Les célèbres éléphants avaient quitté la fontaine le 17 décembre dernier, direction la fonderie Vincent à Brignais (Rhône). Depuis, ils ont été démontés par les employés, l'occasion d'évaluer l'ampleur de la restauration.
Jeudi après-midi, la fonderie Vincent de Brignais a présenté à une équipe de la mairie et aux journalistes sont projet de restauration des "4 sans culs"
Trois des quatre sculptures d'éléphants, hautes de trois mètres, ont été déboulonnées, puis démontées par les employés du site, afin d'observer de plus près les effets du temps.
Trois corps sur quatre vont être refondus
Premier constat: si les quatre trompes sont presque intactes et quelques pattes apparaissent encore en bon état, trois ensembles corps-tête sur quatre sont assez abîmés."Sur certains reliefs, notamment le sommet du crâne, il ne reste quasiment plus de fonte et les fissures sont visibles. Des trous laissent apparaître la résine. Cela peut s’expliquer par le fait que lors de leur réalisation, le moulage original n’a pas permis d’avoir un niveau uniforme de fonte."
"Autre explication, les restaurations antérieures ont été faites avec des matériaux qui aujourd’hui n’apparaissent pas comme les plus performants. Une première estimation laisse penser qu’il faudra refondre les ensembles corps/têtes de trois éléphants sur quatre." précise la mairie.
Le projet doit être validé par la CRMH (Conservation Régionale des Monuments Historiques) et par l’architecte des bâtiments de France.
La restauration, un travail minutieux
Un des quatre éléphants a été scanné grâce à un bras de numérisation, afin de conserver en mémoire sa morphologie exacte, à la striure près! Son empreinte 3D est gardée sur un ordinateur."Cela pourra servir pour reproduire par exemple des maquettes ou des modèles réduits", explique Catherine Kuenemann, chargée de la maîtrise d’ouvrage.
Voici les différentes étapes de la restauration: il faut retirer la résine, posée il y a trente ans dans cette même fonderie, "déplomber" la peinture, ressouder les fissures, combler les imperfections au mastic, faire un "sablage" (action qui consiste à nettoyer une pièce ou parfaire sa surface par projection de sable), renforcer la structure de l'intérieur avec de nouvelles pièces. L'élément sera ensuite repeint avec une même teinte, à laquelle on ajoutera une couche d'enduit protecteur contre la corrosion et les changements de températures.
La refonte se fera grâce à des moules en sable
Le modus operandi se fait à l'ancienne, comme en 1838. A un détail près: "Les fontes actuelles sont de meilleures qualité que celles utilisées en 1838. Elles permettent de conserver une épaisseur de fonte plus constante", selon Luc Bellon, chef de projet.A partir de l'éléphant grandeur nature, dont les imperfections auront été gommées au préalable, on va créer plusieurs moules en sable chimique. Le sable, noir et compact, tient avec 2% de résine. Dans chaque moule, du métal en fusion va être coulé et va prendre la forme désirée. A l'intérieur bien sûr, il y aura un noyau en sable pour que le résultat soit creux! Cela éviterait que l'éléphant ne pèse 100 tonnes au lieu de trois... Mais le moule ne peut pas être réutilisé car à chaque opération, il est détruit par le métal.
Le premier éléphant devrait être livré dès mai prochain à la mairie. Coût total de l'opération: environ 1 million d'euros TTC.
Transmettre le patrimoine aux générations futures
"Je suis impressionné par le savoir-faire et la maîtrise de l’entreprise, explique Jean-Claude Davoine, adjoint aux travaux et au patrimoine historique. Ces professionnels connaissent les techniques du passé adaptées à la conservation du patrimoine, qui vont nous permettre de le transmettre aux générations futures. Nous ne sommes que des intermédiaires. J’ai été ému de voir les éléphants ainsi en plusieurs parties. Ils sont en cure de régénération. Ils vont nous revenir guéris".Reportage de Linh-Lan Dao et Jean-Pierre Rivet
Intervenants: Günther Zahorka, directeur de la fonderie Vincent, Catherine Kuenemann, responsable maîtrise d'ouvrage à la mairie de Chambéry. Equipe: Linh-Lan Dao, Jean-Pierre Rivet, Jean-Jacques Picca.