Blois : une enquête préliminaire ouverte trente ans après l'agression sexuelle d'une religieuse

Trente ans après avoir été victime d'une agression sexuelle, une ancienne religieuse a brisé le silence. Après son dépôt de plainte en avril, une autre victime potentielle du même prêtre s'est manifestée. Le procureur de Blois a lancé une enquête préliminaire.

Des décennies plus tard, il est toujours aussi difficile et douloureux de briser le silence sur les violences sexuelles au sein de l'Église catholique. C'est ce tabou que Caroline, ancienne religieuse du Loir-et-Cher habitant désormais Limoges, veut remettre en cause. C'est la raison du signalement qu'elle a envoyé au palais de justice de Blois en avril 2019, concernant une agression sexuelle dont elle a été victime il y a trente ans. Une enquête préliminaire a été ouverte et une autre victime potentielle a également été identifiée dans le Loir-et-Cher, comme le confirme le procureur, Frédéric Chevallier. 

 

Agressée pendant la confession

L'affaire remonte à la fin des années 80. A l'époque, Caroline est une religieuse d'une vingtaine d'années au sein de la Communauté des Béatitudes, dont dépend un petit lieu de retraite à Nouans-le-Fuzelier. Le père Jacques Marin, âgé, lui d'une soixantaine d'années, est alors une "star". On fait des kilomètres pour le voir et bénéficier de son "charisme de guérison".

C'est lors d'une confession, et en prétendant utiliser ce don reconnu par l'Église, que le prêtre se serait livré à des attouchements selon l'ancienne religieuse. Caroline vivra les trente années suivantes dans le silence. Elle quitte la communauté après quelques mois mais poursuit son engagement auprès de l'Église. En 2016, un décret du prélat de la Mission de France finit par retirer au père Marin "la faculté d'entendre les confessions", invoquant pêle-mêle des "gestes et attitudes" déplacés, la surdité du clerc et son grand âge, 86 ans au moment du décret.

 

 

Un témoignage fin septembre finalement annulé

"J'ai une colère en moi, parce que pendant des années, personne n'a rien dit, et parce que pendant des siècles, l'Église a couvert des crimes", témoigne Caroline, rencontrée à Limoges par France 3 Limousin. "Ces gens-là savaient qu'à un moment ou un autre ils devraient rendre des comptes, qu'ils devraient passer par la vérité", poursuit l'ancienne religieuse, qui affirme continuer à aimer son Église.

Il faut faire le ménage dans l'Eglise, sinon on se rend complice. C'est une maladie, il leur faut des soins. Il faut faire sortir ces gens-là de l'Eglise. C'est trop grave ! C'est trop grave.

Après avoir brisé le silence il y a un an, Caroline devait livrer son témoignage lors de la journée de rentrée organisée par l'Action catholique des femmes (ACF) de Haute-Vienne dans des locaux prêté par l'évêché local. Inquiet pour l'image de l'institution, l'évêque du diocèse, Mgr Bozo, a cependant insisté pour que cette prise de parole s'accompagne d'un "contrepoint" au récit de la victime. Une configuration dont se sont émues l'association et la victime, qui ont annulé l'événement jusqu'à nouvel ordre.
 

 

L'Église avance, mais part de loin

De son côté, l'Église catholique peut se targuer de quelques progrès dans la libération de la parole des victimes d'agressions sexuelles en son sein. Mais elle part de loin. En mai, le Pape a modifié la loi canonique via une bulle pontificale afin de rendre obligatoire le signalement de tout soupçon d'agression sexuelle ou de harcèlement à la hiérarchie de l'Eglise. La bulle ordonne également la mise en place de dispositifs permettant au public de signaler des cas d'agressions, et aux victimes d'être accompagnées.
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