Rencontre avec la sculptrice Gretta Zluhan Amat. Une artiste qui vit à Chambéry et qui travaille, depuis quelques semaines, sur une oeuvre liée aux attentats du 13 novembre.
Cheveux en bataille, lunettes vissées sur le nez, Gretta Zluhan Amat sculpte, noyée dans ses vêtements d'artiste. Dans son atelier sous les toits, les coupures de presse côtoient la glaise, des toiles ou encore du grillage à poule. C'est dans ce bazar organisé qu'elle raconte, avec les yeux qui pétillent, la première fois qu'elle a malaxé de la glaise.
"Toute petite, je me suis retrouvée au bord du Fier et il y avait la glaise et je me suis mise à jouer avec. J'ai trouvé ça fabuleux qu'on puisse donner des formes à autre chose que du sable. Et j'ai commencé comme ça à être subjuguée par cette matière", confie la sculptrice.
Des amas de glaise et de sentiments
Gretta Zluhan Amat marche à l'émotion. Impossible pour elle de créer sans ressentir quoi que ce soit: "Les choses ne sont pas simples. Ce qui fait qu'elles le deviennent, c'est que je travaille avec le coeur et l'émotion! Faire une commande pour faire une commande, par exemple, c'est très difficile pour moi. On m'a demandé un animal, un chien. Je l'ai fait mais une fois que je l'avais rencontré."Il y a 3 ans, alors qu'elle venait d'ouvrir sa galerie d'art, elle a appris qu'elle était atteinte d'un cancer du sein. Cette maladie l'a immobilisée pendant un an. L'ablation de l'un de ses seins, suivie de plusieurs opérations lui ont paralysé un bras. Sa crainte, à l'époque, était de ne jamais pouvoir refaire ce qu'elle aime. Cette sombre période de sa vie, a pourtant inspiré l'artiste. En novembre dernier, elle présentait plusieurs oeuvres à la galerie de la cité de l'eau de Publier, en Haute-Savoie, dans une exposition intitulée: "Mon combat en 3 D" contre le cancer du sein."
"Le message essentiel, c'est que l'on m'oublie quand on regarde une de mes sculptures. J'aimerais que le spectateur puisse s'approprier mon travail, qu'ils soit totalement dedans, qu'il ressente l'émotion que j'ai pu y mettre, que ce soit la sidération, l'amour, la passion des animaux...", confie l'artiste.J'aimerais que le spectateur puisse s'approprier mon travail!
Au lendemain des attentats de Paris, elle n'a pas réussi à reprendre le travail qu'elle avait entamé avant les événements: "Je travaillais sur un autre projet, quelque chose de beaucoup plus sympa et tendre, les fables de la Fontaine. Et je n'ai pas pu travailler le lendemain, c'était beaucoup trop léger. Et j'étais vraiment très touchée par ce qui c'était passé."
Reportage Isabelle Colbrant et Jean-Pierre Rivet