A la veille de la mass-start qui clôturera la saison, Julia Simon s'est assurée la couronne mondiale. La Savoyarde a terminé 5e du sprint d'Holmenkollen, devant ses rivales au classement général. Elle remporte donc le gros globe de cristal, 18 ans après Sandrine Bailly.
C'est une performance qu'elle aura construite tout l'hiver, à coups de cibles blanchies avec une incroyable régularité sur son tir couché : 93% de réussite sur l'ensemble de la saison.
Et ce samedi, lors du sprint d'Oslo, elle a renouvelé ce sans-faute au couché, mais a laissé échappé une balle sur le tir debout. Ce 9/10 a donc conduit Julia Simon hors du podium. Elle termine 5e d'une course remportée par l'Allemande Denise Herrmann-Wick, devant les Suédoises Hanna Oeberg et Anna Magnusson. Une autre Française, l'Iséroise Chloé Chevalier finit quatrième.
Mais l'important était ailleurs, un peu plus bas dans le classement. Car la principale rivale de Julia Simon dans la quête du gros globe de cristal s'est effondrée ce samedi en Norvège. L'Italienne Dorothea Wierer, revenue aux avant-postes du biathlon mondial ces dernières semaines, est passée à côté de son sprint en terminant 21e à l'issue des 7,5 km de course.
Elle avait un débours de 144 points au général sur Julia Simon avant le sprint, un retard désormais impossible à combler.
Une dernière victoire à aller chercher
Voilà donc Julia Simon sacrée à la veille de la dernière course de la saison, la mass-start, appelée communément la course des reines. Quel que soit le résultat, Julia Simon portera demain soir la couronne mondiale.
Mais ce serait mal connaître la biathlète des Saisies que de penser qu'elle se contentera de parader et de jouer la sécurité. Nul doute que la Savoyarde aura à cœur de finir en beauté.
Car, à 26 ans, Julia Simon est une fonceuse. Quand, au Grand-Bornand en décembre dernier, sur une piste si gelée qu'elle avait des allures de patinoire, certains passaient un très mauvais moment, elle qui "adore jouer sur les trajectoires" s'était "éclatée". De quoi lui rappeler sans doute ses débuts en ski alpin.
Longtemps capable du pire comme du meilleur
C'est à Oslo, déjà, qu'elle a fait ses débuts en Coupe du monde de biathlon, à vingt ans, avant d'investir pour de bon la cour des grandes en 2018/2019.
En trois mots, l'entraîneur de tir des Bleues, Jean-Paul Giachino, la décrit à l'AFP comme "impatiente, volontaire, déterminée". "Et c'est une vraie compétitrice", ajoute-t-il. "Très naturelle et spontanée, une passionnée et une bosseuse", complète Marie-Laure Brunet, ex-biathlète devenue préparatrice mentale, qui l'accompagne depuis le printemps 2021.
Longtemps toutefois, ce qui a caractérisé Julia Simon, c'est d'être capable du pire comme du meilleur, un jour tout en haut, le lendemain très bas. Une irrégularité qui l'empêchait de jouer les premiers rôles.
Tout a changé cet hiver. Le facteur X, c'est sa métamorphose au tir couché, fruit d'un travail de longue haleine, et d'efforts considérables sur sa personnalité bouillonnante.
"Pourquoi elle est N.1 mondiale ? Elle skie comme l'année dernière, mais la différence, c'est en termes de stats de tir, surtout couché. Il ne faut pas aller chercher ailleurs", résume Jean-Paul Giachino.
Impatiente, Julia Simon a dû travailler sur sa personnalité
Au printemps 2020, quand le technicien revient dans l'encadrement français, "je ne lui ai pas vendu du rêve, je lui ai dit que c'était deux ans de travail", raconte-t-il. "Là, elle m'a dit qu'elle n'avait pas deux ans. Julia a plein de qualités, mais elle n'a pas de patience..."
"C'était un peu déroutant pour elle qui a envie que ça avance, elle devait se dire qu'elle faisait du surplace. Mais elle devait passer par ça pour que ce ne soit plus un sujet après", explique Marie-Laure Brunet à l'AFP.
"On l'avait initiée sur un mode ball trap, où l'arme n'est jamais tranquille", décrit son entraîneur de tir. "Mais ce n'est pas comme ça qu'on arrive à avoir de la régularité. Dans son apprentissage, on ne lui a pas parlé des fondamentaux : la respiration, la visée, le lâché. Elle ne les respectait pas parce qu'elle n'en avait jamais entendu parler", complète-t-il.
Je suis quelqu'un de très électrique, il faut que les choses avancent vite
Julia Simonvictorieuse du gros globe de cristal de biathlon
Un travail mental avec l'ancienne biathlète Marie-Laure Brunet
"Ça m'a demandé du travail sur ma personnalité: je suis quelqu'un de très électrique, il faut que les choses avancent vite", reconnaît Julia Simon. "Beaucoup de travail mental aussi, pour trouver du relâchement derrière la carabine, parce que je suis quelqu'un de très tonique."
"Le gros de notre travail, ça a été de la tempérer", confirme sa coach mentale, Marie-Laure Brunet. "Julia a un tempérament de feu. Ca se voit dans sa façon d'être, c'est quelqu'un qui a beaucoup d'énergie. On a beaucoup travaillé sur (apprendre à) se canaliser, calmer son impatience, être capable de poser les choses".
La consécration des Mondiaux
Le tout a si bien porté ses fruits cet hiver que Julia Simon n'a manqué sa première cible sur le tir couché qu'à sa 72e balle tirée. Elle affiche donc 93% de réussite au tir couché, contre 84% la saison précédente.
La consécration s'était déjà esquissée il y a quelques semaines, lorsque Julia Simon est devenue championne du monde et médaillée de bronze de la mass start à Oberhof, en Allemagne, ses premiers podiums individuels internationaux, après ceux partagés (or mondial du relais mixte simple en 2021 avec Antonin Guigonnat, argent olympique 2022 et bronze mondial 2023 du relais mixte).
Et elle s'offre pour la première fois le gros globe de cristal qui récompense la meilleure biathlète de la saison, après avoir porté le dossard jaune plus des trois-quarts de l'hiver. Elle devient la quatrième française à réussir cet Everest du biathlon.
Une avalanche de globes ?
La poursuite d'Oslo ayant été annulée, elle a également remporté, de fait ce vendredi, le petit globe de la poursuite.
Elle pourrait en décrocher un autre car elle est en lice pour glaner le petit globe de la mass-start demain.
Elle pourrait ainsi terminer sa saison avec un gros globe de cristal, deux petits globes de spécialités, un petit globe du relais dames, sans oublier le classement des Nations pour l'équipe féminine de biathlon.