« S'engager pour libérer la France », c'est le thème du concours sur lequel les lycéens vont plancher cette année. Un concours pour perpétuer la mémoire de ceux qui résistèrent pendant la guerre 39-45. Deux résistants se sont déplacés à Saint-Malo pour dire aux jeunes quel fut leur engagement.
Le Concours National de la Résistance et de la Déportation s’est généralisé en 1961 dans toute la France. Il est ouvert, chaque année scolaire, aux élèves de 3ème et aux lycéens. Tous sont volontaires. Ils peuvent concourir dans 4 catégories selon leur situation au collège ou au lycée et suivant leur choix de travailler individuellement ou en groupe. Il peut s’agir d’un simple devoir sur table ou du montage d’une exposition, d’une vidéo ou même d’une bande dessinée.
Chaque académie (celle de Rennes pour la Bretagne) est chargée de diffuser l’information et d’organiser le concours suivant des règles précises. En Bretagne en 2016 les candidats étaient au nombre de 2200.
Pour les aider à nourrir leurs productions, les élèves sont invités à rencontrer d’anciens résistants et déportés. Ce jeudi 16 novembre 200 élèves du nord de l’Ille-et-Vilaine se retrouvent à Saint-Malo pour entendre et questionner 2 résistants qui vont témoigner chacun de leur histoire.
Marie-José Chombart de Lauwe (94 ans)
Elle avait l’âge des lycéens de Saint-Malo qu’elle rencontre aujourd’hui quand elle s’est engagée dans la Résistance.Très jeune, elle était consciente des dangers du nazisme. Son père, gazé dans les tranchées de la Première guerre mondiale, avait pris sa retraite en 1936 sur l’île de Bréhat où il avait ses origines. Sa mère s’était chargée de son instruction avant son entrée au Lycée de Tréguier. Sur la radio familiale ils avaient suivi avec inquiétude la montée d’Hitler au pouvoir.
En juin 40 pendant la débâcle des alliés elle est élève en première au lycée de Tréguier. Des Anglais se cachent non loin de là et ce sera l’une de ses premières actions que d’aider au montage d’un réseau d’évasion vers l’Angleterre.
En 41, elle débute des études de médecine à Rennes. Son Ausweis lui permet de circuler en zone interdite sur une belle partie de la côte nord pour retourner voir ses parents. Elle devient un élément clé du réseau littoral dont font aussi parti ses parents. Avec son vélo elle transporte des messages ou des plans des défenses côtières qui intéressent les alliés et les services secrets britanniques. Elle sert aussi aux liaisons avec le réseau de Rennes qui dispose d’un émetteur clandestin. Quand les premiers résistants sont arrêtés en 1941 elle continue ses actions. En mai 1942 une traction noire se gare devant son logement à Rennes : on vient l’arrêter. Le réseau est victime d’une infiltration, celle d’un agent double qui travaille pour les allemands.
Déportée à Ravensbrück
Condamnée à mort elle sera déportée anonymement (Nach und Nebel) au camp de femmes de Ravensbrück en juillet 43 avec 58 autres femmes dont sa mère. Elle va y travailler pour Siemens jusqu’à l’été 44 où elle sera chargée des bébés qui naissent dans le camp. Elle raconte:
« Nous leur faisions des tétines avec des doigts coupés dans des gants… On se battait pour la vie coûte que coûte »
A la fin de la guerre elle transférée à Mauthausen et sera libérée le 21 avril 1945.
Célestin Perrigault (96 ans)
Le 19 juin 1940 Célestin Perrigault est âgé de 18 ans. Il est à l'époque en deuxième année à l’école Normale de Quimper pour devenir instituteur. Son école est fermée ce matin-là à cause de l’arrivée imminente des Allemands dans le Finistère.« Je décide de gagner l’Angleterre : se rendre à Brest c’était presque plus simple que de rentrer chez moi en Ille et Vilaine !»
Avec un copain, il prend la route à pied en pleine débâcle des alliés. Un camion de Polonais les prend tous les deux. Sur la route de Brest ils dépannent une voiture de civils et apprennent que le port de Brest, attaqué par l’aviation allemande, est impraticable. Alors ils empruntent des vélos à Sizun pour se rendre dans un petit port et tenter d’embarquer sur un bateau de pêche. En vain : les Allemands sont déjà là.
Célestin sera nommé instituteur stagiaire au Huelgoat en 1941 et mettra longtemps à prendre contact avec la Résistance locale. C’est au club de foot que cela va se produire en 1943 ; un jour il entend dire qu’il manque trois joueurs sans doute partis pour l’Espagne.
« Finalement un gars vient à côté de moi faire ses lacets et me parler discrètement. Il va me demander de patienter en attendant qu’on me confie une mission » nous raconte Célestin.
Au contact des FTPF il se forge des convictions politiques : « on avait l’espoir d’un monde meilleur » dit-il. Dès lors il se revendique communiste. Il aura d’abord un rôle dans l’ombre : celui de ravitailler les maquis car « ceux qui rentrent dans la clandestinité sont autant de bouches à nourrir, mais heureusement, ajoute-t-il, il y avait beaucoup de solidarité dans les campagnes bretonnes ». Les parachutages d’armes et d’explosifs pour aider au combat contre les allemands n’arriveront dans son groupe qu’à la fin de la guerre.