La plage de l'île Vierge à Crozon interdite d'accès jusqu'à nouvel ordre

Depuis que le journal britannique The Guardian l'a classée parmi les plus belles plages d'Europe en 2014, la petite crique de l'île Vierge à Crozon ne désemplit plus. La municipalité a décidé d'en interdire l'accès, pour des raisons de sécurité et de préservation du site.

Les randonneurs qui empruntent le GR 34 depuis le parking de la Maison des Minéraux sont avertis dès leur arrivée que l'accès à la plage de l'Île Vierge est interdit "par décision préfectorale". Fermée en mars dernier pour cause de confinement, la plage l'est toujours aujourd'hui, pour raisons de sécurité. La municipalité tentait vainement depuis plusieurs années d'alerter les touristes sur la dangerosité du sentier qui mène à cet endroit paradisiaque: en vain. Les photos de la crique, qui circulent en boucle sur les réseaux sociaux et dans les magazines et journaux nationaux, continuent d'attirer des milliers de visiteurs venus de tout l'hexagone et au-delà.
 

Une fréquentation multipliée par trois

Un compteur installé sur le GR 34 qui surplombe la plage l'atteste: il n'enregistrait que 20.000 passages par an avant 2014, contre 60.000 par an aujourd'hui. Tous ces promeneurs ne descendent évidemment pas sur la plage, mais celle-ci est tout de même excessivement fréquentée, et le sentier qui permet de l'atteindre se dégrade. La municipalité a installé une clôture pour en interdire l'accès, mais elle ne constitue qu'un rempart bien dérisoire: des dizaines de personnes passent en-dessous sans sourciller.  

Un accès périlleux

Didier Cadiou, gestionnaire des espaces naturels pour la commune de Crozon, interpelle fréquemment les visiteurs qui passent outre l'interdiction: "vous n'avez pas vu la clôture?" La réponse est toujours la même: "si, mais comme tout le monde y va..."

Pédagogue, il en profite alors pour réitérer ses mises en garde: "ce sentier est extrêment dangereux: non seulement vous pouvez chuter vous-mêmes, mais en plus, comme la falaise est très friable, quand vous arrivez sur le surplomb au-dessus de la plage, vous pouvez faire tomber des morceaux de roche sur les gens qui sont en-dessous," sermonne-t-il sans relâche. Avant de rappeler que, comme pendant le confinement, l'amende pour non-respect de l'interdiction est de 135 €...

Lorsque le sentier, créé par les passages répétés, débouche sur le bord de la falaise, les derniers mètres pour accéder à la grève relèvent plus du toboggan que du chemin. Ce qui n'empêche pas certains de s'y rendre en tongs ou avec des porte-bébés. "On voit des gens descendre avec des bouées énormes, des planches de surf, c'est parfaitement ridicule!" s'exaspère Didier Cadiou. 

Une interdiction mal acceptée

Ceux qui ont fait des kilomètres afin de venir se baigner dans les eaux turquoises vantées sur tous les réseaux sociaux ne cachent pas leur déception: "on est venus avec des amis pour profiter de ce site magnifique et on s'est cassé le nez en voyant qu'il est devenu inaccessible, se désole Maxime Le Grand, un finistérien habitué du lieu. "On voit partout l'Île Vierge, la région Bretagne a fait une campagne de pub avec des photos de l'île, on espérait aller pique-niquer sur la plage. C'est dommage..."
 

Il est vrai que cette récente interdiction n'a pas encore été intégrée par les réseaux sociaux ni par les médias: dans un article paru début juillet, Le Figaro incitait encore ses lecteurs à s'y rendre. Quant aux affichettes placées le long du GR 34 à l'approche du site, elles disparaissent presque immédiatement après avoir été installées. Georges Cadiou doit passer presque quotidiennement pour les remettre. L'interdiction passe très mal auprès des habitués du lieu: "ça fait 40 ans que je viens ici, et il n'y a jamais eu aucun problème, grommelle un mécontent. Je reviendrai en septembre!"

C'est dommage parce que c'est super joli, mais je comprends que ce soit interdit.

Léa Miloudi, touriste francilienne

Mais nombreux aussi sont ceux qui comprennent l'interdiction: "On voit quand même qu'on va abîmer un site qui est naturellement beau, admet Léa Miloudi, touriste venue de la région parisienne et qui découvre le lieu pour la première fois. On s'est dit que si on revenait dans cinq ans, on ne pourrait peut-être plus y aller parce que tout se sera écroulé. On voit vraiment qu'on est à flanc et que ça peut glisser."

Préservation du site

L'accès à la grève est interdit y compris par la mer: "si vous avez du monde qui arrive par la mer, ça va attirer du monde sur le sentier" explique Didier Cadiou.
En revanche, il est toujours possible de venir profiter des eaux turquoises en kayak, en paddle, en bateau, et même de se baigner, à condition de ne pas accoster. A terme, l'accès à la crique par la mer pourrait être autorisé, lorsque le passage par le sentier aura pu être définitivement condamné. Ce qui n'est pas possible pour l'heure: la plage et le chemin qui permet d'y accéder se situent sur des parcelles qui appartiennent à des particuliers. Une procédure d'acquisition par le Conservatoire du Littoral est en cours, ce qui permettra alors d'envisager des aménagements infranchissables. En attendant, il est toujours possible de profiter des points de vue sublimes qu'offre le GR 34 sur l'Île Vierge et les autres criques.
 

"On va trouver un autre beau site pour pique-niquer, y'a ce qu'il faut dans le coin"

Maxime Le Grand, touriste finistérien


Et pour ce qui est de la baignade Didier Cadiou rappelle inlassablement aux randonneurs que la seule commune de Crozon comptabilise 60 km de côte, "autant que la Belgique!" ajoute-t-il avec malice. Et des kilomètres de plages parfaitement autorisées...

 
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