Ce mardi 23 février doit commencer le procès de deux policiers accusés d'avoir agressé Arthur Naciri, en marge d'une manifestation contre la réforme des retraites. Pour le Comité contre les violences policières, la hiérarchie policière a "fait obstacle" à la procédure judiciaire.
Le procès d'une bavure policière ? Ce mardi 23 février, le tribunal correctionnel de Lyon doit étudier le cas d'Arthur Naciri, lourdement blessé en marge d'une manifestation contre la réforme des retraites en décembre 2019. Au terme de l'enquête, deux policiers ont été identifiés et accusés d'avoir participé aux violences à son encontre. Mais pour le Comité contre les violences policières, la hiérarchie policière a "fait obstacle" à la procédure judiciaire.
Sous les yeux des témoins
Le 10 décembre 2019, place Bellecour à Lyon. Ce jour de manifestation contre la réforme des retraites, selon son récit, Arthur est en train d’applaudir les manifestants juste devant un cordon de policiers quand il est soudain attrapé par un policier qui le projette sur ses collègues. En neuf secondes, il est bousculé, jeté au sol et roué de coups. Lorsqu’il se relève, il a la mâchoire et 9 dents brisées. La scène, en partie filmée et photographiée, se déroule sous les yeux de nombreux témoins, dont une dizaine de policiers, y compris des cadres des forces de l'ordre. "Aux abords immédiats de la scène, pas moins de quatre cadres policiers étaient présents. Les deux commandants de la BAC étaient situés juste à côté de l’agression. Un commandant, chef d’unité, a assisté directement aux faits puisque Arthur a été littéralement projeté sur lui. Un commissaire divisionnaire, directeur du service d’ordre de la manifestation ce jour-là, a recueilli le témoignage d’Arthur – le visage ensanglanté, et moins d’une minute après les faits, alors qu’il mettait en cause les policiers présents juste derrière, affirme le Comité de lutte contre les violences policières, qui a réalisé ses propres investigations.
"Faire obstacle" à toute enquête
Pourtant, selon le Comité, seule la diffusion d'images et de témoignages dans les médias permet que le parquet soit informé et ouvre une enquête. "La DDSP n’a rien engagé ni rien dit pendant 24 heures, faisant obstacle à l’ouverture d’une enquête," expliquent les membres du comité. Sur le PV de contexte que le Comité annonce avoir récupéré, un rapport des policiers indique : "A 14h38, un individu blessé place Antonin Poncet (dents cassées). Origine des blessures ignorée." Une formulation qui viserait, pour les membres du Comité contre les violences policières, à faire "obstacle" à l'ouverture d'une enquête. Contactés, la DDSP et les responsables syndicaux policiers n'ont pas souhaité faire de commentaires, ne souhaitant pas "entraver le déroulement du procès. C'est normalement l'IGPN, la police des polices, qui a enquêté sur l'affaire, et qui dispose de ces éléments", ajoute un représentant syndical. Reste que pour le Comité, la présence avérée de 4 chefs de la police lyonnaise sur place, sans remontée d'information, indique que la DDSP a "couvert les faits". Pour le groupe, l'affaire est symptomatique d'une "omerta" au sein des forces de l'ordre et de leur hiérarchie lors de suspicions de violences policières.
Le Comité contre les violences policières révèle par ailleurs, suite à ses investigations, qu'au moins une enquête par semaine pour "violences policières" aurait été déclenchée à Lyon "sur une période d’un peu moins de trois ans", dont une large partie relevant de tirs de LBD pendant des manifestations. Ces informations n'ont pas pu être confirmées à ce stade par les autorités.