REPLAY. Chambéry sera l'un des scrutins les plus "scrutés" le 28 juin. La Cité des Ducs de Savoie va-t-elle (re)basculer à gauche ? Michel Dantin, le maire LR sortant, a affronté ce 17 juin sur le plateau de France 3 Alpes Thierry Repentin, Divers Gauche. Voici ce qu'il faut en retenir.
A l'origine, sur la ligne de départ du 1er tour des élections municipales, ils étaient sept candidats à briguer la gouvernance de la métropole savoyarde.
La France était en plein confinement. L'abstention fut record : un taux de 61,05%.
Le contexte local
A l'issue du dépouillement, il n'en resta que trois en lice, qualifiés pour le second tour.
Le maire sortant, Michel Dantin (LR) en ballottage favorable avec 37,38 % des voix, un score toutefois en net repli par rapport à 2014, devant Thierry Repentin (centre gauche, 22,63 %) et Aurélie Le Meur (liste citoyenne, EELV 22,46 %).
Thierry Repentin n'a devancé que de 22 voix la candidate écologiste Aurélie Le Meur. Un écart si faible qui ne lui permettait pas de prendre un leadership incontestable. Les deux candidats ont donc négocié, et fait alliance pour "faire basculer la ville" à gauche.
Des négociations, et une fusion pour "barrer la route" au maire sortant, mais des conditions
Après près de deux mois de tractations, la nouvelle a été annoncée le 29 mai : Thierry Repentin et Aurélie Le Meur prennent la pause, ensemble, en photo dans la presse et officialisent leur alliance. La liste "Chambé Citoyenne" a accepté de fusionner avec la liste "Chambéry en commun" de Thierry Repentin. La liste "Demain Chambéry" est née et, au calcul des voix, cette association devrait leur permettre de devancer le maire sortant et sa liste "Aimer Chambéry, c'est agir avec nous".
Les militants de "Chambé Citoyenne" ont "voté pour à une large majorité", a assuré le 29 mai leur tête de liste Aurélie Le Meur, car sur cette nouvelle liste, si Thierry Repentin reste en tête, Aurélie Le Meur serait sa première adjointe en cas de victoire le 28 juin. Toutes les autres places de la liste seraient par ailleurs réparties également entre les deux listes qui fusionnent.
Le débat du 17 juin
Sur le plateau de France 3 Alpes, autour de la table du débat animé par Jordan Guéant, ils ne sont donc plus que deux candidats, face-à-face.
- Michel Dantin, 60 ans. Maire Les Républicains de Chambéry depuis 2014. Il a succédé à deux majorités socialistes, faisant basculer la ville à droite pour la première fois depuis des décennies.
- Thierry Repentin, 57 ans. Conseiller départemental de Savoie. Ancien sénateur et ancien ministre socialiste des Affaires européennes et de la Formation professionnelle. C’était sous la présidence de François Hollande.
Voici donc l'ancien ministre socialiste, qui avait appelé à voter pour LREM lors des Européennes de l’an dernier, allié à Aurélie Le Meur, à la tête d'une liste très large, soutenue à la fois par le Parti communiste français et par l’UDI, parti de centre-droit. De quoi brouiller les cartes, mais quand Jordan Guéant lui pose d'emblée la question : "Quel est votre positionnement politique aujourd’hui ?", il répond sans ambage "Je suis un homme de gauche, l'écologie a toujours été une de mes préoccupations. Nous avons trouvé facilement un accord. Nous n'avions guère de divergences. (...) Ce sont d'ailleurs les Chambériens, qui par leur vote au 1er tour ont clairement signifié qu'ils voulaient une alternative, et que l'on travaille ensemble".
En face, Michel Dantin bouillonne un peu : "Ce n'est pas Chambéry qui les intéresse, mais c'est descendre Michel Dantin ! Je n'y vois pas de mal, ni malice, mais quand on fait alliance, on le fait dès le 1er tour, c'est tout de même une surprise".
Le ton est donné, il sera du même "tonneau", plutôt rugueux et musclé tout au long de ces quarante minutes de débat. Les deux hommes ne sont pas des novices et sont rôdés à l'exercice.
Le bilan du maire sortant ?
"J'ai été fidèle à ma parole" affirme Michel Dantin qui attribue son score en baisse de 12 points par rapport à 2014 à la forte abstention et qui ajoute qu'il n'était pas très favorable à la tenue de ce second tour, si tôt après le déconfinement, mais "bon puisqu'il le faut, tournons la page, le plus rapidement possible".
Son adversaire, lui, estime que "ce bilan, ce sont les Chambériens qui l'ont déjà jugé, il est clair qu'ils veulent un changement de cap, du dialogue, remettre du lien et surtout une autre méthode de gouvernance".
"Une méthode autoritaire, sans concertation, sans cohérence et qui date", ce sera l'angle d'attaque en permanence des flèches décochées par Thierry Repentin, à l'encontre du maire sortant, à l'image de cet échange sur la politique menée notamment dans les quartiers, où l'on ressort aussi... les vieux dossiers
L'édile sortant défend sa politique en faveur des jeunes, des opérations menées au pied des montées d'escaliers, revendique une position d'écoute, et décoche à son tour ses fléches "ah c'est sûr que vos inféodés se sentent peut-être exlus, je le reconnais".
Le Parking Ravet, cristallisation d'une campagne "musclée"
Ce parking est un vaste chantier : 500 places prévues sur 7 étages, en plein coeur de la ville. Un chantier dont on parle beaucoup à Chambéry depuis 2016 et qui est revenu dans l'actualité ces derniers jours : le parking Ravet, qui ne finit pas de défrayer la chronique a été occupé trois jours durant par des opposants dont Extinction Rébelion. Un campement provisoire a été installé au sommet de la grue.
Michel Dantin hurle au "déni démocratique", Thierry Repentin dénonce "un projet symbolique de la méthode du maire, une méthode sans concertation aucune avec les riverains, et une solution de parking qui date des années 80". Le premier jure qu'il mènera à bien ce projet phare, l'autre assure qu'en cas de victoire, il le modifiera profondément, "à défaut de pouvoir le démolir"
Quel monde d'après Covid-19 ?
Quand on leur demande comment ils ont appréhendé cette crise sanitaire sans précédent, tous les deux s'accordent au moins sur le fait que ce fut une épreuve inédite et saisissante, et qu'il faut en tirer des enseignements.Thierry Repentin retient "la solidarité, la résilience des habitants, la mise en lumière des fractures sociales et l'importance des services publics". Michel Dantin y a "vu les limites et les dangers de la mondialisation, et la nécessité de repenser les modèles économiques".
Les deux candidats sont plutôt, enfin, d'accord sur la nécessité de se préoccuper de l'environnement, du réchauffement climatique et de la nature, mais sur ce point-là non plus, ils ne sont pas sur la même longueur d'onde.
Michel Dantin parle du développement du vélo, même s'il "reconnaît, sans honte, qu'il y a 10 ans, il n'aurait pas parié un kopek sur les deux-roues", affiche son intention de faire rentrer encore plus la nature dans la ville, en terrassant et en végétalisant les toits, en créant des îlots de fraîcheur contre le réchauffement climatique.
Thierry Repentin affirme que "l'environnement et la santé seront ses priorités, qu'il faut "mettre le paquet" sur la transition des transports, atteindre l'objectif zéro carbone, avant même les échéances fixées par la COP 21, et dans l'immédiat, offrir des repas 100% bio dans les cantines". Si notre programme sur ce point ne tenait pas la route, EELV ne nous aurait pas rejoints", glisse au passage l'ancien ministre, qui nomme Aurélie Le Meur. Façon de rappeller que c'est en tandem, que la différence se jouera, au second tour.
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