A trois jours du 1er tour des élections législatives, des documents sèment le trouble sur les pratiques fiscales de Bruno Bonnell, le candidat La République en marche de la 6e circonsription du Rhône. Le candidat répond point par point à notre rédaction.
C'est bien connu, à l'approche des élections, tous les coups sont permis. A quelques jours du 1er tour des législatives, des documents ont "fuité" et été adressés à différentes rédactions. Ils mettent en cause des pratiques d'optimisation fiscale du candidat La République en marche de la 6e circonscription du Rhône, Bruno Bonnell.
Ces documents ont été relayés par le parti "La France insoumise". Il s'agit d'extraits d’un arrêt de 2009 de la Cour d’appel de Lyon, produits dans le cadre du divorce de Bruno Bonnell et de son épouse. Le candidat En Marche, ancien directeur de la société Infogrames, avait dû justifier, pendant la procédure, de sa situation patrimoniale et de ses revenus.
Dans ces documents, on découvre que le candidat n'est pas accusé de fraude fiscale, mais a procédé à des opérations d'optimisation troublantes. Nous avons demandé au candidat et à son contradicteur Laurent Legendre, de La France insoumise, de répondre point par point.
Deux sociétés enregistrées dans le Delaware
En 2007, Bruno Bonnell a domicilié la société "BB26" dans le Delaware. Cet état, sur le territoire américain, ne figure pas dans la liste de l'OCDE des paradis fiscaux. Il n'en est pas moins célèbre pour sa taxation pratiquement inexistante.« La société BB26 a été créée dans le Delaware car je comptais y établir la base américaine de mes activités de jeux en ligne », explique l'entrepreneur. «Les aléas de la vie m’ayant forcé à revenir en France en août 2007, cette société est en sommeil depuis». Il rappelle par ailleurs que la majorité des entreprises de la "tech" aux Etats-Unis s'établissent dans le Delaware.
Une autre société, "Navya", a été enregistrée dans le Delaware, pour «protéger la marque», filiale américaine de la marque du même nom en France.
De son côté, Laurent Legendre dénonce : «on ne l'accuse pas de fraude, on voulait montrer que ce candidat appartient à un système financier qu'il faut encadrer».
La réponse de Bruno Bonnell sur ses activités à ses actifs dans le Delaware :
La réaction de Laurent Legendre, le candidat de la France insoumise, sur le Delaware :
Pas d'impôts sur le revenu en 2008 et 2009
Après son départ d'Infogrames en 2007, il s'acquitte de l'impôt sur le revenu à hauteur de près de 800 000 euros. Mais il n'est pas imposé sur les revenus de 2008 et 2009. Il indique que les 800 000 euros comprenaient une anticipation des impôts ultérieurs.
Par ailleurs, actionnaire d'Infogrames, dont le cours boursier avait chuté, Bruno Bonnell affirme n'avoir perçu que très peu de revenus pour les années 2007, 2008 et 2009, et n'avoir subsisté qu'avec ses indemnités de départ. «Si je n’ai pas payé d’impôt sur le revenu en 2008 et 2009 c’est que, comme la loi l’impose, la pension alimentaire versée à mon ex-femme est incluse dans ma déclaration des revenus et prise en compte pour le calcul de cet impôt».
Alors qu'il se retrouve fortement endetté, son ex-femme le soupçonne d'avoir organisé une forme d'insolvabilité pour ne plus être en mesure de lui verser une pension alimentaire. Mais sa dette ne l'empêche pas de détenir un patrimoine immobilier important, et de percevoir des revenus variés. Les magistrats de la cour d'appel pointent «un train de vie absolument sans rapport avec ses ressources avouées» .
La réaction de Laurent Legendre sur l'optimisation fiscale :
La réaction de Bruno Bonnell sur les accusations d'optimisation fiscale :
Une sanction de l'AMF en 2008
Enfin, les documents exhumés des archives judiciaires rappellent un épisode trouble des opérations boursières passées du candidat En Marche.Infogrames, dont Bruno Bonnell est alors le dirigeant, a fait l'objet d'une sanction de l'Autorité des Marchés Financiers en 2008. Elle l'accusait d'avoir fait varier le cours de l'action Infogrames en achetant et en vendant des titres opportunément, sans en informer correctement le marché. La société Infogrames a dû s'acquitter d'une sanction financière de 40 000 euros. Une peine finalement mesurée, car le montant des opérations financière concernées a été reconnu comme «quantitativement très faible».
Des « méthodes sournoises » avant l'élection
La fuite de ces documents, livrés par le candidat de La France insoumise à la presse à quelques jours des législatives, agite la campagne à Villeurbanne.La candidate PS de la 6e circonscription du Rhône, Najat Vallaud-Belkacem, appelle le candidat de La République en marche « à faire toute la lumière sur sa situation. Les électrices et les électeurs ont le droit de savoir ».
Le candidat La république en marche a qualifié ces fuites organisées de « méthodes sournoises, qui déforment la vérité et insinuent des accusations (...) indignes». Il rappelle avoir fait l'objet d'un contrôle constant de l'administration fiscale, qui n'a détecté aucune fraude fiscale le concernant. «Une succession de contrôles fiscaux approfondis ont été effectués au cours de ces années. Ni les juges, ni les inspecteurs en charge de mes dossiers, n’ont trouvé au cours de leurs investigations d’éléments qui constitueraient des dissimulations».