Le projet d'installation d'une antenne-relais de téléphonie mobile à Châteaulin, dans le Finistère, mobilise des riverains. S'ils ne sont pas "contre la 5G", ils dénoncent une implantation "au petit bonheur la chance" sur un terrain privé jouxtant leurs jardins. Ils déplorent aussi l'absence de concertation sur le dossier.
C'est en déposant des déchets dans son composteur, au fond de son jardin, qu'Eric Fresné a découvert le pot aux roses au mois d'avril. "J'ai remarqué une pancarte annonçant des travaux d'installation d'une antenne 5G, relate-t-il, une antenne de 26 mètres de haut qui se trouvera à 15-20 mètres au bout de nos jardins, autant dire qu'on la verra de nos fenêtres".
"Grésillement continu"
L'opérateur de téléphonie mobile Free a choisi un terrain appartenant à la SNCF pour implanter son antenne-relais. Dans la rue de Coatigoff, sur les hauteurs de Châteaulin, le projet passe mal auprès des riverains. Très mal même. "Nous le ressentons comme une intrusion violente, remarque Eric Fresné. Nous n'avons été ni prévenus ni concertés".
Son voisin, Frédéric Queinnec, parle de "décision brutale" et pointe les nuisances visuelles et sonores que le projet entraînera. "Je suis allé écouter une autre antenne-relais de Free implantée à Châteaulin, souligne-t-il. Les transformateurs et les petits ventilateurs émettent un grésillement continu. C'est pas possible d'accepter cela".
Cet habitant envisage même de revendre sa maison si l'antenne sort de terre. "Un bien qui sera déprécié de 30 % à cause de ce pylône, relève-t-il. C'est dommage car on se plaisait bien dans ce vieux quartier de Châteaulin"
La municipalité n'a pas la main
Jointe par téléphone, la division Réseaux mobiles publics de la SNCF se contente de répondre que "le processus d'instruction du dossier est en cours. Nous, ce que nous regardons, c'est si la demande est compatible avec les contraintes ferroviaires". Free versera un loyer à la SNCF pour occuper la parcelle de terrain.
"L'argent n'a pas d'odeur, comme on dit, ironise la maire, Gaëlle Nicolas. Pour la SNCF, il n'y aura pas de nuisances mais pour la ville et ses habitants, en revanche, ce n'est pas le cas".
Si la déclaration de travaux a bien été signée par la municipalité, cette dernière n'a pas la main sur le dossier. "C'est un sujet qui me contrarie beaucoup, reconnaît Gaëlle Nicolas. J'ai reçu les habitants de ce quartier et demandé au responsable des services techniques de se mettre en contact avec Free pour trouver un autre lieu d'implantation, loin des habitations".
Le réseau mobile est un casse-tête dans cette commune encaissée, entourée de collines. "Les opérateurs veulent s'installer en ville pour assurer une meilleure couverture, constate la maire de Châteaulin, et nous, élus, nous devons nous plier à une législation qui nous laisse peu de possibilités de refuser (Loi ELAN de novembre 2018, NDLR). Quand le terrain est privé, la marge de manoeuvre est inexistante".
Gaëlle Nicolas affirme qu'elle s'est opposée récemment à la demande d'un autre opérateur qui ciblait un terrain de sport municipal, en pleine zone urbaine. "Nous subissons ces situations et il serait temps d'avoir un vrai débat public sur cette question" ajoute l'édile.
"Recours gracieux"
De leur côté, les riverains de la rue de Coatigoff organisent la riposte. Ils distribuent des tracts sur le marché et ont pris contact avec un avocat brestois pour actionner "un recours grâcieux" auprès de la mairie.
"Nous ne sommes pas contre la 5G ni l'amélioration du réseau, précise Eric Fresné. Nous, nous voulons qu'il n'y ait pas d'autres installations d'antennes au petit bonheur la chance à Châteaulin. Il y a suffisamment de foncier dans cette ville pour trouver des solutions qui ont le moins d'impact possible sur notre cadre de vie".
Dans son agenda, Gaëlle Nicolas a prévu une réunion avec les opérateurs de téléphonie mobile candidats à une installation dans la commune. "Je souhaite qu'ils se regroupent et partagent une seule et même antenne" indique-t-elle. Un voeu pieu car la voix du maire ne pèse pas lourd dans ce domaine. Et encore moins depuis les dernières réformes de la loi ELAN qui assouplissent la règlementation en matière d'installations radioélectriques.
"Tant que les travaux n'ont pas commencé, on a l'espoir de faire bouger les choses, note Eric Fresné. Nous allons faire du bruit".
Une manifestation est programmée ce samedi, à 11h, devant la mairie de Châteaulin, où les habitants du quartier de Coatigoff viendront ériger une fausse antenne-relais de six mètres.