EN IMAGES. Coronavirus : un artiste savoyard met son talent au profit du personnel soignant

Une centaine d'artistes issus du street art participent à une vente d'œuvres originales en ligne au profit de l’Assistance Publique-Hôpitaux de Paris (APHP). Parmi eux, le savoyard Graffmatt.

"Dernier round" est une peinture coup de poing. Elle dévoile une jeune infirmière de profil, masquée et gantée. Mais pas n’importe quels gants... Avec sa paire de gants de boxe, on l’imagine prête à monter sur le ring, déterminée à envoyer le coronavirus dans les cordes et à le mettre K.O. "Plutôt que de rester confiné à faire ma propre production, j’ai eu envie d’apporter ma patte et de me sentir utile, témoigne l'artiste savoyard Graffmatt. Dans ce dessin, j’ai choisi d’illustrer une infirmière, mais cela pourrait être n’importe qui. Tout le monde doit se mobiliser pour combattre ce virus. On doit tous être solidaires, les uns les autres !".

Dans le sous-sol de sa maison à Barberaz (Savoie), près de Chambéry, Graffmatt a l’habitude de travailler sur des matériaux de récupération, des supports cartonnés ou des palettes de bois. Autant de matériaux qu'il transforme et reconstruit pour réaliser des tableaux urbains en 3D mais aussi des portraits poétiques, personnages très expressifs au regard parfois énigmatique, souvent touchants. New-York, Los Angeles et la faune urbaine font partie des sources d’inspiration de ce jeune trentenaire, graphiste passionné par les cultures hip-hop, entré dans le monde du street art et du graffiti au cours de ses années d'études à Lyon.
 


Lorsqu’il a eu vent d’une vente d’œuvres solidaires, Graffmatt n’a pas hésité à mettre ses bombes aérosols, ses brosses et ses pinceaux au service de la cause. "J’ai appris le projet par la page Facebook d’une amie artiste, Sandrot. J’ai tout de suite contacté SAATO (l'association à l'origine de l'opéraion, NDLR) et leur ai proposé de participer", se rappelle-t-il. Dédiée à la promotion de l’art urbain, l'association parisienne SAATO organise chaque année un festival de street art sur le parvis de la Défense. Elle a eu très tôt l’idée d’une vente solidaire dont tous les détails sont expliqués sur son site Internet.

"Tout est parti d’une proposition du pochoiriste Raf Urban. Il a imaginé un projet de festival d’art urbain confiné, regroupant plusieurs artistes qui partageraient via notre site leurs dessins avec le public confiné. Grâce à notre plateforme, nous nous sommes dit que ces œuvres pourraient être vendues au profit de l'APHP. Avec ses 39 hôpitaux, dont trois centres de référence pour les maladies infectieuses, l’APHP réunit la plus grande expertise en France. C’est un acteur crucial dans la lutte contre l’épidémie, explique Mouarf, artiste et fondateur de SAATO. Nous avons donc lancé un appel et plus d’une centaine d’artistes, dont Graffmatt que je ne connaissais pas, ont répondu à l’appel".

 

"Le street art reflète la société"


Depuis le 1er avril, six œuvres, toutes au format A4 et réalisées sur support libre, sont vendues chaque jour via le site de l'association. En général, elles partent en quelques secondes, comme l’infirmière boxeuse de Graffmatt, achetée 300 euros par un médecin de la région parisienne. L’objectif de départ visant à collecter 5000 euros a déjà été pulvérisé puisqu'une partie des 180 œuvres mises en vente a déjà rapporté 35 000 euros. "Tout est transparent. Ce n’est pas une cagnotte que l’on va reverser. Elle est directement sur le site de l’APHP. Il n’y a aucun argent qui transite par nous. C’est un gros avantage de confiance pour nos acheteurs. Nous sommes 100% bénévoles. Le produit de la vente sera donc entièrement reversé à l’APHP pour soutenir leurs équipes soignantes, précise Mouarf. Nous sommes toujours sollicités par de nouveaux artistes qui souhaitent participer mais nous avons décidé de clore l’opération à la fin du mois. On verra pour la suite !"
 

Parmi les artistes, beaucoup se sont inspirés de la crise actuelle dans leurs visuels, avec humour ou gravité. Graffmatt, lui, avait déjà senti le combat en réalisant "Aux Armes", un graffeur-soldat masqué chevauchant sa monture armé d’une bombe aérosole. "Je suis parti du tableau représentant Napoléon Bonaparte franchissant les Alpes réalisé par le peintre Jacques Louis David, retrace-t-il. On est en guerre contre le virus et ce guerrier symbolise cette lutte. Le street art reflète la société. Les artistes se sont toujours exprimés en lien avec l’actualité. Il y a d’ailleurs une formidable création en train de naître partout dans le monde autour de cette épidémie".

Au total, Graffmatt a offert quatre œuvres pour la vente solidaire de SAATO. La dernière, baptisée "Silence", s’est vendue instantanément. Elle représente un enfant assis, les bras croisés, plongé dans ses pensées et que l’on devine dans l’attente d’un avenir meilleur. "On parle souvent des médecins et de la recherche. On parle aussi de l’école, de la reprise, comment ça va se passer progressivement. Ça m’a fait tilt ! D’habitude, je ne dessine pas d'enfants mais cette fois je me suis mis dans la peau du personnage, avec ce gosse qui est en attente de s’occuper, de revoir ses copains à école. On peut s’imaginer plein de choses, ajoute l'artiste savoyard. Il se passe beaucoup de choses dans la tête des gens aujourd’hui et je trouvais intéressant de le retranscrire à travers ce gamin".
 

Regarder la vie autrement. Depuis la lucarne de son petit atelier, Graffmatt, habitué à créer confiné dans sa cave, la perçoit avec son regard, forcément inquiet, comme tous, mais aussi bien décidé à apporter un peu de poésie colorée dans ce monde tourmenté. Une impression que l’on retrouve dans bien des oeuvres réalisées par ces artistes des quatre coins de France. La vente solidaire se poursuit en ligne sur le site de Projet SAATO, jusqu'au 30 avril.

 
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