Vendredi 27 octobre 2023 se tenait devant le tribunal de Villefranche-sur-Saône, le procès du conducteur qui a mortellement renversé Jordan le 3 mai dernier. Le jeune homme circulait en scooter quand un camion toupie lui a coupé la route en franchissant une ligne blanche. À la barre, les parents de la victime sont revenus sur le drame.
Jordan allait avoir 19 ans, il rentrait chez lui en scooter ce mercredi 3 mai quand un camion toupie lui coupe la route à Villefranche-sur-Saône et lui ôte la vie.
Devant le tribunal correctionnel de Villefranche-sur-Saône, vendredi 27 octobre, les parents du jeune homme ont dû relater les faits, décrire ce qu'est devenue leur vie depuis l'accident et écouter les excuses maladroites du chauffeur.
Inacceptable
Après avoir entendu le chauffeur qui a tué leur fils et leurs avocats respectifs, les parents de Jordan se sont exprimés au procès. "Les juges, la procureure nous ont écoutés et les réquisitions de la procureure ont été suivies à la lettre. Ça ne nous rendra pas notre fils, mais c'est déjà ça d'avoir été écouté", dit Ludovic Desarzens, le papa de Jordan.
"Ma femme avait beaucoup de mal à s'exprimer, elle pleurait surtout. Inacceptable, c'est ce qu'elle a dit", poursuit-il. "Notre vie, il (le conducteur) nous l'a enlevée, il a voulu gagner cinq minutes pour faire le plein d'essence, éviter un rond-point et a coupé une ligne blanche et il a gâché notre vie, comme l'a souligné la procureure."
On ne s'en remet pas, on ne s'en remettra jamais.
Ludovic DesarzensPapa de Jordan
"Aujourd'hui, avec ma femme, nous sommes encore dans la colère. La route est un danger pour tout le monde, c'est ce que l'on voulait dire au procès." Sa voix tremble, son effort pour contenir ses larmes est palpable. Il reprend, "vous savez, c'est une des choses les plus difficiles qui soient de voir partir son enfant avant soi."
Soutenus par des associations
S'ils se tiennent debout au procès, c'est pour décrire qui était leur fils. Ensemble, ils conviennent que l'aide qu'ils ont reçue des associations (France victime 66, France victime 69 et Collectif justice pour les victimes de la route), est inestimable. "Les associations nous ont aidés au soutien moral, psychologique, c'est un espace d'échange avec d'autres personnes qui ont perdu des enfants dans les mêmes circonstances. On arrive à se comprendre, car on a tous eu des réflexions, comme heureusement il vous reste deux autres enfants !"
Des phrases qui ne se voulaient pas méchantes, concède-t-il, mais qui résonnent avec une indélicatesse monstrueuse en plein deuil.
"Dans les groupes de parole, on est tous pareils, blessés par l'indifférence. Pour beaucoup de gens, un accident, c'est un fait divers et ils ne voient pas le drame que c'est pour la famille."
Leur fils est enterré à Argeles-sur-mer, où vivent désormais les parents de Jordan, avec leur fils aîné, 24 ans, et la petite sœur de Jordan, 14 ans, tous les deux ont aussi "été démolis par l'accident."
À lire aussi : "Je ne peux plus supporter de vivre près du lieu où mon fils a trouvé la mort", témoigne le père de Jordan, fauché par un camion
"Ce jour-là, nous avons tout perdu, car ce monsieur, le chauffeur, pourra refaire sa vie, avoir des enfants... Nous, c'est fini, on ne peut pas remplacer notre enfant. Sa peine ne pourra jamais effacer notre peine".
"Avec ma femme, c'est l'année de nos 50 ans, cela aurait dû être nos meilleures années, on a élevé nos enfants, ils sont grands et là, ce ne sera pas le cas,"conclut-il.
Aussi simple que tragique
Aussi simple que tragique, c'est en ces termes que la procureure qualifie le comportement du chauffeur et ses conséquences.
L'homme âgé d'une trentaine d'années a tenté un "je m'excuse, j'ai fait une bêtise", repris par l'avocat des parents de Jordan, Maître Kamel Aissaoui, "Non, Monsieur, une bêtise, c'est quand on vole des bonbons, là oui, on peut s'excuser."
Le chauffard écope de 18 mois de prison avec sursis, une mise à l'épreuve de cinq ans durant lesquels aucun délit routier ne devra être commis, un retrait de permis d'un an avant de pouvoir le passer de nouveau.
Depuis l’obtention de son permis poids lourd en 2013, l'homme n’avait jamais eu d’accidents, ni de contrôles d'alcoolémie ou stupéfiant positifs. Sa conduite était jusqu'alors sans faute, des éléments qui ont joué en sa faveur.
À l'audience, le chauffeur l'assure, il souhaite changer de métier, ne plus être derrière un volant.
Le 2 juillet 2024, un autre procès aura lieu, les parents de Jordan ne seront pas tenus d'y assister. L'audience devra statuer sur le montant de l’indemnisation des parties civiles pour "réparer" le préjudice.