A Lyon, une association d’anciens casques bleus est en train de monter un convoi humanitaire exceptionnel. Elle compte s’appuyer sur son réseau d’anciens soldats de la paix pour acheminer les dons jusqu’en Ukraine.
Jules dépose le 198ème carton dans le camion. C’est un convoi humanitaire exceptionnel que prépare l’AISP, l’association internationale des soldats de la Paix. Trois fourgons remplies de produits de premières nécessités, de nourriture et de matériel médical. « Et nous avons utilisé des couches pour compléter les espaces vides entre les cartons, c‘est très pratique », sourit le jeune homme de 21 ans.
Un convoi exceptionnel
Dans l’entrepôt de l’association, on ne chôme pas depuis le début du conflit en Ukraine. Chaque jour entre 10 et 12 personnes, salariées ou bénévoles, trient les nombreux dons faits par les entreprises et les particuliers. « Nous ne sommes pas pressés, le conflit est parti pour durer, et il va falloir étaler l’aide humanitaire de toutes façons », explique Laurent Attar-Bayrou.
C’est lui qui a fondé l’AISP, à Lyon, en 1988. Il est aujourd’hui à la tête d’un immense réseau d’anciens casques bleus. 100 000 ex soldats, répartis sur tout le territoire européen. « On a voulu regrouper, à l’époque, tous les anciens casques bleus dans le monde pour pouvoir continuer nos opérations dans le civil, détachées de tout gouvernement », raconte l’ancien militaire. Une force d’action qu’il était tentant de mobiliser pour intervenir en Ukraine et « construire une paix durable ».
Mais l’opération est couteuse. Plus de 5000 euros, entre l’essence, les frais de péage ou de nourriture des bénévoles. L’association a donc lancé un appel aux dons. Auquel ont répondu de nombreuses collectivités locales, comme les villes d’Oullins ou de Rillieux-la-Pape, ou encore des entreprises privées. « On nous fait confiance », souffle Laurent Attar-Bayrou.
L’expérience des casques bleus
Car l’ONG est habituée à monter des convois humanitaires. « On a fait beaucoup d’opération en Bosnie par exemple, on a acquis un savoir-faire », ajoute-t-il. « On sait faire, on est des militaires et on a ce recul pour pouvoir appréhender le danger ».
Et pour organiser le convoi, l’association « a mobilisé toutes ses troupes sur les frontières en Europe », assure l’ancien militaire. La semaine prochaine, les camions chargés à blocs, un petit groupe de bénévole prendra donc la direction de l’Ukraine.
Si l’itinéraire est bien ficelé, la destination finale est donc encore incertaine. Hongrie, Roumanie, Slovaquie, Pologne, avant de passer la frontière. A l’origine, le convoi visait Karkhiv. « Mais nos contacts sur place nous ont dissuadé, la situation est trop instable », reconnaît Jules, qui s’est déjà porté volontaire pour partir.
Et c’est l’avantage de l’association. Un réseau d’anciens soldats de la paix qui lui permet de connaître la situation sur le terrain, en temps réel. « Nous sommes en lien quotidien avec nos contacts sur place par des boucles internet ou par whats’app, comme ça ils ne se font pas repérer par les Russes », précise Laurent Attar-Bayrou.
« L’autre plus-value que l’on a, c’est de pouvoir et de savoir discuter avec des militaires, de savoir comment réagir », ajoute-t-il. En plus de jouir d’une reconnaissance diplomatique internationale : « les casques bleus inspirent le respect, des valeurs liées à la paix, liées à l’humanitaire, cela peut nous aider sur place ».
Une mission qui ne devrait pas s’arrêter aux convois. L’association aimerait pouvoir ramener des réfugiés. « Mais il est délicat de ressortir avec des ressortissants ukrainiens en ce moment », explique Jules. Le convoi est censé prendre la route la semaine dans une dizaine de jours.