour Ensemble.
Le candidat du RN plaide pour le retour des peines planchers, celui d'Ensemble souhaite l'établissement d'un maillon judiciaire de proximité.
"M. Blein est hors sol (...) ce sont des gens qui ne savent pas ce qu'il se passe, qui ne font pas de lien entre immigration et insécurité." Bruno Attal pour Reconquête!
Damien Monchau estime qu'avant de proposer une police de proximité pour faire de la prévention, il faut s'interroger sur les origines de la délinquance. Si pour certains la pauvreté engendre la délinquance, lui considère que c'est faux, " les coins les pauvres de France c'est la campagne (NDLR par opposition aux zones très urbanisées) pour moi la source de la délinquance , c'est que l'on ne se sente pas membre de la communauté nationale, et l'école doit jouer un rôle dans ce sentiment d'appartenance."
Défense excusable: Cette notion est défendue par le parti d'Eric Zemmour, il s'agit d'une possibilité ouverte aux policiers et aux citoyens. En cas d'agression et de défense disproportionnée, le juge pourra "excuser" les conséquences de cette défense en tenant compte de la peur, du stress de la personne qui a dû se défendre.
Présomption de légitime défense: cette disposition s'adresse aux policiers, elle inverse la charge de la preuve. On ne part pas du principe que le policiers aurait forcément mal agit, c'est à la justice de montrer que les conditions de légitime défense n'étaient pas remplies.
- L’éducation
Mixité sociale, égalité des chances, dans certains quartiers il y a des classes très "ghettoïsées". Dans cette circonscription, les habitants sont moins diplômés qu'ailleurs et occupent des postes d'ouvriers et employés.
La part des couples avec enfant(s) est située au-dessus de la moyenne de notre pays, donc une population concernée par la question.
Blouse, certificat d'étude et surveillants généraux : Pour Bruno Attal, de Reconquête! ces mesures ont fait leur preuve. " L'école doit apprendre les fondamentaux, lire, écrire, compter, plutôt que de faire rentrer des gens comme Assa Traoré ou des groupes LGBT qui vont expliquer la théorie du genre à nos gamins".
Plus d'enseignants et d'équipements sportifs : Pour Yves Blein, d'Ensemble, il est nécessaire de renforcer à côté de l'école, les activités socio-éducatives telles que le sport. "Le temps d'enseignement est passé en 50 ans de 1200 à 800 heures. On a libéré un temps important pour les enfants et dans les milieux où on a de la difficulté à accompagner les gamins dans le devoirs, on a libéré du temps pour de l'oisiveté."
Revaloriser les salaires : Pour Damien Monchau, du RN, l'école est vitale pour la république. "Augmenter le nombre d'heures d'apprentissage de cours, c'est nécessaire. Se concentrer sur les fondamentaux, c'est nécessaire. Mais au delà de cela il y a des problèmes d'insécurité".
- Environnement
La circonscription est située au cœur de la vallée de la chimie. Le mot environnement fait écho au mot pollution, celle de la route et autoroute celle de l'industrie chimique.
Dans ce territoire, nombreuses sont les passoires thermiques habitées par des ménages aux revenus modestes, qui ont du mal à les rénover.
Avec la ZFE, zone à faibles émissions, qui rentre en vigueur en septembre, pas moins de 1200 voitures en crit'air 5 qui ne pourront plus rentrer dans la métropole.
Le sujet est à la fois urgent et épineux.
Pour Yves Blein, l'économie va de paire avec l'emploi, "c'est la réponse à la pauvreté", à terme selon le candidat pour la Majorité présidentielle, "la question de l'existence même de la raffinerie de Feyzin se posera car si on ne veut plus consommer d'énergie carbonée, on n'en produira plus."
ZFE zone de forte exclusion : Du côté de l'extrême droite la "ZFE est un cadeau fait aux écolos qui haïssent la voiture et pénalisent les petites gens. La classe moyenne n'a pas les moyens de vivre en centre ville." Le candidat du RN défend le moteur à hydrogène et l'énergie nucléaire.
Pour Bruno Attal, "Je suis contre cette écologie punitive, qui punit les petites gens."
