Une éventuelle privation de l'accès aux eaux britanniques à cause du Brexit fait grimper la tension entre pêcheurs français et britanniques. Mais aussi pourrait gagner les Français entre eux, qui devraient se partager la ressource halieutique.
On a bien sûr beaucoup parlé du Brexit, qui créé toujours autant de tensions entre pêcheurs français et britanniques, aux assises de la pêche qui se tenaient à Granville, dans la Manche.
A l'issue d'une table-ronde qui les clôturaient, la patronne de l'Armement Cherbourgeois estimait qu'"il faut vraiment qu'on alerte les services de l'Etat sur ce qui se passe en mer".
A savoir des tensions, certes moins fortes que lors de la saison de la coquille, où les accrochages se sont multipliés, mais toutefois quotidiennes dans les eaux britanniques.
Elle a décrit "depuis mi-août une tension énorme entre Britanniques et Français" et "un renforcement des contrôles quasi-quotidien des autorités britanniques".
"Samedi dernier, à 21 milles des côtes anglaises", lors d'un contrôle décrit comme interminable, "on s'est retrouvé avec 15 bateaux (anglais) autour des nôtres et ils disaient: +on va faire pareil que ce que les Français nous ont fait l'année dernière+", pendant la guerre de la coquille Saint-Jacques", a raconté Emmanuelle Leroy.
Reports de pêche
Le ministre de l'Agriculture François Guillaume a d'ailleurs appelé, lors de sa venue, à la solidarité entre pays de l'UE susceptibles d'être affectés, mais également entre pêcheurs français. Il a par ailleurs estimé qu'il n'y avait "aucune raison" que les pêcheurs français ne puissent plus pêcher dans les eaux britanniques, même en cas de Brexit dur.
Car pour un armement comme celui d'Emmanuelle Leroy, leaux britanniques représentent 70% des captures réalisées.
"De Boulogne à la Bretagne, on va tous être impacté, donc on va tous être sur les dents, donc forcément il va y avoir des conflits entre pêcheurs, entre pêche côtière, entre fileyeurs, entre chalutiers hauturiers qui vont venir plus vers la côte", a-t-elle estimé.
"La difficulté, c'est de quantifier ces reports" de pêche dans les eaux britanniques, a relevé pour sa part Hubert Carré, directeur général du comité national des pêches. "La décision de report appartient à chaque chef d'entreprise", qui peut également choisir un arrêt temporaire de sa flotte, indemnisé par des aides européennes.
Mais de nombreux armateurs rechignent à avoir recours à ce dispositif, de crainte de perdre des marchés.
"On est un certain nombre d'acteurs en région Pays de la Loire qui nous inquiétons de conflits potentiels de reports de pêche en Atlantique, et plus précisément dans le golfe de Gascogne", a indiqué une élue du conseil régional, interpellant les participants à la table ronde sur des conflits entre pêcheurs français ou entre ceux-ci et leurs voisins espagnols.
Car la France ne serait pas la seule à pâtir de la fin de l'accès aux eaux anglaises. Huit Etats membres de l'UE sont concernés.