Les Rouillac père et fils, célèbres commissaires-priseurs du Val de Loire, ont encore déniché une pièce de grande valeur : le "King Size Bed" du roi Henri III au château d'Amboise. Attention à la confusion : il ne s'agit pas de l'original, mais d'une remarquable copie réalisée au XIXème siècle.
C'est à l'occasion d'un inventaire réalisé en Normandie dans une belle demeure bourgeoise que Philippe Rouillac a découvert ce lit, alors démonté. Saisi par la beauté des sculptures, typiques de la période Renaissance, et la taille impressionnante des montants, le commissaire-priseur s'est lancé, avec son fils Aymeric, dans une enquête de longue haleine pour en déterminer l'origine.
Aymeric Rouillac raconte leur découverte :
"En cherchant dans les bibliothèques et ouvrages spécialisés, on a fini par retrouver ce lit dans l'inventaire des prestigieuses collections d'Emile Gavet. Pour l'aménagement de son hôtel particulier, ce grand collectionneur du XIXème siècle appréciait le mobilier de la Renaissance. Ce lit, pièce maîtresse de la collection, y a été photographié et identifié comme étant celui d'Henri III."
Extraordinaire découverte, donc, car il n'existe en France qu'un seul lit royal Renaissance, celui de François 1er, exposé au musée national d'Ecouen. Mais il reste encore à l'authentifier :
"On a demandé à une société spécialisée une datation au carbone 14 pour savoir précisément quand le bois a été abattu, explique Aymeric Rouillac. Car le lit présenté comme étant celui de François 1er a en fait été fabriqué au XIXème siècle."
Verdict (et grosse déception...) : les arbres utilisés pour ce lit ont été coupés à la fin du XVIIIème siècle. Mort assassiné en 1589, le roi Henri III ne s'y est donc jamais allongé!
Tout comme celui de François 1er, le lit d'Henri III n'est qu'une reproduction, et il n'existe vraisemblablement plus de lit royal datant de la Renaissance. Tous ont dû être détruits. Une copie, donc, mais impressionnante par ses dimensions et d'une facture remarquable.
Réalisé en noyer noirci (ce qui lui donne un aspect d'ébène), le lit mesure 2,75 mètres de haut. Un vrai "King Size Bed", aux montants richement sculptés, le menuisier s'inspirant de gravures réalisées au XVIème siècle.
"on retrouve dans les montants des figures à la fois masculines et féminines, une référence aux questions qui se posent sur la sexualité d'Henri III, à la fois grand amateur de femmes et entouré de "mignons"", poursuit Aymeric Rouillac.
Bien que moins ancien que ne l'espéraient les deux commissaires-priseurs, ce lit dit "d'Henri III", mérite donc largement une présentation au public avant sa mise en vente. Faute de place à Amboise, les Rouillac l'ont proposé aux propriétaires du château de l'Islette, à Azay-le-Rideau, qui se sont empressés d'accepter.
"Lorsque le lit est arrivé ici, raconte Bénédicte Michaud, propriétaire, il était démonté et j'ai été très impressionnée par la taille des pièces de bois. Puis, au fil du montage, me sont apparues toutes les sculptures...Je suis totalement sous le charme de ce lit, qui s'intègre parfaitement dans notre château. Il est ici dans un lieu de vie, mieux que dans un espace muséal".
Construit à la Renaissance, le château de l'Islette est surtout connu pour avoir abrité les amours tumultueuses de Camille Claudel et Auguste Rodin. Le lit y sera présenté au public durant tout l'été, jusqu'à la vente aux enchères, "garden-party" organisée le 4 octobre au château d'Artigny. Pour Aymeric Rouillac, "il est impossible de dire sa valeur. Il s'agit d'une pièce unique et c'est la première fois qu'un tel lit est mis aux enchères. Sa mise à prix sera peut-être de 15 ou 20000 euros, puis ce sont les acheteurs qui en feront eux-même le prix".
Le lit sera présenté au public durant tout l'été au Château de l'Islette.