"On est sur un traitement industriel des élèves" : grève contre des classes bondées dans des lycées de banlieue à Lyon

Trois lycées de Vénissieux, Vaulx-en-Velin et Villeurbanne sont en grève ce mardi 26 septembre. Les enseignants dénoncent des classes surchargées et un manque d'effectifs pour accueillir les élèves dans leurs établissements.

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"Comment voulez-vous que j'enseigne dans de bonnes conditions avec 37 élèves ?" s'interroge Hugo Dorgere, professeur d'anglais au lycée Doisneau de Vaulx-en-Velin. Depuis cinq ans, cet enseignant constate l'augmentation des effectifs à tous les niveaux de classe et particulièrement dans les séries technologies de son lycée.

Avec d'autres enseignants des lycées Jacques Brel de Vénissieux et le lycée Faÿs de Villeurbanne, ils ont manifesté devant le rectorat de Lyon avant d'être reçus en audience cet après-midi.

Des miettes

"Nous sommes face à des situations différentes pour ces trois établissements, mais concernant le lycée Doisneau, nous avons accordé une dotation horaire supérieure aux classes supérieures à 35 élèves de terminale ST2S pour leur permettre de passer de 30h à 8h en classe entière et celle de STMG n'aura que 13h en classe entière", explique Jérôme Bourne Branchu, directeur académique des services de l'Éducation nationale du Rhône.

Les enseignements de spécialité accueillent en effet des classes dédoublées, mais cela n'est pas le cas pour le reste des matières. L'anglais notamment.

Cette annonce semble donc insuffisante et la déception est grande chez les enseignants qui déplorent la "surdité du rectorat". "On nous parle 'd'enveloppe contrainte', qu'ils ne peuvent pas accorder des crédits infinis. Or, il faut une volonté politique pour aider nos établissements qui en ont besoin au lieu de nous donner des miettes", se désespère Hugo Dorgere, enseignant à Doisneau.

Si les dédoublements de classes restent insuffisants, pourquoi ne pas créer de classe supplémentaire ? "Il est complexe de créer une classe à la rentrée et d'anticiper car cela dépend aussi du taux de réussite des élèves au baccalauréat et la réorganisation n'est pas évidente", estime de son côté Jérôme Bourne Branchu. Sans compter les professeurs, qui manquent à l'appel.

Ma classe va craquer

Une situation intenable pour les professeurs alors que le public du lycée n'a pas les mêmes facilités scolaires que celui d'un établissement du centre-ville. "Je n'ai pas le temps d'aider les élèves en difficulté ni de m'intéresser à chaque profil individuellement", déplore Hugo Dorgere. Impossible de donner cours dans ces conditions, surtout si certains élèves se montrent plus difficiles : "je ne suis pas satisfait de mes cours, mais à certains moments cela devient cauchemardesque". Comme ce premier jour de rentrée, signe annonciateur, où la salle allouée pour son cours n'était pas en mesure d'accueillir les 37 élèves sous sa responsabilité. Le professeur est écœuré : "Le rectorat nous parle de politiques ambitieuses, mais la réalité du terrain est tout autre, on est sur un traitement industriel des élèves".

En classe de seconde, les effectifs seraient limités à 25 élèves, mais des étudiants ont finalement été rajoutés au fur et à mesure. "On nous a promis un professeur devant chaque classe, mais il faut voir la classe aussi", ironise Hugo Dorgere.

La refonte de la carte d'éducation prioritaire appliquée en 2015 a signé la fin des "zones d'éducation prioritaire" (ZEP) et les lycées ne sont plus intégrés dans le réseau d'éducation prioritaire. Seuls les écoles primaires et les collèges sont concernés avec 730 collèges en REP et 364 en REP+.

Pourtant, "les problèmes ne disparaissent pas magiquement de la troisième à la seconde", mettent en évidence les enseignants des lycées Doisneau et Brel. La carte se base sur des indices socio-économiques des parents d'élèves. Un classement en REP permet de compter sur des classes de 25 élèves maximum et de bénéficier d'un soutien scolaire spécifique.

"Les élèves présentent des enjeux éducatifs importants et les enseignants sont légitimement préoccupés par leur accueil. Ces établissements sont spécifiquement accompagnés et il y a un apport de moyens pour ces lycées qui passe entre autres par les heures complémentaires pour permettre aux établissements de dédoubler des classes", assure Jérôme Bourne Branchu.

Pénurie de remplaçants

Mêmes problèmes et mêmes alertes au lycée Faÿs de Villeurbanne. "Il manque encore un enseignant-e en management / mercatique, 1 enseignant-e en philosophie, et 1 enseignant-e en lettres-histoire. À cela s’ajoutent des moyens humains qui demeurent insuffisants en vie scolaire.", peut-on lire dans un communiqué.

Au téléphone, Coline Wiatrowski, professeure de mathématiques à Faÿs confirme de nombreuses absences jamais remplacées, faute de titulaires affectés et de contractuels, particulièrement dans les classes de terminale, à quelques mois du baccalauréat.

Elle souligne la même impossibilité d'accompagnement individuel des lycéens qui auraient pourtant besoin de plus d'attention. "Nous sommes sortis de la carte d'éducation prioritaire, mais nous voulons une politique ambitieuse avec des seuils d'élèves par classe. Or, non seulement cela ne nous est pas accordé, mais en plus, nos classes dépassent largement le niveau classique de 35 élèves !", s'indigne Coline Wiatrowski.

Des alertes au rectorat ont été faites, mais sont restées sans réponse. Résultat, faute de places disponibles, des élèves redoublant ont dû changer de spécialité pour rester dans le lycée Faÿs. D'autres passeront leur baccalauréat ailleurs.

Le lycée Faÿs propose un enseignement général et technologique, mais également un parcours professionnel en chaudronnerie. Mais, il n'existe qu'un poste et demi d'infirmière, qui n'est pas totalement occupé. "Deux infirmières ne seraient pas de trop, en plus nous avons un internat", ajoute l'enseignante.

À ce sujet, des remplacements seraient en cours selon le rectorat.

Les équipes scolaires mobilisées ce 26 septembre annoncent vouloir donner suite à leur mouvement de grève, certainement en début d'année prochaine. 

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