L’effet négatif de l’arrêt d’une part importante de l’activité et de la mise en place des mesures sanitaires se fait déjà sentir. Le président de la Confédération des petites et moyennes entreprises lance un appel à devenir "des soignants de notre économie régionale."
A Miribel, dans l’Ain, l’entreprise Valentin, spécialisée dans le BTP, n’a pas d’autre alternative. Pour compenser les retards et les pertes liées à la période de confinement, il faut envisager de maintenir les chantiers cet été. Habituellement, elle fermait durant les trois premières semaines d’août. Cette année, il va falloir modifier les habitudes, avec le concours des salariés, «sur la base du volontariat» précise le président Philippe Valentin «Quand on ne travaille pas, on ne facture pas, et on ne fait pas rentrer d’argent. Donc c’est pour remettre en marche l’entreprise». Les ouvriers mobilisés recevront une prime, prendront leurs vacances plus tard. C’est tout le secteur du bâtiment qui doit ainsi se réorganiser.
Devenir les soignants de notre économie
A la Confédération des petites et moyennes entreprises d’Auvergne Rhône-Alpes, on se félicite de ce type d’initiative. Et on espère d’avantage : la CPME a demandé au gouvernement de «rendre possible pour les TPE/PME la mise en œuvre du dispositif de prise de congés payés sur décision unilatérale de l’employeur». Une demande qui, crise exceptionnelle, contraindrait le personnel, ce qui est contraire au droit actuel du travail.
«Ce serait tout de même avec une discussion» tempère François Turcas, président de la CPME Auvergne Rhône Alpes. «Vous savez, dans une PME, si vous n’avez pas un dialogue social avec vos collaborateurs, vous n’obtenez rien. Une récente étude a montré que 80% des collaborateurs aiment leur entreprise. Donc, à l’instar de nos soignants qui ont été courageux et ont fait preuve d’humilité, il va falloir que nous devenions nous-même les soignants de l’économie. Tout le monde l’a compris et jouera le jeu».
Des aides déjà obtenues
La Confédération des Petites et moyennes entreprises a multiplié les demandes d’aides au gouvernement. Et en a obtenu un certain nombre :
• Lancement d’un Fonds de solidarité (FDS) pour aider les plus petites entreprises en leur attribuant une somme de 1500€, à laquelle vient éventuellement s’ajouter jusqu’à 5 000€
• Assouplissement en matière de déclaration de TVA
• Report de la déclaration de résultats en matière fiscale
• Possibilité d’obtenir un prêt bancaire garanti par l’Etat (PGE) à hauteur de 90% du montant emprunté, et ce dans la limite de 3 mois de CA
• Report du paiement des cotisations sociales et fiscales sur simple demande
• Mise en place d’une avance de trésorerie remboursable pour aider les PME à redémarrer leur activité
• Remboursement à l’employeur par l’Etat de 100% de l’avance d’activité partielle, dans la limite de 4,5 SMIC et déplafonnement du nombre d’heures éligibles
• Amélioration de l’accès à la plateforme de déclaration du dispositif de l’activité partielle
• Création d’aides spécifiques pour les travailleurs indépendants via le fonds d’action sociale du CPSTI
• Obtention d’une « indemnité de perte de gains » plafonnée à 1250 €, correspondant à un an de cotisations individuelles au régime de retraite complémentaire des indépendants (RCI) pour les artisans et commerçants
• Action conjointe de la Fédération des Marchés de France et de la CPME ayant permis la réouverture, par autorisation préfectorale, des marchés de plein air
• Possibilité pour les TPE/PME éligibles au Fonds de solidarité d’obtenir, sous condition, un report du paiement des loyers, des factures d’eau, de gaz et d’électricité.
Un prêt régional échelonné sur 7 ans
Mais ces aides ne rattraperont pas l’ensemble des difficultés provoquées par la période sanitaire. Le confinement et les nouvelles exigences de sécurité ont forcément impactés les entreprises de notre région. En Auvergne-Rhône-Alpes, la Région a créé un prêt supplémentaire (d’une durée de 7 ans dont 2 ans de différé d’amortissement en capital) en partenariat avec la BPI d’un prêt à taux zéro d’un montant pouvant aller de dix mille à cent mille euros. «Il comprend en effet un différé de deux ans avant de commencer les remboursements » explique François Turcas «Quand un chef d’entreprise n’a plus de commandes, comment voulez-vous que cet individu, qui a investi tout son savoir-faire et son argent en se portant caution pour son entreprise, puisse s’en sortir ? Nous avons évidemment un problème. On sait déjà qu’au moins 30% de nos entreprises régionales seront impactées. Ces prêts nous apportent un peu d’oxygène, mais il faudra les rembourser à un moment ou un autre. Il faut donc s’organiser pour que la commande publique reparte dès le mois de juillet».
Apprendre à gérer la crise
Pour affronter cette période très compliquée, un accent a été mis sur l’accompagnement des chefs d’entreprises avec un plan d’actions de formation/accompagnement «flash» gratuites pour les dirigeants de PME car totalement prises en charge par la Région en matière de gestion financière en période de crise (exemples : réaliser mon prévisionnel de trésorerie ou accéder aux différents outils de financement pour faire face à la crise). «Il n’est pas facile d’affronter cette crise. Le moral en prend un coup. Il faut avoir du recul. Il est non seulement important de pouvoir faire des restrictions sur tous les postes de dépenses, mais aussi trouver des pistes de développement. Pendant toute la durée du confinement, nos conférences par internet ont été très importantes».
La CPME lance un appel aux salariés
Pour aider ces entreprises, la CPME continue de négocier avec l’Etat sur différents points :
• Inciter les préfets à accepter les demandes de dérogations d’ouverture de marchés de plein air
• Améliorer l’accessibilité et la transparence des mécanismes de financement du prêt garanti par l’Etat (PGE) et du Fonds de solidarité : problème de seuils, complexité des documents à fournir, coûts à prévoir, différés de remboursement…
• Elargir le report ou l’exonération ponctuelle de loyers commerciaux sans léser les bailleurs indépendants
• Permettre de décaler ou d’annuler tous les impôts (TVA, etc.). A ce stade, les mesures fiscales exceptionnelles ne portent que sur les impôts directs.
• Examiner la possibilité de transformer les reports en annulations de charges sociales
• Instaurer un dispositif faisant en sorte de couvrir financièrement tout ou partie des pertes d’exploitation des TPE-PME assurées pour ce risque
• Clarifier la responsabilité de l’employeur sur le risque d’exposition au Covid-19 en réaffirmant l’absence d’obligation de résultats impossible à garantir.
Un ensemble d’actions et de demandes qui procure un optimisme mesuré à son président régional : «Je suis très optimiste mais il va falloir se remonter les manches. Et il va falloir que les salariés le comprennent. Je fais donc un appel au bon vouloir et au courage de nos collaborateurs» ajoute-t-il.