Victimes d'AVC en Bretagne, Pascale et David estiment "avoir eu beaucoup de chance"

Le 29 octobre, c'est la journée mondiale de l'accident vasculaire cérébral (AVC), dont 140 000 cas annuels sont recencés en France. Pascale et David, résidents respectivement à Acigné (Ille-et-Vilaine) et Cruguel (Morbihan), en ont été victimes. Ils nous racontent comment la maladie les ont changés.

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140 000 personnes, soit l'équivalent de la population de Brest, sont victimes d'accident vasculaire cérébral (AVC) chaque année en France. Pascale, 68 ans, en a été frappée en mars 2009. Dix ans après, cette habitante d'Acigné (Ille-et-Vilaine) a hérité d'une "extrême fatigue constante" et d'"une gêne lorsqu'elle marche". Bien que valide, son bras droit est devenu "très fragile", si bien qu'elle "ne porte des choses que de son bras gauche".

L'AVC est provoqué par la formation d'un amas de sang coagulé, un caillot, qui vient obstruer un vaisseau sanguin. "Il en existe deux sortes : l'AVC ischémique, lors duquel le caillot empêche l'irrigation d'une partie du cerveau, et l'AVC hémorragique, où le sang s'écoule dans le cerveau. La mortalité est plus élevée pour ce dernier, qui représente environ 20% des cas d'AVC," précise le professeur Serge Timsit, chef du service neurologique du CHRU de Brest.
 

Une paralysie brutale

Pascal a été touchée par la version hémorragique. "J'étais en séjour aux sports d'hiver avec la famille. Alors que je sortais de la baignoire et que je me séchais, ma main droite a soudainement lâché la serviette que je tenais, raconte-t-elle. Dans un premier temps, je n'ai pas compris ce qu'il se passait. Puis j'ai senti un fourmillement dans la jambe du même côté et j'ai alors compris que je faisais un AVC. Tant que j'étais encore capable de m'exprimer, j'ai appelé ma fille pour lui de prévenir les secours."

 

Prise en charge à Annemasse (Haute-Savoie) où elle reste en soins une semaine, elle reçoit la visite de sa mère. "Tout le monde faisait alors semblant de comprendre ce que je disais, alors que c'était inintelligible en raison de la paralysie faciale. Mais apercevoir ma mère à mon chevet m'a fait un choc : j'ai miraculeusement retrouvé la parole. J'ai vraiment beaucoup de chance de pouvoir parler et réflechir aujourd'hui," glisse-t-elle.

Rapatriée en Bretagne, elle ne recouvre les capacités de son bras droit que pendant les sept mois de réeducation au CHU de Pontchaillou. "On estime qu'il peut y avoir des signes positifs dans les trois ans suivant l'AVC. Pendant cette période, j'ai peu à peu retrouvé l'écriture et la capacité de manger avec ma main droite".

 
 

Difficile de reprendre le travail normalement

Habitant dans le Morbihan, David a été frappé par un AVC en juin 2015. "J'arrivais sur mon lieu de travail, où il y a un étage à monter à l'entrée. Dans l'escalier, j'ai été pris d'une faiblesse, j'ai dû agripper mon pantalon pour monter, se souvient le quadragénaire. Puis tout le côté gauche de mon corps est devenu dur comme de la pierre, impossible à bouger. J'ai directement appelé les secours. Une heure après j'étais à l'hôpital."


 

Confiant, David a souhaité reprendre son poste de manutentionnaire en intérim le plus rapidement possible. Deux mois après, il était de retour au travail malgré une lourdeur toujours présente au côté gauche.

"C'était une grave erreur, concède-t-il. Je me suis blessé derrière. Après ça, je me suis arrêté de travailler un an pour me remettre. J'ai signé un CDI de cariste récemment, mais j'ai été victime d'un accident du travail quelques jours après. Toujours en arrêt, je souhaite me réorienter et fais les démarches pour me déclarer en inaptitude professionnelle. Je vais travailler dans le transport de personnes à mobilité réduite, grâce à l'association des paralysés de France. Le poste est adapté et dans mes cordes : mon expérience m'a amené à faire beaucoup de conduite." En France, selon la Société française neuro-vasculaire (SFNV), 75% des victimes d'AVC héritent d'un handicap physique et 40% seulement reprennent une activité professionnelle à plein temps.


Un handicap peu visible

"Je suis relativement chanceux, estime le Morbihannais résidant à Cruguel, près de Ploërmel. Aujourd'hui, il garde de l'AVC "cette douleur dans le côté gauche, un mal de tête fréquent, de l'agressivité". "Lorsque je ne suis pas bien reposé, je m'aide d'une canne pour marcher. Mais j'essais de l'utiliser le moins possible ! Quand il y a trop de monde dans une pièce, j'ai besoin d'aller m'isoler pour me ressourcer dans ma petite bulle," indique-t-il.

 


Un sentiment que partage Pascale : "Je ne supporte plus lorsqu'il y a trop de bruit, il me faut du calme. Je lis, je regarde des films positifs - jamais de films d'action ou de guerre - et je peins," explique celle qui s'est mise au chant depuis la maladie.

Son état lui procure un stress permanent. "Lorsque je marche, je n'ai plus la stabilité d'autrefois. Je ne plus aussi assurée qu'avant, je suis constamment obligé de regarder où je marche," reconnaît-elle. "Lorsqu'on nous voit, on ne remarque pas notre handicap. On me regarde toujours bizarrement lorsque je sors de ma voiture après m'être garé sur une place handicapé," assure David, qui milite au sein d'AVC, AIT et après, association d'échange et de sensibilisation autour de la maladie. "Elle est trop peu connue," affirme-t-il.
 

Les facteurs de risque

Si on connaît les symptômes de l'AVC (voir encadré plus bas), les causes en sont souvent plus floues. La formation du caillot sanguin provoquant l'AVC trouve son origine dans trois mécanismes:
  • Il peut découler d'une fibrilisation atriale, à savoir un rythme cardiaque irrégulier qui favorise la formation de caillots dans l'oreillette gauche,
  • Il peut être lié à une athéroscérose, c'est-à-dire un épaississement des artères dû à l'accumulation de lipides et de glucides dans l'organisme. La paroi irrégulière favorisent la formation de caillots,
  • Il peut-être une conséquence d'une maladie de petits vaisseaux de la tête, dûe à une variation de tension artérielle.
 

Nombreux sont les facteurs de risque à l'origine du déclenchement de ces mécanismes. "Ces facteurs sont liés à l'environnement mais aussi de l'hérédité, rappelle Serge Timsit. La consommation de tabac, d'aliments trop riches en sel, l'âge, l'hypertension artérielle, le cholestréol, l'obésité sont tous des facteurs de risque, tout comme les antécédants familiaux. Si un membre de la famille a été touché par un AVC, vous êtes plus susceptible d'en être victime," explique Serge Timsit.

Pascale avoue que c'est sans doute le stress qui a engendré chez elle l'AVC. "J'ai eu de la pression dans mon travail - j'étais laborantine dans deux labos de deux lycées différents à Rennes - et dans ma vie personnelle également," admet-elle.
 

La Bretagne particulièrement touchée

Avec un peu plus de 10 000 cas d'AVC par an, la Bretagne est une région "parmi les plus touchées en France," constate le professeur Timsit. "En Bretagne, on fume plus que la moyenne française, on boit probablement trop. Les habitudes alimentaires, comme la cuisine au beurre, est aussi un facteur favorisant l'AVC," souligne-t-il.

Depuis trente ans, le nombre de personnes touchées par un AVC a augmenté de près de 60%, "notamment chez les jeunes, qui sont devenus plus sédentaires", observe Serge Timsit. Cependant, la maladie est moins mortelle : grâce au développement d'une filière spécifique "où l'on soigne beaucoup mieux les malades, notamment grâce à la création d'unités neuro-vasculaires, dont huit se trouvent en Bretagne", la mortalité a diminué de 40% en 30 ans.

 



 
Les comportements préconisés en cas d'AVC

Quels sont les symptômes ?
  • Paralysie brutale, faiblesse ou engourdissement d'une partie du corps ou de la moitié du corps
  • Déformation de la bouche, apahsie (difficulté de s'exprimer)
  • Perte de la vision d'un oeil
  • Troubles de l'équilibre, de la coordination ou de la marche
  • Céphalée (maux de tête) intense inhabituelle
Que faire ?
  • Appeler le 15 (Samu)
  • Agir rapidement augmente les chances de survie de la victime d'AVC. Le CHU de Rennes estime qu'être soigné moins de 48 heures après avoir ressenti les symptômes diminue le risque de mortalité ou d'invalidité de 20 à 30%.
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